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28 février 2021 7 28 /02 /février /2021 18:33

Séminaire de psychanalyse d’enfants. 1

Françoise Dolto

Points Seuil N° 220

1982

 

La promesse du double

 

Chapitre 5.

 

Après un long silence doublé de Bach, Schubert et de quelques autres.

Quand les mots lus se font silence et coquelicots fermés avant de s’ouvrir dans l’eau du savoir. Mon savoir de l’enfant et du livre qui aujourd’hui va porter sur le double : celui de Narcisse, celui de Françoise Dolto, celui de René Char celui de Fernando Pessoa, le mien.

 

Le double conté par Narcisse :

Il se noie parce qu’il lui manque la médiation des mots des autres. C’est tout ce que l’histoire retient. La noyade d’une belle image sans mots.

 

 Le double conté par Françoise Dolto :

Le double, c’est l’autre semblable qui écrit dans la solitude son miroir jusqu’à sa brisure. Le double dans la dialectique

se sentir/ne plus se sentir

 autre, différent

sujet de son désir singulier négociant avec la solitude Rimbaldienne au risque de se reconnaître dans l’autre et de fondre notre manque avec le sien, au même niveau de son évolution libidinale.

Nous laissons en suspens la question du double de l’enfant psychotique qui dessine son impossible promesse dont parle avec tant d’humanité Françoise Dolto, tout à la recherche qu’il est de sa première scène primitive, jusqu’à l’acquisition de sa position debout. Lisez- la, Françoise. Mon travail n’est pas de-vous conter les auteurs, mais de vous inciter à les lire, dans la seule pédagogie possible, celle du partage chuchoté.

 

Le double conté par René Char

 

Le double de René Char s’écrit à partir d’un postulat et d’une promesse.

René Char écrit son postulat dans L’Atelier du poète 488, plus précisément dans Les feuillets d’Hypnos (225). 1946

« L’enfant ne voit pas l’homme sous un jour sûr mais sous un jour simplifié. Là est le secret de leur inséparabilité ».

L’enfant est le double inséparable de l’homme simplifié. Il est ainsi son ancêtre prometteur. Quelle est cette promesse ? Son hypothèse.

Nous la lisons dans L’Atelier du poète p.475 et plus précisément dans les Feuillets d’Hypnos 1946 161

« Tiens vis-à-vis des autres ce que tu t’es promis à toi seul. Là est ton contrat »

Une promesse qui dessine un contrat entre notre solitude, entre notre double et les autres.

Lu et approuvé. Ma signature dessine en lettres de sable ma promesse. Ecrire.

 

Le double conté par Fernando Pessoa

 

Le double est une supercherie pour ne pas mourir. Témoins et hétéronymes sont là pour défricher la douleur d’être seul, coupé de tous, jusqu’à la peur de la folie. Dans Un singulier regard p.60, Pessoa écrit : « Une de mes complications mentales – horrible au-delà de toute expression - , c’est ma terreur de la folie qui est déjà par elle-même la folie. »

p.61 « Je ne me sens vraiment être un que lorsque je constate que je suis deux, au moins. » Ainsi donc, Pessoa a plusieurs doubles, plusieurs hétéronymes.

 

Découvrir une œuvre unique.

Unique en solitude.

Unique en écriture

Un singulier regard

Intranquille.

Une promesse d’écrivain.

 

Le double conté par Marie-José, lectrice.

Le double est celui des pages doubles des livres que je lis comme autant d’hétéronymes.

Proposer des albums à des enfants c’est leur proposer des doubles qui leur permettent d’être un.

Encore un double potentiel pour moi, Marie-José : L’Inventeur de lectures à qui je m’adresse, m’extirpant de la solitude de ma lecture, me permettant d’être une, sujet de mon verbe lire.

Le double est générateur de l’enfant-sujet (Dolto), générateur de l’écrivain-sujet (Pessoa), générateur de l’enfant-adulte sujet (René Char) et enfin générateur de l’enfant-lecteur sujet (MJ. Annenkov).

 

Postulat :

Le double est une promesse potentielle identitaire s’il est médiatisé par le langage.

Pour ne pas s’y noyer comme Narcisse.

Hypothèse

C’est parce que « Tout est langage », prose ou poésie, que le double soutient l’identité, souligne l’éclosion de l’un-sujet de son verbe, compter, parler, écrire, lire.

Avec le double « Tout est promesse »

Un, deux… deux, un…trois. La symbolique du langage est une arithmétique possible du sujet parlant. Une arithmétique proposée par Françoise Dolto, René Char, Fernando Pessoa, Marie-José Annenkov.

Compte !

Un, deux, un… Trois

Parle !

En avant marche !

En avant parle !

En avant grandis !

En avant écris !

En avant lis !

 

Le double parlé est promesse

Le double inexprimé est mortifère

Le double sublimé est caresse

D’un futur identitaire

 

Le double

Entendu

Reconnu

Contourne

Folie et mort

Invente le sujet

Inscrit dans le verbe

De sa promesse d’être Un

Utile à chacun.

