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29 mars 2009 7 29 /03 /mars /2009 15:44

Cadeau !


PESSOA


Mes livres  disent  ce à quoi,  ceux à qui « je tiens » ; je tiens par eux, je tiens à eux. Je n’aime pas les prêter parce que j’ai toujours peur de leur perte, de leur disparition, peur du non-retour qui m’arracherait à mes toujours, comme à leur toujours inscrivant le manque dans ma bibliothèque.


Mes livres sont un baume sur la déchirure de mon enfance qui  creuse le lit de mes souvenirs. Mon enfance est la pénombre de ma vie d’adulte ; mes livres m’enveloppent de clair-obscur. Chaque livre aimé est un rayon de soleil qui éclaire ma pénombre. Être lectrice me fait âme éclairée. Je voulais écrire « femme éclairée ». Etrange lapsus qui me fait découvrir le son « âme » niché dans le mot « femme » …


Mes souvenirs d’enfance enfermés sous la poussière de mes premières années me confisquent ma paix d’adulte ; mes livres me la restituent.


Si vous me demandez, si je suis heureuse, je vous répondrai « je ne sais pas » ou « qui sait ? », ou « peut-être ». Pour moi, être heureuse est une cause qui toujours s’interroge dans la mouvance du temps en fuite. Être heureuse ou « dé heureuse dans le fil de ma vie me fait femme en mouvement. Mes livres me relient au mouvement de mon temps celui qui inscrit mes jours et mes toujours, mes silences et ma nuit, ma présence et mon chant,mon calme et mon être, mon absence et mon temps, celui que je sais avoir retrouvé,  là,  près de mon Alhambra, réceptacle de ma mémoire oubliée.


Il existe des jours d’immense fatigue où je me sens « enfermée dehors », où j’ai perdu le sens du non-être et de l’être, où je ne peux même plus nommer ma solitude. Ces jours de silence, ces jours de néant, ces jours où Satan me confisque le langage commun qui me fait humaine, ces jours d’angoisse et de folie, ces jours où le temps devient toupie et tempête, ces jours où je suis hors de portée de tous, ces jours de psychose, ces jours sans cause ni raison, ces jours sans cause ni maison, ces jours trop bruyants dans ma tête où je sombre dans l’ombre profonde des mots distordus,  des mots douloureux, sans repères et sans pères, sans mère, sans toi ni moi, ces jours d’hiver, sans loi , ces jours sans amarres, ces jours  noirs du suicide, ces jours là,  j’ouvre Le livre de l’Intranquillité de Fernando Pessoa.; il me dit tout entière dans ma contradiction d’être, il me dit point d’interrogation., point de départ et point d’arrivée. Je me sais impossible parcours.


Lecture : vanité du je, qui à peine lu déjà n’est plus, mémoire, qui à peine effleurée coule à pic dans le Léthé


Avec mes livres, je glisse et je m’invente des aubes noires et des bleus crépuscules, je me retrouve femme floue, femme d’ombre, femme d’ambre, femme mouvante, femme-fleur, femme-enfant, femme mère, femme engagée, femme silencieuse, femme fonceuse, femme mauve, femme fleuve, femme de feuilles, femme en deuil, femme sans seuil, femme écueil, femme de toujours, femme de sable, femme à l’heure, femme au travail, femme lisante, femme brillante, femme hésitante, femme triomphante, femme mélancolique, femme éclatante, femme partante, femme lisante, femme libre !


Les auteurs de mes livres sont mes hétéronymes.




Je tourne les pages, tu tournes les pages, il ou elle tourne les pages, nous tournons les pages, vous tournez les pages, ils ou elles tournent les pages !


Je marque la page, tu marques la page, il ou elle marque la page, nous marquons la page, vous marquez la page, ils ou elles marquent la page.


Je partage la page, tu partages la page, il ou elle partage la page, nous partageons la page, vous partagez la page, ils  ou elles partagent la page.


Lire est une déclinaison de l’autre dans l’espace transitionnel que sont les pages. Lire est un espace/temps de l’âme. Lire est un corridor en or pour l’âme qui dort. Soudain étirant ses lettres suspendues à de minuscules points s’élancent dans le ciel de nos vies pour se mêler points et virgules confondues au grand tintamarre du monde, qui de colère parfois gronde mais qui, parfois de tendresse sourit.


Je lis, tu lis, il ou elle lit, nous lisons, vous lisez, ils ou elles lisent Fernando Pessoa.


A demain,


Marie-josé Colet

5 mars 2009


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29 mars 2009 7 29 /03 /mars /2009 15:26

18. Les Thibault


Je suis en vacances à La Rochelle. De La Rochelle  à l’île de Ré, il n’y a qu’un pont. Je l’ai vite franchi.


