La première famille
D’après un conte du recueil Les plus belles histoires d’amour
Adaptation française de Françoise Rose
Il était une fois donc, Dieu.
En ce temps –là, vivaient sur terre les deux premiers hommes et la première femme. Tous trois ne se connaissaient pas et vivaient en solitaire.
Le premier s’appelait Lundi.
Le second s’appelait Mardi.
Quant à la femme, elle s’appelait mercredi.
Un jour, alors que Lundi se sentait encore plus seul qu’à l’ordinaire, l’envie lui prit de sculpter dans un morceau de bois une statue. Cette statue représentait une femme mais il ne le savait pas car il n’en avait jamais vue. Mais ce qui est certain, c’est qu’il éprouva pour cette statue une vive affection et que grâce à elle, il se sentit moins seul. Le temps passait et son affection durait. Un jour de grande tendresse, il la baptisa Chrisalyde. Mais un jour, il dormit plus tard que d’habitude. Il avait trop chassé la veille. C’est alors que Mardi passa devant la hutte de Lundi et aperçu Chrisalyde. Il fut très ému par la statue « Chrisalyde » et loua sa beauté. Comme tu es-belle ! Il ôta sa cape et l’en revêtu. Il ramassa des coquillages et du corail et lui en fit des colliers. Il lui fit aussi une belle robe d’écume, toute blanche qui contrastait avec la couleur du bois. Puis, il s’en alla pêcher quelques poissons pour se nourrir. De ce temps que Lundi dormait et que Mardi pêchait , passa Mercredi.. A son tour, elle aperçut Chrisalyde et fut médusée par tant de grâce et d’harmonie. Elle sourit et du fond du coeur dit : « Comme j’aimerai que tu sois mon amie ! Comme ma solitude serait plus légère ! » Et Mercredi s’empara de la statue, la ramena dans sa maison et la coucha avec amour sur un lit de feuilles.
Pendant ce temps là Lundi se réveilla et Mardi revint de sa pêche. Quelle ne fut pas leur détresse et leur colère de constater la disparition de Chrysalide. Ils firent à peine connaissance et vociférant se mirent à sa recherche. C’est ainsi, qu’ils arrivèrent chez Mercredi et qu’ils virent Chrysalide tendrement allongée dans la douceur des feuilles. Mercredi fut alertée par les cris des deux hommes et arriva. Tous trois, se penchèrent sur Chrysalide et oh ! surprise s’aperçurent que Chrysalide bougeait , étirait ses bras, les regardait avec étonnement. D’abord, ils furent médusés puis soudain s’agitèrent et se disputèrent à qui mieux mieux !
- Elle est à moi !
- Non à moi !
- Non à moi !
Chrysalide, légèrement effrayée dit d’une voix mélodieuse qui surgissait d’un silence aussi vieux que le monde :
- Si on demandait à Dieu ?
Ce qu’ils firent.
Dieu, les écouta avec bonhomie et dit d’un ton conciliant, voire même patelin :
- Lundi, toi qui l’a conçue, tu seras le père mais toi Mercredi qui l’a réchauffée, abritée dans ta maison, toi qui lui a donné vie, tu seras la mère mais toi Mardi qui l’a protégée, qui a pris soin d’elle et l’a couverte de bijoux et d’écume tu sera son époux. Et Mardi s’évanouit de bonheur de savoir que Chrysalide lui était destinée. Mais Dieu ajouta d’un ton juste :
- Chrysalide n’est la possession de personne, elle est libre comme l’air qui l’entoure, elle est souffle et nul ne peut posséder le souffle de son prochain, elle est parfum et nul ne peut posséder un parfum, elle est lumière et nul ne peut posséder la lumière. Chrysalide a sa juste place parmi vous , sachez l’aimer et la respecter. Elle est liberté. Elle est femme.
Ainsi parla Dieu.
Chrysalide, merveilleusement vivante, merveilleusement heureuse, merveilleusement resplendissante prit soin de son époux comme il prit soin d’elle. Le conte dit aussi que Lundi aima et épousa Mercredi. Etonnante Mercredi !
Ce fut la première famille. Il y eu beaucoup d’enfants, des bébés, de bambins. Tous firent beaucoup de bruit avec leur vie et on dit même que parfois Dieu avait du mal à s’endormir... Et c’est ainsi qu’il inventa les boules Quilès.
Ce conte, c’est Mercredi qui l’a écrit. Un jour de grand bonheur.MJA