 

Marie-José Annenkov

Lectrice de Françoise Dolto

Lectrice de René Char

Lectrice de Fernando Pessoa

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23 février 2021 2 23 /02 /février /2021 20:06

Séminaire de Psychanalyse d’enfant 1. Françoise Dolto

Fernando Pessoa

Un singulier regard

Christian Bourgeois

2021 pour la présente édition

 

Je bloque sur le chapitre 6 : Le psychotique en quête de double ou d’objet sexuel. Tout être humain est utile à quelqu’un d’autre. Les transferts inimaginables du psychotique.

J’en suis au prodigieux Fernando Pessoa Un singulier regard. Cela va débloquer la situation.

Patience !

La création demande une grande patience et parfois du détour…

 

MJA

Lectrice de Françoise Dolto

Lectrice de Fernando Pessoa.

 

A suivre…

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16 février 2021 2 16 /02 /février /2021 11:31

Être du bond avec les parents du narcissisme primaire.

Séminaire de psychanalyse d’enfants. 1 Françoise Dolto

Seuil 1982.

Essais Point seuil 220

 

Dans notre précédent commentaire, nous avons défini le l’acte de lire comme une répétition de la castration ombilicale symboligène. Mais la condition nécessaire pour recevoir cette castration ombilicale et lui permettre d’être symboligène et d’avoir au préalable intériorisé les parents du narcissisme primaire. C’est l’objet du chapitre 5 que nous introduirons par un vers de notre cher René Char.

Hypnos 1946 Dans L’Atelier du poète p.194

« Être du bond. N’être pas du festin son épilogue ».

 

Reprenons notre lecture de Françoise Dolto.

 

« P : Qui sont les parents du narcissisme primaire dont vous parlez souvent ?

FD : Ce sont les parents intérieurs, le père et la mère, qui vivent en chacun de nous. C’est la raison pour laquelle aucun d’entre nous n’a besoin d’être élevé par ses parents de naissance à partir du moment où d’autres êtres humains permettent notre développement potentiel libidinal et éduquent nos capacités vers leur destin d’échange langagier, créatif et procréatif. L’être humain est physiquement un mammifère et psychiquement, un être de filiation langagière. »

Filiation langagière. « Tout est langage ». C’est par le langage que l’enfant intériorise ses parents, adoptifs ou non à son narcissisme primaire et qu’il développera son potentiel créatif libidinal et qu’il pourra exister, assumer son existence de jeune humain, l’assumer et prendre son élan dans le bond des mots. Dans le bon des mots quand le langage n’est pas incestueux.

Citons Françoise :

« L’œdipe, processus interne de l’être humain, peut-être faussé par les relations langagières d’une mère et d’un père, fixés érotiquement et de façon inconsciemment incestueuse, à leur enfant. »  L’enfant est alors, par cette fixation parentale érotique jeté dans un langage qui obstrue son potentiel libidinal. Il est vampirisé par la solitude.

Les livres, les albums partagés permettent de restaurer un langage symbolique, de sortir de l’emprise de la solitude, de retrouver un potentiel créatif libidinal dans la dialectique de raconter une histoire, que ce soit l’adulte ou l’enfant qui raconte un auteur qui vient se placer comme tiers entre l’enfant et l’adulte, restaurant le langage et la possible intériorisation des parents.

« Tout est langage ». Langage favorisé par un tiers. L’auteur d’un livre extirpe l’enfant ou l’adulte de sa solitude.

« Tout est langage ».

Tout est partage.

Dès le plus jeune âge, grâce aux pages tournées, racontées, caressées, dans l’immense bond, nous différons l’épilogue du festin que chaque matin nous recevons de la vie dans la filiation langagière et livresque transmises par nos parents intériorisés. Nous lisons, enfant ou adulte, du lieu de notre bond, de notre élan qui prennent leur origine dans nos parents intériorisés.

Lire, c’est bondir.

Marie-José Annenkov

Lectrice de Françoise Dolto

Lectrice de René Char

 

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4 février 2021 4 04 /02 /février /2021 15:33

Lire, une castration symboligène ombilicale.

 

René Char, 1930

Dans L’Atelier du poète

p.128

 

isolée à ravir

 

Elle a jeté un pont de soupirs

Sur la mer inhabitable

Elle a quitté ses habits de terre

Mis ses habits de sable

Elle parle une langue de liège

Epuise le temps en une saison

 

 

Françoise Dolto

Séminaire de psychanalyse. 1

 

Chapitre 4

Les différentes castrations II

p.57-65

 

P.57 P. Comment définiriez-vous la castration ombilicale ?

FD préfère répondre à cette question en l’inversant et en écrivant la définition suivante :

« La non-castration ombilicale se repère à ce que l’enfant est dans un état fusionnel à l’autre. »

Puis p.59, elle écrit

« La castration ombilicale, c’est la castration du fusionnel, qui est alors symbolisée par une relation à deux, dont l’un, la mère, est tout à fait entier, et l’autre le bébé a besoin d’un objet partiel. »

Cette définition me fait réfléchir sur « l’allant devenant » (FD) et sur l’allant-lisant (MJA)

L’écrivain est un autre entier et son lecteur, pour le lire, pour le découvrir a besoin de l’objet partiel qu’est le livre. Son regard sur le livre est, selon l’expression de Françoise Dolto « faiseur de paroles » A ce point, nous pensons à notre voyage en Rimbaldie (cf. commentaire précédent) dont le livre de Gérard Pirlot s’est fait, par notre regard posé sur ses pages, « faiseur de paroles » dans le torrent des poèmes de Rimbaud. Nous avons « épuisé le temps » en une saison, celle de la « Saison en enfer » et de celui des « Illuminations ». L’enfant fait de même. Il épuise le temps, son temps, avec des albums partagés avec l’adulte devenu différent de lui, dans le temps du deux (du deux avec l’auteur, du deux avec l’adulte).