J’ai 60 ans, j’en avais quatorze quand je passais mes vacances à l’île de Ré. Remontons le temps, le temps de franchir le pont. Quelques tours de roues, quelques pas sur cette plage déserte de mars. Une histoire d’émotions. J’étais si belle à 14 ans, toutes ma vie devant moi. Maintenant, je n’ai plus qu’une saison. Je tends le bras et j’atteins mon hiver, main tendue, corps flétri.


L’anniversaire de mes quatorze ans : un livre, cinq livres, cinq tomes dans la collection de poche : Les Thibault de Roger Martin du Gard. Passionnée, allongée sur le sable, recroquevillée dans le vieux fauteuil de cuir de la maison de vacances de ma grande soeur qui m’accueillait, allongée sur mon lit en désordre, dans le souffle de cet été là, fébrilement je tournais les pages.


Jacques, Antoine, cette famille bourgeoise, ces deux frères si différents. Le journal de Jacques, les amours d’Antoine. L’un si brouillon, si bouillonnant, l’autre si sage. Le père si imposant, tenant d’une main de fer sa famille bourgeoise. Jacques, le pensionnaire (comme moi), Jacques le révolté (comme moi), Jacques l’engagé dans la paix (comme moi).  Les Thibault, Jaurès, et les milliers de tracts pacifiques jetés sur les voix ferrées sur lesquelles étaient couchées les femmes qui ne voulaient pas laisser leurs hommes partir à la guerre de 1914. Ailleurs la fête, les hommes qui ne comprennent rien et s’en vont en chantant. Les Thibault, une fresque familiale et historique. Une inoubliable saga.


Les Thibault, ma première passion pour un livre d’adultes. Les Thibault, mon premier manteau de pacifiste auquel je n’allais jamais renoncer malgré la difficulté à comprendre l’histoire, la légende des siècles passés et présents. Les Thibault dont j’ai tant aimé le style serré et si intense qui racontait en phrases simples et réalistes l’histoire d’une famille qui devait marquer ma vie toute entière.


Sur le bord de cette plage rétaise, en cette fin d’hiver, je pensais à mon printemps de vie et à mon automne de femme. Je pensais au Journal de Roger Martin du Gard que j’ai commencé il y a quelques mois à peine. Un journal en plusieurs tomes aux éditions Gallimard annoté par Claude Sicard que j’ai eu la chance de rencontrer, homme érudit et simple qui, en quelques phrases souriantes a su me faire souvenir de ma lecture d’adolescente. J’ai commencé ce journal attentivement, je ne l’ai pas fini encore, aux prises avec tant de lectures multiples mais je le finirai car il me passionne.


J’ai découvert combien j’aimais cet auteur, humaniste, sachant être brillant, entouré de ses amis, attentif à la guerre qu’il a connu, à ses amitiés, à la troublante complexité de l’amour. Avant de partir à l’île de Ré, je lisais avec émotion le récit qu’il faisait de la longue et cruelle maladie de sa mère et je revivais la maladie de la mienne. La lecture est un étonnant tremplin d’identifications et c’est pour cela que selon moi, résister à ce monde difficile passe par nos lectures et leur possible partage. Lire ensemble, c’est poser et parler ensemble nos identifications. Pour résister il faut d’abord s’identifier à des êtres imaginaires ou réels,  à des êtres qu’on admire. La résistance passe par l’admiration. Admirer est une pierre précieuse de mon coffre-fort existentiel, de ma caverne d’Ali Baba, de mon Alhambra, ma bibliothèque si pleine de ses diamants que sont mes livres. Caverne d’Ali Baba parce que j’ai tout volé aux livres pour inventer ma vie. Inventer pour dire NON à l’injuste.


Sur le bord de cette plage rétaise, en cette fin d’hiver, je pensais au printemps de ma vie et à mon automne de femme ; j’étais heureuse. Je savais intimement que l’un rejoignait l’autre et que si mon corps avait changé, que si mon visage s’était ridé, que si mes yeux s’étaient cernés, mon âme était intacte. Roger Martin du Gard me soufflait combien j’étais la même, intacte de mes engagements, intacte de mon désir de paix, intact de ma passion de mon engagement dans l’acte de lire. Le vent rétais, fidèle à lui-même aussi, me soufflait tout cela. Alors, je connus  le bonheur d’être femme, d’être lectrice, d’être vivante sur une plage, de vivre mon engagement de jeunesse – la paix -  et de le reconnaître au détour d’un auteur , entre le printemps et l’automne de ma vie. Le bonheur, c’est  mettre de temps à autre un joli collier de livres comme des perles, brillantes comme le temps et marcher sur le sable si friable de la vie mais pourtant si permanent. Ma vie, ma plage, mes pages. Aujourd’hui, avec Les Thibault, avec Roger Martin du Gard, j’ai retrouvé une fois de plus ma permanence. C’est bien ainsi puisque c’est une permanence pour ma colombe, celle que j’aime tant et pour la paix. Utopie, utopie, j’ai tant besoin de toi. Utopie, utopie est tu le souffle de ma vie ? Roger Martin du Gard était peut-être un utopiste mais c’est son honneur et sa gloire, son savoir et son talent qui ont sans doute fait de lui le Prix Nobel de littérature en 1937.


Sur la plage rétaise, j’ai su, heureuse, me souvenir de lui et marcher, rêveuse sur mon chemin de vie qui écrit mes saisons de femmes.


A demain,

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29 mars 2009 7 29 /03 /mars /2009 15:23

Cadeau !

18. J'existe.

J'aime passionnément lire. Je suis bien enfouie dans un fauteuil, les jambes repliées, les genoux au menton, où mieux encore, allongée sur mon lit, le dos calé par un amas d'oreillers moelleux. Légèreté des plumes. Dans le confort de mon corps, dans la douceur de la chambre, je parcours les méandres en noir et blanc, musardant dans une contrée imprimée où se déploient sentiments, subtils, passions et secrets intimes.

Je suis Alice au pays des mots, celle qui aime les livres baignés d'amour ou d'humour, celle qui aime l'ironie, la poésie, les essais; essais de ma lecture, l’Histoire qui écrit des dates et dessinent des champ de batailles, mais surtout celle qui écrit armistices et paix signés, celle qui écrit l'honneur mais aussi celle des alcôves et passions.

J'aime les grands génies et les petits auteurs, j'aime les auteurs de tous les âges et de toute culture.

Magie du livre tissant un imaginaire de fil d'or et d'argent, un imaginaire de clair-obscur; lire, apprendre à lire, réinventer la lumière intérieure. Que de livres j'ai lus ! Après avoir refermé un livre, je ne suis plus tout à fait la même, imperceptible changement aussi intangible que léger.

Un livre
érosion de la seconde
caresse printanière
une page tournée,
une rencontre partagée
des mots envolés,
des mots retrouvés

Un livre
A la recherche
de l'être perdu.

Un livre
des livres

espace fictif
espace invisible
c'est ma ville en papier
ville d'encre
ville d'ancrage.
j'épelle
je voyage

j'existe

 Le 3 mars 2OO9

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29 mars 2009 7 29 /03 /mars /2009 15:10

Cadeau !

17. Le pied à pied du temps

Ecrire la vague éteinte
d’une toute petite plainte
dans la différence qui brise
l’océan du temps portant
le tourment de l’indifférence

Ecrire ma colère
qui dans le ciel erre
dans le flot de mes pleurs
devant tant de fleurs
de l’humanité sans lueur

Ecrire de l’amour
l’impossible toujours
dans le glissement des jours
dans la nuit qui se tait
sous sa couverture d’étoiles

Ecrire le vague chagrin
de ma vague de chagrin
d’un matin qui se tait
dans l'aube tamisée
du grand ciel irisé

Ecrire sur mon cahier
Mon âme pillée
Quand le reflet du miroir brisé
Se tait à l’infini
De mon impossible dit

Ecrire sur mon calendrier
l’intime de ma révolte
Inventer la possible réponse
à ce monde injuste
qui casse l’humain

Ecrire mes pas obstinés
Comme des mots sur la page
de mon intégrité silencieuse
qui griffe sans douceur
Ce monde d’injustices

Ecrire l’enthousiasme retrouvé
dans le pied à pied du temps
avec mes livres et ma mémoire
qui me soufflent l’espoir
d'un merveilleux recommencement,

A demain,

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29 mars 2009 7 29 /03 /mars /2009 15:01


Cadeau !

 

Pourquoi, tu effaces ton texte ?


Pourquoi tu effaces chaque jour ton texte ?

Je l’efface parce que la vie passe

Rien ne peut la retenir

ni la tenir

ni la ternir

Pourquoi tu effaces ton texte ?

Avec toi je souhaite un lien

têtu, ténu, quotidien

C’est dur à dire

C’est beau à vivre

Pourquoi tu effaces ton texte ?

Avec toi je souhaite élaborer

au jour le jour

la paix

tu le sais

Pourquoi tu effaces ton texte ?

Parce que l’essentiel n’est pas le retenir

mais dans ta mémoire  le saisir

au risque de l’absence et du manque

pour éviter le pire de mon dire

Pourquoi tu effaces ton texte ?

Parce que chaque jour est un nouveau jour

Parce chaque jour est un nouveau toujours

Parce que chaque jour court

C’est la dure loi des hommes et du temps

Pourquoi tu effaces ton texte ?

Ce n’est pas moi qui l’efface

C’est le temps de temps en temps

qui se joue de ta mémoire

mais jamais de mon espoir

Pourquoi tu effaces ton texte ?

Parce que chaque jour écrit ma solitude

Ma finitude et ma soif d’infini

Quand mon texte est fini

Heureuse, je sais que demain le temps m’attend.