Lire, c’est épuiser et répéter le temps de la castration ombilicale. Nous quittons alors « Nos habits de terre » (R.Char) et nous mettons « Nos habits de sable » (R.Char). Le sable du papier.

 

Lire, c’est avancer, c’est parler « une langue de liège » (R. Char), celle de l’auteur flottant sur la mer inhabitable de son désir, de notre désir ou de désir de l’enfant.

 

Lire, c’est créer une saison, en enfer ou en paradis, entre Rimbaud et Dante dans le tourment des mots en mouvement. C’est inventer ou perdre la Bible, première bibliothèque de l’humanité, me confiait une amie.

 

Je ne sais pas.

 

Lire, c’est vivre la castration symboligène ombilicale qui nous transporte dans le non-savoir sur « une mer inhabitable » (R. Char).

 

Lire, c’est jeter « un pont de soupirs » (R. Char) entre le non-savoir et le savoir.

 

Lire, c’est grâce à la castration symboligène ombilicale, vivre la liberté et à dos d’ailes de la Colombe s’envoler vers la paix.

 

Marie-José Annenkov

Lectrice de Françoise Dolto

De Gérard Pirlot

De René Char

De Rimbaud

 

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28 janvier 2021 4 28 /01 /janvier /2021 10:46

Donner des castrations symboligènes

 

Chapitre 3

 

 

J’aime cette dernière strophe du poème de René Char 1928 (Dans l’atelier du poète p.48) Le poème s’intitule Pèlerinage.

 

« Tranchant le passé une hache

Verticale s’est équilibrée

Des bulles gloutonnes d’espace

Montent à l’infini jouant à cache-cache

Cumul en mottes de clarté »

 

Dans ma tête studieuse murmurent 

Des mots gloutons de mémoire

(dans ma langue de fond)

« Montent à l’infini

Jouant à cache-cache

Cumul en motte de clarté »

 

Dans le chapitre d’aujourd’hui, Dolto joue à cache-cache avec des mots gloutons de mémoire (et de temps), limitant leur gloutonnerie en leur donnant des castrations symboligènes. Mais lisons de plus près avant de nous engager sur notre réflexion portant sur L’ Allant-lisant (Ma langue de fond).

J’aime beaucoup cette définition de la castration si différente de la frustration. Selon Françoise Dolto, le psychanalyste ne castre pas, comme il est exprimé souvent à tort, mais le psychanalyste « apporte les castrations ». Le verbe apporter est essentiel parce qu’il exprime l’essentiel positif de l’acte, le don.

Il y a une autre expression de ce chapitre que j’apprécie beaucoup. « L’enfant si Oui ». Aucune castration ne peut advenir si l’enfant n’est pas prêt pour la recevoir. L’enfant doit être « Oui » pour cela.

Notons aussi deux distinctions exprimées par Françoise Dolto :

  • L’oral est dans le registre du « dire ».
  • L’anal est dans le registre du « faire ».

Autre point important : pour permettre à l’enfant « d’être Oui », il est nécessaire de permettre à l’enfant d’accéder au fantasme qui sous-tend la douleur ou la solitude dans le langage, celle-là même qui nécessite l’apport de la castration.

Le terme employé de « Castration symboligène » et non de « Castration symbolique » est également important parce que symboligène signifie un processus en mouvement alors que Castration symbolique » signifie un processus abouti. Françoise Dolto réfléchit sur le travail d’une psychanalyse toujours en mouvement. Ce mouvement implique de situer l’enfant dans la déprivation (privation d’un plaisir partiel qu’il a déjà connu). C’est ce passage déjà connu à la déprivation qui constitue le processus de castration symboligène. La castration « en cause(s) » est celle de pulsion d’objet. Elle ne peut se réaliser qu’entre permissivité et mise en obstacle. Là encore, Françoise Dolto se situe « en mouvement ».

« Cette castration est donnée pour apporter une satisfaction encore plus grande car toute satisfaction symboligène est structurante non du besoin mais du désir. L’enfant est « un être du désir. », mais aussi « Tout est langage ».

Dans l’ensemble de ce séminaire sont toujours enroulées conceptualisation et étude clinique. L’étude clinique dans ce chapitre est constituée par la présentation d’une séance avec Katia, petite fille handicapée. Françoise Dolto écrit que, du fait de son handicap, la jeune enfant n’est identifiée ni fille, ni garçon. C’est son travail de psychanalyste qui l’identifiera « fille » et « non-Dolto ». Ce travail se fera à partir du « besoin » d’une médaille exprimé par l’enfant. Françoise Dolto différencie le « besoin » de la médaille et le désir de l’enfant. La médaille dans l’histoire de Katia représente la grand-mère absente qui en possédait une et dans le désir de l’enfant cette médaille représente le désir de s’identifier à sa grand-mère. Le travail de Françoise Dolto est de permettre, à partir de l’objet partiel qu’est la médaille, l’identification à la grand-mère manquante. La médaille soigne la blessure du manque mais ne remplace pas la grand-mère. La médaille apaise « la rupture symphonique » (René Char) mais ne la supprime pas. « Tout est langage » au sein de la blessure, dans la béance de la rupture symbolique qui autorise les larmes.

  • C’est bien de pleurer dit Françoise Dolto à l’enfant.

Katia s’identifiant, dans le chagrin, à l’objet partiel qu’est la médaille, s’identifie à l’objet total la grand-mère. Voilà, ce que nous donne à entendre Françoise Dolto, de la blessure à l’objet partiel, de l’objet partiel à l’objet total « tout est langage», d’où la nécessité de l’apport de castrations symboligènes. Elle conclue ainsi ce chapitre essentiel :

« C’est toujours dans le but de s’identifier à quelqu’un représentant une image progressive pour lui ou valorisée par autrui, que l’enfant fait ou dit quelque chose » (56) et j’ajouterai grâce aux castrations symboligènes apportées par le psychanalyste lorsque « l’enfant est dans le OUI ».

Si « l’enfant est dans le NON », amenons-le par des mots vrais vers le OUI d’un vivre-vrai. C’est là tout l’enseignement de Françoise Dolto.

 

Mais qu’en est-il de l’allant-lisant ?

 

Le livre, objet partiel, permet à l’enfant d’être valorisé par l’adulte, lui permet de s’identifier aux grands qui font tourner le monde, ainsi lui permet de « dire » et surtout de l’introduire à du « Grandir » grâce à des castrations symboligènes orales et anales qui lui enseignent qu’il est possible de lire et de dire autant que de faire.

« Tout est langage » et les livres porteurs de langage par excellence sont l’espoir d'apaiser le chagrin causé par des ruptures symphoniques, pour les grands comme pour les petits et permettent leur partage. C’est ce partage qui apporte les castrations symboligènes bienfaisantes.

 

Marie-José Annenkov

Lectrice de Françoise Dolto

 

 

 

 

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23 janvier 2021 6 23 /01 /janvier /2021 20:07

Le son à l’arbre suspendu

 

Un poème de René Char introduira mon propos.

Dans l’atelier du Poète

Quarto Gallimard

Page 50

 

naissance du jour

 

Cristaux de baccarat

Donjon de château maure

Le son à l’arbre suspendu

Le ciel transpire par ses pores

La feuille refuse un rêve

Qui n’est jamais redescendu

 

Parfois, dans le hasard des jours de consultation, un enfant symptôme des parents se présente à une participante P.

P. s’interroge :

- Doit-elle entamer une thérapie avec l’enfant et les parents ?

- Doit-elle diriger les parents vers un autre thérapeute ?

Françoise, craignant de considérer comme jumeaux, enfant et parents choisit la seconde solution.

Françoise, une fois encore, comme dans le chapitre 1 présente ce que signifie pour elle le travail du psychanalyste qui ne consiste surtout pas à un travail d’éducation au présent. L’espace-temps du psychanalyste est le passé, le refoulé à mettre en mots et en sens. Elle travaille avec les pulsions du passé, avec les images du corps d’autrefois, elle travaille avec ce qui est resté suspendu dans l’arbre parental (Ma langue de fond, médiatisée par René Char). Elle, Françoise, est là pour permettre la catharsis du passé, elle est là pour décrocher le son de l’arbre parental, elle est là pour permettre à la symphonie du désir de reprendre, d’éclore, là où elle avait été rompue. Elle est là pour mettre des mots sur une sublimation impossible qui risque de faire désastre et agressivité défensive ou offensive. Dans un premier entretien, elle reçoit les parents et leur enfant. Il faut donc être psychanalyste d’adultes et d’enfants. L’important est de retrouver la symphonie dont les notes sont des cristaux de baccarat, des cristaux comme des mots ou le contraire. Dans ce premier entretien, le travail de Françoise est de trier mots et cristaux, de les séparer pour les restituer aux uns comme aux autres, enfant, parents ; parents qui ensuite, seront dirigés, avec leurs mots restitués vers un autre analyste qui les soutiendra pour la catharsis du passé.

Il est fondamental dit Françoise, de prendre soin des uns et des autres ; de ne dévaloriser ni l’enfant, ni ses parents, prisonniers de leurs chagrins. Il est essentiel de prendre soin du son suspendu à l’arbre familial et des mots-cristaux de baccarat déposés devant elle, pendant la consultation.

 

Mais qu’en est-il pour les enfants adoptés de ce son suspendu à un autre arbre parental, de ces cristaux de baccarat qui viennent d’un ailleurs des cœurs présents ?