Pourquoi tu effaces ton texte ?

Pour t’embêter grand nigaud

Pour m’amuser

Pour me distraire d’être

Femme  femme femme !

Alors ton texte

c’est ta métaphore ?

c’est ça ?

Oui, dans la castration du temps

Vraiment c’est fort !

C’est fort mais c’est cruel

Pour lutter contre le Léthé

et la dure castration

nous avons inventé les livres

qui écrivent l’éternité

Pourquoi, j’efface mon texte ?

pour mieux nous rendre immortels

Mes textes, je lierai

Mon livre tu liras

petit homme en plusieurs tomes

Il s’appellera

Mon noyau de nuit et de lumière

Ce sera le livre du millénaire

Mes livres donneront  sens à nos vies

dans  la lumière de la paix.

Marie-José COLET

1er mars 2009

Femme souvent varie, bien fol qui s’y fie ! Je n’effacerai plus mes textes qui chaque jour prendront place dans mon blog « Les inventeurs de lecture. » Tu pourras t’absenter et dans la douceur de ta disponibilité me retrouver. Malgré tout, n’oublie d’inventer nos lectures pour la démocratie et  la paix dans la tendresse de la régularité de nos rencontres et de nos jours qui écrivent lentement nos toujours.


A demain,

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29 mars 2009 7 29 /03 /mars /2009 14:57

Cadeau !


15. Le livre de Jef Curvale,
Dominique Delpiroux, Jiho
Les enfants de la mêlée
Erès.2007 (142 Pages)

France/Pays de Galles. On a gagné ! Ce fut un peu juste mais quel beau match ! Quel suspens ! (cela m’a été répété ainsi) . Je n’ai rien à dire, je n’y connais rien en rugby si ce n’est que je suis toujours très impressionnée par les oreilles des joueurs et les mêlées ; tous ces culs dressés vers le ciel dans une solidarité impressionnante me font toujours rire et j’aime rire donc j’aime sans doute le rugby.

En tout cas, j’aime le livre Les enfants de la mêlée. Essai de Pierre Villepreux...transformé par mon ami Rémy Puyuelo. Echauffement avec Henri Stassinet.

C’est un livre où la tendresse, l’humour, les illustrations de talent de Jiho viennent se mêler au dur et sérieux métier d’éducateur. Quand le sport devient lieu de culture mais aussi et surtout un outil efficace pour rencontrer des jeunes en détresse.

Un jour, Jef Curval inventa de son toujours d’éducateur auprès de jeunes délinquants, de jeune épileptiques, auprès d’adolescents aux frontières de la psychose une réponse, un être au monde pour lui et pour tous ces jeunes : le rugby, sport avant tout de contact. C’est de cet être au monde là dont il est question dans ce livre que j’ai tant aimé parce qu’il raconte des solutions, du possible dans cet impossible de l’enfance malheureuse. Dans cet impossible qui pour moi fait toujours scandale.

Scandale de l’ Ecureuil, talentueux pour vider les poches, gamin entre placement et prison, prison et caravane de ses parents, scandale du gamin à la dérive malgré un don sans précédent de buteur d’exception et un sens du jeu extraordinaire. Devant ce scandale de l’enfant paumé mais si doué advint le rugby comme lieu d’un possible être au monde social

Scandale de Paco qui rate son match pour cause de « non-chaussures ». Il n’osa jamais demandé à ses parents de lui racheter des chaussures neuves ; trop de pauvreté collait aux semelles

Scandale de Henri qui finit pendu au bout de sa corde en proie à un sentiment d’abandon insurmontable.

Scandale de tous ces gamins de la misère et du chagrin, de la marge et de la solitude, scandale de ces enfants nés au mauvais endroit au mauvais moment, scandale de la jeunesse bafouée, abandonnée, ignorée, malmenée, mutilée, enfermée, indexée, rejetée, redressée, scandale de ces enfants qui si jeunes prennent pour destination de vie, le naufrage.

Alors devant ce scandale, Jeff prend le ballon et le lance ! A eux de courir pour l’attraper, à eux de marquer le but, à eux de pousser dans une mêlée solidaire, à eux de jouer au rugby. C’est si simple ! si beau ! si humain et dans la tension du jeu et des relations qui s’instaurent avec d’autres sur le terrain, les voilà, qui à leur insu, dans la douceur du gazon et la brusquerie du jeu deviennent peu à peu sujets d’une partie à gagner. Dans le sport il ne s’agit pas de perdre ! Il faut y être ! Cette nécessité là « d’y être » dans la ferveur de défendre la couleur symbolique de son maillot les sauve autant que faire ce peu de leur galère et de leur scandale.