  • Prendre soin que le son de la parole œdipienne ne reste pas suspendu au premier arbre, le déplacer vers le second arbre, celui du présent. Faire le tri : la maman d’avant, la maman de maintenant. Le blutoir des poussières du temps.
  • Prendre soin des cristaux de baccarat, des mots appartenant au passé et au présent. Les trier, les séparer, trouver leur place symbolique.
  • Permettre à la dette symbolique d’éclore en restituant à parents et enfant leur mémoire d’amour. L’enfant a été choisi, désiré, choyé. Une mémoire-diamant. L’enfant pourra ainsi, comme tous les enfants, adoptés ou non accéder à son autonomie et à sa pleine stature. Il renoncera, écrit Françoise, à une identification fusionnelle, s’élancera vers un ciel poreux qui lui permettra de respirer. Les mots sont libérateurs mais peuvent-être aussi mortifères et alourdir le symbolique, nous fait souvenir Françoise. Son travail écrit-elle est d’alléger le symbolique pour permettre à « l’allant-devenant » (langue de fond de Françoise Dolto) d’advenir. En le faisant advenir, elle détache le rêve ou le fantasme de la feuille de l’arbre parental, elle fait respirer le ciel qui transpirait par ses pores. Elle protège les cristaux de baccarat. Elle restitue à l’enfant la surprise du désir comme le poète nous restitue la surprise du langage. Afin de protéger les cristaux de baccarat qui constituent la dette symbolique, Françoise Dolto différencie les besoins affirmés de l’enfant de son désir. « Pourquoi veux-tu cela ? » ou « Quel est le sens de ton besoin de… ? ». Le désir de l’enfant est le fleuve charriant ses besoins aurions-nous envie d’écrire dans notre langue de fond. Françoise Dolto fouille les mots du fleuve ; parfois pour les recueillir elle construit l’écluse d’une interprétation. Elle construit cette écluse quand l’enfant a besoin d’être soutenu, risquant de se noyer dans son fleuve qui parfois bouillonne et le fait « tourbillonner » comme je l’ai relaté dans le commentaire précédent. L’écluse permet à l’enfant « de ne pas subir les projections d’autrui et de se construire » (43)

Cette citation nous introduit au Allant-lisant (ma langue de fond) en construction avec les livres, l’adulte, l’enfant.

Postulat avancé :

Les cristaux de baccarat de la dette symbolique sont déposés précieusement, secrètement dans les livres par leurs auteurs dans le cœur des enfants. Ils permettent aux adultes et aux enfants de se parler dans la médiation de l’ailleurs des pages abritant des images. Les enfants comme les adultes vont recueillir le son d’une histoire suspendue à l’arbre de l’auteur, le font leur, s’élançant vers le ciel poreux transpirant leur vie.

Avec les livres, les enfants comme les adultes, ensemble, apprennent à prendre soin de leur dette symbolique, de la remettre avec les cristaux de baccarat dans le fleuve du désir qui va les charrier jusqu’à l’océan des mots de tous.

 

Lire 1

 

une longue histoire fluviale

singulière et plurielle

une longue histoire du désir

une histoire d’imaginaire abrité

dans le donjon plein de livres

dont les lecteurs activent avec passion

le pont-levis.

 

C’est à jouer avec ce pont-levis (car lire est un jeu) que nous devons introduire l’enfant. Quand il saura bien jouer le temps viendra d’ « être » dans la communauté de lecteurs. Il accomplira alors, sa vie durant, la prouesse et la promesse de l’allant-lisant, fleuve coulant, ciel respirant.

 

Lire 2

 

respirer les mots du désir

contempler la lune rendue

traverser la muraille

décrocher le son suspendu

de notre arbre de vie symbolique

dans la douceur de notre destin chuchoté

s’évanouir sur notre gravier gravé

tournant la page

 

de l’arôme du temps

 

Marie-José Annenkov

Lectrice de Françoise Dolto

 

  

 

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18 janvier 2021 1 18 /01 /janvier /2021 09:31

Le blutoir des souvenirs

 

Séminaire de psychanalyse d’enfants. 1

Françoise Dolto

Edition réalisée avec la collaboration de Louis Caldaguès.

Seuil octobre 1982. Point Essais 220

Tome 1, Chapitre 1

P.15-30

 

J’ai choisi cet exergue

 

René Char

Dans l’atelier du poète p.197

Quarto Gallimard

 

Versant (1932)

 

Donnons les prodiges à l’oubli secourable

Impavide

Laissons filer au blutoir des poussières les corps

Dont nous fûmes épris

Quittons ces fronts de chance plus souillés que les eaux

Fractures symphoniques noblesse de feuillage

A présent que décroît la portée de l’exemple

Quel carreau apparu en larmes

Va nous river

Cœurs partisans

 

  1. Fractures symphoniques

 

La symphonie, c’est le langage. « Tout est langage ». Ainsi, Françoise termine son chapitre. Ainsi, commencerai-je mon commentaire, dans la liberté de ma lecture.

Un arbre commence à ses racines. Un enfant s’élance dans sa vie par ses origines de sève et de mots. Mais parfois, la symphonie se rompt. Dans cette fracture se loge le symptôme de la jambe cassée, du discours brisé. L’enfant avance alors claudicant dans un symptôme mal identifié. Tout est langage écrit Françoise, tout est musique dirai-je dans ma langue de fond.

Trois enfants présentés par trois participants ou P.

Leurs origines sont négativées selon la langue de fond de Françoise Dolto. Négativées parce qu’enfouie dans du manque non-exprimé, parce qu’indicible et donc non-dit par la mère ou par les parents. L’enfant est livré tout entier à ce silence parental.