Certaines histoires sont drôles, d’autres cruelles, d’autres révoltantes, d’autres tristes, certaine ont une fin heureuses, d’autres tragiques. Pas une ne ressemble à la précédente parce que pas un ado ne ressemble jamais à un autre ado, parce que pas un humain ne ressemble à un autre humain mais c’est avec ce singulier là que Jef s’applique à créer le pluriel de son équipe. Le ballon va de l’un à l’autre dans le mouvement de la vie, de ses évènements, de ses drames, de ses séparations, de ses retrouvailles. Une partie est finie, une autre recommence et si mon équipe a perdu cette fois-ci, elle gagnera là fois prochaine ; ça s’appelle espoir. Le ballon roule, la vie coule, les parties s’enroulent, les victoires se déroulent, il enlève son maillot, le remet, décrotte ses chaussures et dans le vestiaires les mots fusent et même enfouis dans la pudeur de la peur de se montrer, les sentiments sont bien là. Alors à lire ce livre, je comprends que rugby rime avec vie.

Bravo ! Jef Curvale pour la partie que vous avez engagé contre le scandale de l’enfance malheureuse, bravo pour votre amour des « Sales gosses », titre d’un autre de vos livres, que j’ai tout autant aimé.

Enfin, je veux vous dire, Jef, que pendant mes dernières années de travail auprès de jeunes en difficulté d’être, j’ai souvent comme un ballon, fait circuler votre livre de mains en mains et qu’il fut souvent temps de lectures entre nous, et de contacts réussis. Car la lecture est aussi, j’en suis convaincue un sport de contact. Un sport de l’âme mais un sport où le ballon est un livre ! Lisons et lançons le livre sur le gazon de nos mots affectueux et intelligents, de nos mots inventifs, créatifs... Quelqu’un s’en saisira et la vie continuera.

Le scandale de notre solitude sera vaincue dans les pages tournées, dans les mots échangés, dans les interrogations partagées, dans les réponses données, par le temps dompté, par le sablier caressé.

Hier, j’ai lu sur un site lacanien dont j’aime le foisonnement et la richesse intellectuelle avec des chants profonds pour accompagner nos lectures, une phrase sur laquelle je veux revenir qui disait que perdre le sens c’est trouver la liberté. Non, je ne le crois pas. Le sens ce doit être comme un ballon de rugby que tour à tour on perd et on retrouve ; c’est cette aller et venue du ballon qu’on saisit et qu’on lâche qui constitue la liberté. La liberté, c’est pourvoir lâcher pour mieux reprendre. La liberté c’est du mouvement, de l’alternance présence du sens /absence de sens. Lire c’est cela : retrouver le sens de ce qu’un auteur a voulu dire pour soudain nous l’approprier mais aussi pour le lui rendre. Dans les ateliers de lecture dompter le temps, caresser le sablier c’est s’inscrire dans cette alternance du sens, la vivre et la parler pleinement, c’est inventer la liberté d’être par la liberté des mots, ensemble, tous ensemble, c’est nous donner une chance de nous parler sans posséder, c'est nous donner une chance d'être moins seul dans le langage.

Allez ! On continue la partie du mouvement, de la solidarité, des colombes déployées, des ballons envolés dans le ciel de nos vies ! Allez ! On continue, et moi, je le sais à mon dernier souffle ou presque, je clamerai du fond de mon coeur, corps et âme confondus, sur le stade de mes heures écoulées :

« But ! j’ai vécu ! »

A demain,

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29 mars 2009 7 29 /03 /mars /2009 14:52

CADEAU !


14.Ethique.


J’ai travaillé dur des années durant pour écrire Madame, je veux apprendre à lire ! Puis nous avons travaillé dur Nicole Rouja, Anne Dubaele-Le Gac et moi-même pour rendre transmissible cet ouvrage qui à l’origine fut une vraie forêt vierge intellectuelle Arbres et lianes de partout ! Nous avons défriché dans nos sagesses de femmes à l’ouvrage. Vint le temps de la publication et vint le temps de l’inquiétude.


Comment allait-il être reçu ?


 Une de nos inquiétudes essentielles à toutes trois fut la suivante : Si ce livre venait  là à point nommé pour boucher une case d’angoisse : « je ne sais pas faire », elle, elle sait, je vais faire pareil ?


Le métier de formateur est tellement difficile : toujours là au plus  près des autres qui veulent apprendre à lire, dans le gouffre d’eux-mêmes, gouffre qu’ils transmettent à tous, et surtout au formateur qui est près d’eux. Un gouffre de manque dans lequel il ne faut pas tomber. Facile à dire mais tellement difficile à vivre !  Comment dire cette sourde angoisse qui m’étreignait quand les uns ou les autres me demandaient affolés : « Madame, je veux apprendre à lire ! »  Comment dire ma propre dévalorisation quand au moment des évaluations de fin de 4 mois de formation, je savais que la plupart ne savaient pas encore lire même si je savais qu’ils avaient retrouvé confiance en eux et que, quelque chose de leur image et de leur narcissisme s’étaient restaurés, même si je savais qu’ils occupaient maintenant leur place si précieuse de lecteur. Mais combien le métier de formateur est difficile d’être malmené du manque des autres ! Ma crainte à la sortie de ce livre fut donc qu’il soit un emplâtre sur une jambe de bois. Pour nous trois,  dans notre harmonie de femmes au travail, l’idée nous vint d’une formation pour insister sur l’éthique de l’ouvrage.


Il n’existe pas de savoir sans éthique. Il n’existe pas de savoir sans mots pour lui donner sens.. Alors  nous avons voulu créer un lieu pour que  cette éthique pour permettre l’appropriation de cette étonnante expérience que représente la mise en place et de l’animation d’ateliers de lectures, une formation pour inventer du sens encore et encore, tous ensemble.


Nous avons conçu cette formation en trois temps :


- Un temps commun de découverte du travail tel qu’il fut mené dans l’écriture du livre 

- un temps de silence, d’interruption, d’élaboration au coeur de sa vie et de son quotidien professionnel retrouvé

- un temps d’écriture du chemin de lecture et de mise en place de « son » atelier de lecture  adapté à  « sa » pratique.


Nous avons conçu cette formation dans le temps d’une genèse, nous l’avons voulu occasion de rencontres entre professionnels d’expériences, nous l’avons voulu expression « du déjà-là » de chacun, chacune, du déjà là à mettre en commun pour l’explorer ensemble, pour lui redonner sa vitalité, son efficacité. Venir en formation ce n’est pas venir apprendre

c’est venir découvrir ce qu’on sait déjà, c’est se revitaliser, reconnaître ses sources (et non se ressourcer), c’est habiter à nouveau ce qui fait notre identité professionnelle dont le quotidien trop difficile nous a trop souvent confisqué.


Nous avons souhaité que cette formation soit l’occasion pour chacun de retrouver ses savoir-faire les plus archaïques et les plus élaborés  et ce autour et à partir des livres et de l’acte de lire, dans le respect de l’éthique de Madame, je veux apprendre à lire ! : lire dans le partage, dans l’égalité, dans la fraternité et l’adelphité et surtout dans la liberté.


Merci donc de venir vous découvrir et nous découvrir autours de nos livres à tous, comme ça, cinq jours durant.


A bientôt,


Je vous laisse maintenant découvrir dans les pages ci-dessous le programme de formation.


A demain,

Marie-José Colet

Le 27 février 2009

.


Madame ;je veux apprendre à lire !

Ou

Comment permettre à chacun  de  réinvestir son statut de lecteur

et de s’approprier l’éthique des ateliers de lectures


Formation animée par


Marie-José Colet, Psychologue clinicienne et formatrice.


"La lecture, c’est l’histoire de notre histoire, collective et individuelle.

Des mots qui sans cesse circulent : des mots pour lire et lire des mots pour dire…"

(In Madame, je veux apprendre à lire  ! / Marie-José COLET.-Erès, 2008)



Dates et lieux : (non encore déterminés. En projet)


Trois jours

Intervalle de 15 jours

Deux jours


L’inscription à cette formation implique la présence aux cinq journées


Public :

 

Educateurs, formateurs, psychologues, bibliothèquaires, ensemble des travailleurs sociaux .


Argumentaire :


Marie-José COLET souhaite partager son expérience dans l’ouvrage Madame, je veux apprendre à lire ! paru depuis aux éditions Erès, sous la forme d’un récit et d’un support didactique élaboré en collaboration avec Nicole Rouja et Anne Dubaele-Le Gac. La formation démarre par une invitation des participants à questionner leur propre rapport à la lecture, à le situer, afin de construire leur "chemin de lecture".

Cette activité préalable vise à faire prendre conscience aux professionnels de la nécessité à :


- Prendre en compte le statut de lecteur pour tous,

- Reconnaître les compétences "déjà-là" pour favoriser l'émergence de nouveaux savoirs,

- Restaurer le désir d’apprendre en redonnant du sens à l'acte de lire, d'écrire, d'échanger.


Contenus :


- La lecture quand elle se fait temps identitaire (1re journée).

Nous approfondirons le questionnement relatif de chacun à son propre rapport à la lecture et de témoigner individuellement de la lecture comme aire transitionnelle


- La lecture quand elle se fait temps de citoyenneté (2e journée).

Nous approfondirons le questionnement de chacun relatif à l’inscription de ses lectures dans la cité quand elle fait lien avec le groupe de formation en place.


-Appropriation des séquences de l’atelier de lectures. (3ème journée)

Nous serons en situation écrite et orale des séquences telles qu’elles sont présentées dans l’ouvrage Madame, je veux apprendre à lire ! dans un temps réel


- L’élaboration de son propre chemin de lecture (4ème journée)

Nous approfondirons à partir de nos livres et de nos souvenirs de lecture ce que signifie pour nous notre engagement dans l’acte de lire.