 

 

Enfant 1

 

Cet enfant aurait eu une grand-mère putain. Rien n’est certain. Mais l’important, c’est que pour la mère, ça pose un problème qui « manque à se dire » (dans ma langue de fond). Comment dire à l’enfant que sa grand-mère était une putain ? Sa mère n’y parvient pas ; c’est cela qui fait l’indicible, le trou, la béance, la sève déchirée. Comment renarcissiser la mère ? Car tout est là : réparer la sève des racines de l’enfant, c’est réparer par la mère en trouvant des mots qui faisant sens pourront être « transmis » à l’enfant. L’indicible est du fantôme intransmissible. Il hante l’âme des parents et des enfants. Le sens donne une tige au coquelicot de la douleur (voir notre commentaire Les Mots de Caldaquès). Dans la sève des racines, le coquelicot de la douleur va respirer et éclore. Selon Françoise Dolto, il n’est pas difficile de dire à l’enfant ce que signifie être une grand-mère putain. C’était une femme qui prêtait son corps, sans en avoir envie, pour de l’argent. Là où la parole se loge, la musique de l’âme peut reprendre, dans une sève de mots qui laisse place au coquelicot de la mère. « Tout est langage » qui peut être transmis à l’enfant qui alors avancera dans la connaissance de son histoire et de son destin symbolique. L’enfant renoue avec le destin de la grand-mère et retrouve sa sève luisante de mots enfin dits par la mère.

 

Enfant 2

 

Une belle histoire. Françoise nous conte toujours de belles histoires de silences toujours rompus par son intelligence et son expérience, comme autant de contes de fées parce que « Tout est langage ».

Une mère a déposé sa fille à l’assistance publique, mais ne l’a pas « abandonnée » car elle aura le droit de l’adopter jusqu’à l’âge de 13 ans, ce qu’elle fera avec son mari (ayant de lui deux enfants). La mère s’engage dans un silence d’impossible : ne rien dire à son enfant, ne rien dire du fait qu’elle est sa vraie mère, ne rien dire de cette ressemblance que l’enfant a perçu entre elles deux. Rupture symphonique, sève asséchée, coquelicot déchiré. La fillette est aux confins de l’autisme. Mais, « tout est langage ». Françoise Dolto parle avec la mère la conduisant vers une vérité à dire.  La symphonie reprend, la sève coule à nouveau, la psychose recule. Reste une névrose hystérique gravissime, malgré tout moins tragique que la psychose. L’histoire de l’enfant lui a été transmise. Elle a retrouvé sa mère et retrouve sa sève luisante de mots enfin dits par elle.

 

Enfant 3

 

Alain est sur le point d’être admis dans une clinique pour enfants hémophiles. La participante pose la question à Françoise Dolto de savoir s’il est temps ou non de transmettre son histoire à Alain. La béance, la rupture de la symphonie c’est la rupture du langage et la rupture du sens de l’histoire. Telle est ma lecture répétée du travail de Françoise Dolto. « Tout est langage » (Langage de fond de Françoise).  Le risque existentiel de tous, enfants et adultes, est de se perdre dans les brisures silencieuses de la sève (Ma langue de fond).

La mère, après la naissance d’Alain, n’a plus vu le père de son enfant. Lorsqu’il a trois mois et demi, elle rencontre un autre homme qu’elle épouse. La béance, le manque, la rupture symphonique écrit Françoise Dolto c’est le silence-radio sur la conception d’Alain et les neufs premiers mois de sa vie. La sève de « l’origine négativée » est, asséchée. La mère a été trahie et Alain continue par son existence la trahison du père. Symphonie tragique qui l’essouffle, l’empêche de parler, l’empêche d’exister. Mais, il existe malgré tout, témoignant de sa vitalité qui prend racine dans la vie écrit Françoise Dolto « De toute façon, les seuls parents importants ce sont ceux que nous avons en nous, et ceux-là ne sont pas méchants, puisqu’ils sont en toi. » (20).

Il est essentiel de permettre à l’enfant et à ses parents d’ exprimer la béance, même avec d’autres moyens que la parole (dessins, musique, pâte à modeler etc.), il est essentiel d’écouter aussi la sève percée (mon langage de fond), il est essentiel de caresser le feuillage (Ouaknin et René Char) et d’y introduire le langage. Nous en sommes au travail de Françoise Dolto, psychanalyste.

 

 

 

  1. Noblesse de feuillage ou le travail de la psychanalyste F. Dolto

 

Dans ce chapitre, dans le bruissement du feuillage, nous lisons le travail de Françoise Dolto, psychanalyste au cœur de la rupture symphonique des enfants.

Que fit-elle ? Comment se situait-elle dans le fracas silencieux de la souffrance des enfants ?

Comment définissait-elle son rôle ?

Comment réduisait-elle le « gauchissement de l’allant-devenant de l’enfant » ?

 

Ce qui était fondamental selon elle, c’était de redonner confiance à la mère, de la renarcissiser pour restaurer la communication brisée. Elle tissait alors, avec le blutoir des souvenirs le lien intergénérationnel, sûre que toute castration parlée était structurante pour l’enfant et que toute castration négativée l’immobilisait, faisant douleur du fait de la perte de la situation primitive, au risque du mourir. Selon Françoise, il fallait donc restaurée la communication trouée par le silence, gravement négativée.

Restaurer la communication, écrit-elle, c’est permettre de parler sous toutes les formes possibles, des mimiques aux mots, en passant par la musique, les dessins, la pâte à modeler. C’est permettre de représenter ce qui a fait silence, cassure, fracas, rupture symphonique.