- Mise en place de son atelier de lecture en s’appropriant les repères nécessaires et en adéquation avec sa pratique professionnelle (5e journée).


Objectifs :

- Elaborer son propre chemin de lecture, son propre rapport à la lecture dans le temps de son identité et de sa cité, condition absolument nécessaire pour mettre en place des ateliers de lectures

- Proposer une démarche et un espace de réflexions théoriques et éthiques qui permettent de mettre en place un atelier de lecture adapté à un public différentiel et toujours singulier.

Méthode :

- Articulation entre apports théoriques et expériences, outils, techniques

- Alternance de temps individuels et en groupe : confrontation des itinéraires

- Alternance de temps écrits et oraux

- Prise en compte des pratiques de chacun

- Rencontre autour des livres apportés par les participants ;

- Travail en permanence avec du « vivant » dans lequel s’inscriront, au fil des mots de tous, mes propres repères théoriques

 Je veillerai à tous moments à rester en adéquation avec la pratique professionnelle de tous et l’intérêt voire même la passion de chacun pour ses propres livres et ceux des autres.

Intervenante.

Madame Marie-José Colet

Psychologue Clinicienne

Dess de psychologie clinique en juin 1976

- J’ai animé des ateliers de lectures depuis 25 ans , en hôpital psychiatrique, dans des prisons, dans une association d’insertion pour public en difficultés, dans une maison de retraite, dans une école primaire et dans une association montalbanaise dont j’ai été à l’origine de la création « Le livre ouvert ».

- J’ai animé des formations de formateurs dans le cadre de la BPS  (Toulouse) et de Ressources et Territoires (Toulouse)

- Je collabore à la revue Empan

- Ecrivaine :

J’ai publié deux ouvrages

1) Chez Erès  en 2008 : Madame, je veux apprendre à lire !

2 Editions la Brochure : La femme en Retard (auto fiction)

3) en cours d’écriture : Mon noyau de nuit et de lumière dans lequel j’écris une somme sur la lecture à partir des livres de ma bibliothèque.

Coordonnées

Marie-José Colet

432 avenue de Fonneuve

82000 Montauban

mjcolet@gmail.com

05.63.66.10.14 (répondeur)

06.86.91.73.11










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29 mars 2009 7 29 /03 /mars /2009 14:48

Cadeau !


13 . Le livre d’Albert Einstein et de Sigmund Freud

Pourquoi la guerre ?
Rivages Poches/Petites bibliothèque
2005

J’ai une amie qui aime à me dire que la Bible est le livre des livres, est qu’à elle seule, la bible est toute une bibliothèque.

Je reprends l’assertion de mon amie et je dis que ce petit livre de 65 pages de Freud et D’Einstein est à lui seul une bibliothèque de livres pour la paix. Ce livre ouvre sous nos regards attentifs des chemins de connaissance : le droit, la politique, l’histoire, la philosophie, la mythologie. Nous pensons tour à tour à Marx, à Jean-pierre Vernant, à Hannah Arendt, aux auteurs qui nous ont conté l’histoire de Rome ou de la Grèce, nous pensons aux guerres de religions ou au conquistadors. Et soudain s’ouvre sous nos pieds le gouffre de la seconde guerre mondiale.

Un livre qui a une histoire, celle de la rencontre de deux hommes de génie en Europe, dans une période violente : les années 30. Deux hommes, deux chercheurs, deux hommes juifs. Pas de la même façon : un, (Einstein) plus sioniste que l’autre (Freud). Freud est fier de l’Université de Jérusalem, fier des kibboutz mais il pense que La Palestine ne pourra jamais être un état juif, que le monde Chrétien et Musulman ne laisseront jamais faire. Il aurait mieux fallu pensait Freud que la patrie juive s’installe ailleurs ; mes pensées vont vers Hannah Harendt qui décrit si bien dans les Origines du totalitarisme les divers possibles du sionisme.

Un livre, une correspondance poignante d’intelligence. Une correspondance dans le cadre de la Société des Nations dont Einstein à souhaité démissionné à plusieurs reprises pour plusieurs raisons, la principale étant qu’en tant que juif il ne pouvait représenter l’Allemagne. Une correspondance dans le cadre de l’Histoire. 27 février 1933 : incendie du Rechstag, une correspondance qui deviendra un cadeau de Freud à Mussolini, une correspondance qui deviendra dans l’histoire des hommes un lieu d’interrogations sur la guerre, sur la paix.

Plus, je relis ce livre plus j’ai envie de le relire, il est d’une telle richesse, d’une telle intelligence, d’une telle simplicité ! Mais il est aussi un livre complexe, parce que l’humanité est complexe ; à chaque fois que vient le temps de le fermer et de reprendre mon chemin, je reste un long moment pensive comme si ce livre à lui seul pouvait m’aider dans mon interrogation immobile et désespérée de toujours : pour quoi la guerre ?