Le postulat de Françoise Dolto c’est la dialectique de réciprocité entre la mère et l’enfant. « L’homme fait la mer » (Renaud), l’enfant fait la mère, la mère fait l’enfant. C’est dans cette dialectique que va se restaurer la dynamique du donner et du recevoir, dynamique-pivot de nos vies d’adultes devenus. Pivot qui « fait le beurre » dans « le tourbillon » de la relation mère-enfant, écrit Françoise Dolto. Elle précise encore, « Le tourbillon, c’est le parent vivant en soi » qui produit tant d’émois.

Son travail à Françoise, c’est dire le ressentir, de la mère, de l’enfant, des parents. C’est avancer dans le tourbillon au risque de sa pratique vraie d’analyste parlant vrai. Ressentir, dire, mettre en mots ce que l’enfant fait, poser du sens sur l’indicible et sur les émois archaïques de l’enfant tourbillonné (ma langue de fond). Elle cherche ce qui se répète en silence et le refait surgir en mots, avec les mots « Tout est langage », telle est la faisabilité du blutoir des souvenirs.

Mais tout cela, insiste Françoise Dolto, est un travail qui répond au travail psychique en souffrance. Son travail exige de l’enfant un paiement symbolique, cailloux ou timbres-poste. C’est là, sa grande trouvaille qui inscrit l’enfant dans la dette symbolique qui permet la parole. La communication peut alors se restaurer, la rupture symphonique triomphant de la pathologie peut à nouveau instaurer une chanson douce que lui chantait sa maman. La chanson de son histoire.

 

  1. Comment ce chapitre permet d’éclairer l’allant-devenant lecteur ?

 

Mon postulat est que la mère, par son attention, son respect, sa reconnaissance permet à l’enfant de devenir un lecteur.

Mon postulat est que l’enfant dans l’attention qu’il porte à la voix de sa mère et à son guidage dans l’acte de lire, tout autant qu’au livre, va permettre à la mère de lui transmettre le désir de lire, fondamental pour entrer dans la communauté de lecteurs.

Ce double postulat en instaure un troisième, la communication entre la mère et l’enfant ne peut être parasitée par de la rupture symphonique. L’entrée dans la communauté des lecteurs est un chant cristallin retrouvé par tous, porté par multiples albums qui racontent le monde, son bruit, ses terreurs et sa paix. Les livres donc peuvent exprimer la rupture symphonique dans une relation inaugurale d’amour et de tendresse, de mots et d’images, d’intelligence et de narration, dans la couleur de chaque heure. Le soleil, par les livres, se marie à la lune, les pages sont des étoiles, les récits des arcs-en-ciel.

L’enfant lit et grandit dans une splendeur cosmique.

C’est dans la paix des livres que l’enfant deviendra lecteur près de nous et de ses parents, dans une famille élargie. C’est dans la paix des livres qu’il grandira ancêtre de lui-même et de tous, qu’il cessera d’« être tourbillonné » dans une rupture symphonique. Avec les livres, il ressentira ses émois archaïques, qu’il pourra peut-être dire si nous l’écoutons, si nous l’entendons.

Alors, avec les livres, ses livres, il pourra donner et recevoir de belles histoires dans le meilleur et dans le pire de son imaginaire caressé par le blutoir des souvenirs

 

Marie-José Annenkov

Lectrice de Françoise Dolto

 

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11 janvier 2021 1 11 /01 /janvier /2021 12:58

 

Séminaire de psychanalyse d’enfants. 1

Françoise Dolto

Edition réalisée avec la collaboration de Louis Caldaguès.

Seuil octobre 1982

Point Essais 220

 

Je pense converser sur ce séminaire de Françoise Dolto (en regard de ma recherche sur les enfants et les livres ) une fois par semaine environ. Françoise Dolto était une grande dame, une voix unique qui demandait d'être entendue avec douceur, caressée comme le dirait Ouaknin dans le temps de son expérience et de son âme aussi uniques que sa voix.

Je souhaite mener conjointement étude et amour, souligner et caresser, inventer et respecter le texte.

Je souhaite interpréter jusqu'au bout de ma fidélité pour Françoise et pour les enfants, jusqu'au bout du souvenir de l'enfant sage que j'ai été.

Jusqu'au bout de la "fracture symphonique noblesse de feuillage"(dans Char, L'atelier du poète p.197), jusqu'au bout de mon âge, jusqu'au bout du temps du désir de lire et surtout de "l'éclat de lire", Ouaknin encore et toujours.

 

Les mots de Louis Caldaguès

 

Nous introduirons notre propos en recopiant le dernier vers du poème La Toile de Iazel Vallorca, posé hier sur notre blog :

« La tâche circulaire rouge sur la persienne :  le point aveugle de la douleur dont on ignore l’origine ».

Je dirai dans ma langue de fond, le coquelicot rouge de la douleur inconnue qui fait si mal. Freud et les psychanalystes qui l’ont suivi, dont Dolto, ont cueilli ces coquelicots dans le cœur des patients. Des patients enfants.

Ce coffret constitué de trois livres, Séminaire de psychanalyse d’enfants -1, 2, 3 – m’a suivie de déménagements en déménagements, sans que je ne parvienne à les lire. Ils étaient là, silencieux, dans mon quotidien. Freud dans Inhibition, symptôme et angoisse écrit que là où ça résiste, ça désire. Le temps est enfin venu de sortir de ma résistance et de lire seule et avec vous ce Séminaire de psychanalyse d’enfants 1, 2, 3.

Ce matin, j’ai lu les mots de Caldaguès qui s’inaugurent d’un silence, d’un blanc et non du terme Préface. Lire Dolto c’est emprunter un chemin qui débute par un silence, ce que nous enseigne Louis Caldaguès. Telle est mon interprétation de ce blanc sans mot.

Le coquelicot rouge se cueille dans le champ blanc du désir tû que Françoise va mettre au travail de la parole avec trois personnages : L’analyste, l’enfant physiquement absent et elle Françoise Dolto.

Mais, j’avance trop vite. Reprenons dans la lenteur. Lire, c’est apprendre la lenteur du désir bouillonnant de découvrir la connaissance ou le texte poétique ou romanesque. Lire, c’est dompter la ferveur d’aimer l’auteur. Lire, c’est une histoire d’amour, d’impétuosité et de douceur.

Ce livre est né d’un séminaire de 15 ans qui a eu lieu

  • A l’école freudienne à Paris.
  • A l’institut des jeunes sourds 254 rue Saint Jacques à Paris.

Ce séminaire était ouvert aux psychothérapeutes comme aux psychanalystes en formation. Il avait pour objet de répondre à l’urgence de la difficulté qu’il y avait à cueillir les coquelicots si fragiles de l’enfance, trop souvent oubliée. Une orientation dans ce travail se détacha progressivement dont la dialectique s’affirma dans le mouvement de l’expérience de Françoise Dolto qui pour élaborer sa pensée théorique exprimait toujours la rondeur angulaire de la concrétude. Elle éprouve alors le désir d’inventer un langage pour transmettre la rondeur angulaire du concret (selon ma langue de fond…) et de ce qu’elle nomme si bien « L’allant-devenant » pivot de sa « langue de fond ». Lisant cela, toujours emportée par ma recherche Enfant-Livre, je construisis à mon tour, le terme « L’allant-lisant », dans le sourire de l’analogie et de l’emprunt.

Lire, c’est aussi emprunter courtoisement.

Mais continuons…

Françoise, sa vie durant, a cherché ce qui peut « gauchir l’allant-devenant ». Quant à moi, je cherche depuis des années à élaborer « L’allant-lisant » parlant « La langue de fond » que j’aime tant pratiquer de Françoise Dolto. Ecouter, écrire, lire, c’est inventer des mots pour mettre le langage en mouvement ; nous sommes pur mouvement… Nos mots doivent suivre !

L’idée essentielle de Dolto est que l’homme est un être en devenir – devenir du sujet parlant une langue de fond, la sienne ; j’emprunte donc pour dire que l’enfant est un lecteur en devenir et qu’il est capital d’entendre et de reconnaître ce devenir parce que l’enfant invente l’homme qu’il sera, le lecteur qu’il deviendra. « L’enfant est une promesse » écrit Hannah Arendt. Nous devons l’accompagner pour qu’il tienne sa promesse de sujet parlant, mais aussi sa promesse de sujet-lisant.

C’est l’espoir durable des coquelicots, trempés dans l’eau de la langue du fond.

C’est l’espoir des coquelicots qui ont trouvé l’origine de leur douleur.

C’est l’espoir des coquelicots qui peuvent éclore dans l’or du langage de tous.

C’est l’espoir des coquelicots cueillis dans le symbolique de leur destin si éphémère d’être mortel, mais aussi recueillis dans la symbolique de l’imaginaire de tous si durable d’être immensément humaine depuis l’âge de la caverne.

Existe-t-il quelque chose de plus beau qu’un champ de coquelicots ?

Existe-t-il quelque chose de plus beau que le silence d’un enfant à entendre et à guider avec tendresse et savoir ?

 

Marie-José Annenkov, lectrice de Françoise Dolto

 

                                                                                                                                          

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9 janvier 2021 6 09 /01 /janvier /2021 20:57

Françoise Dolto

Trois films de

Elisabeth Coronel et Arnaud de Mezamat

Abacaris Films Gallimard

 

Une si belle photo !

 

Film 1 - Tu as choisi de naître - 53 min

Film 2 - Parler vrai - 55 min

Film 3 - N'ayez pas peur - 53 min

Complément -Maud Mannoni. Evocations

22 min

 

Un brochure pour suivre le chemin des films

 

Ma petite fille 7 ans regardait attentivement ma bibliothèque. C'était l'autre jour.

-Tu l'aimes beaucoup Françoise ?

- ???

- Tu as beaucoup de livres d'elle.

- Sourire attendri.

Oui, je l'aime beaucoup Françoise. Cette après-midi, seule dans mon petit salon, j'ai regardé, émerveillée, émue, tourmentée les trois films.

A 20 ans, à l'université de Montpellier, elle était notre soleil, notre repère, notre longue boussole.

A 73 ans, toujours à Montpellier, elle est ma permanence retrouvée, toujours avec ferveur.

Oui, je l'aime Françoise et dans les semaines qui viennent, je vous parlerai un peu, doucement, sagement de son œuvre. Le voulez-vous ?

Je dédierai mon travail à ma petite-fille qui m'a invitée à la redécouvrir.

MJA

 

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