Pourquoi la guerre ? Pourquoi la violence ? Pourquoi le droit ? Pourquoi la force ? Pourquoi les communautés ? Pourquoi des intérêts pour les pays ? Pourquoi l’histoire ? Pourquoi la Paix si difficile, partout et de tous temps? Me voici l’enfant égrainant devant mes parents perplexes mes Pourquoi ? Et point par point, Einstein puis Freud déclinent ces pourquoi et moi, à chaque fois le sens m’échappe mais j’y reviens fascinée mon crayon en main. Je trouve ce livre terriblement dur à lire dans son apparente simplicité peut-être parce que tout simplement il me renvoie à ma propre violence, à ma propre pulsion de mort moi la pacifique, moi la vivante. Il y a là quelque chose que je ne peux nouer dans l’intelligence du livre. Qu’est que j’oublie là chaque fois dans ma nouvelle lecture de « Pourquoi la guerre ? » Qu’est que j’échoue à vous transmettre de ce livre que j’aime tant ? Je ne sais pas. J’échoue à le transmettre mais comme j’aimerai le partager, comme j’aimerai ne pas être désespérée en lisant la conclusion de Freud ayant trait à la force de la culture pour canaliser la pulsion de mort, comme j’aimerai ne pas être désespérée et être convaincue par l’assertion de Freud que la culture travaille pour la Paix ! Mais je ne sais pas. L’Allemagne, l’Autriche n’étaient-elles pas des nations cultivées ? Combien de fois me suis-je heurtée à cette question là, les larmes au yeux ? Alors à ma façon de femme, à ma façon de lectrice, à ma façon d’animatrice d’ateliers de lectures, une fois de plus je réponds que: l’essentiel n’est pas la culture, (trop souvent la culture d’une élite social) mais la culture parlée par tous, humbles et grands, la culture sans l’exclusion des mots et des affects qu’elle emporte, la culture à l’écoute de la tendresse de celui qui la porte, de ceux qui l’inventent. Les ateliers de lectures ne sont pas des lieux de culture mais des espaces temps pour des personnes de toutes origines sociales parlant ensemble les mots des livres.

Pourquoi la guerre ? Parce que les hommes inscrits dans la relativité du temps et de l’espace ne savent ni lire ni parler pour cause d’inconscient.

A demain,

Marie-José Colet

26 février 2009

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29 mars 2009 7 29 /03 /mars /2009 14:44
Cadeau !

11.Le livre du Professeur Henri Sztulman


Psychanalyse et Humanisme

Manifeste contre les impostures de la pensée dominante

Editons Ombres blanches

Collection rue des gestes

Novembre 2008


Un livre d’automne dédié à « Mes enfants » et qui donc dit la transmission d’un professeur émérite, fondateur de l’école de psychopathologie, psychiatre et psychanalyste, à l’initiative de différents masters professionnels et d’une formation doctorale et d’un laboratoire de recherche mais surtout la transmission d’un homme, d’un père à ses enfants.

Que leur transmet-il dans une langue simple et pourtant érudite ?


Il leur transmet dans un même noeud espoir et désespoir.


Désespoir d’un monde qui de l’humain fait table rase au profit de l’argent ; l’humain devient valeur marchande jusque dans les confins de son âme dans le parcours d’une déshumanisation galopante, qui chaque jour plus vite  court à sa perte, à ses pertes : pertes des repères, pertes des règles, et plus grave encore perte de sa symbolique et de histoire, perte des ancêtres, perte du fil qui relie chacun à chacun. On fait feu de tout bois de l’humain : de sa souffrance, de ses égarements, de ses symptômes, de sa culture. Plus rien ne compte que le visible de sa pauvre existence, qu’on chiffre, qu’on monnaye, qu’on classe, qu’on clone, qu’on « clâne ». A coups de certitudes, à coup d’obscurantisme et de scientisme.


Le professeur Henri Sztulman transmet la psychanalyse abîmée par ceux qui n’en veulent pas parce que à trop entendre les rejetons de l’inconscient on pourrait prendre le chemin de la subversion du pouvoir et menacer les impostures de la pensée dominante. Freud le subversif qui a drainé dans son chemin tant de sexualité et pire encore de la sexualité infantile, qui a détruit cette idée des enfants petits angelots blonds de leurs parents. Psychanalyse qualifiée d’obscène, de « science latine et décadente », de science « judéo-chrétienne », de science si humiliante pour l’homme parce que le délogeant de sa toute puissance moïque, une psychanalyse qui n’aurait plus sa place dans un monde d’immédiateté, de virtuel et d’économie molestée, dans un monde ou le pourquoi et le comment n’intéresse plus ou seul compte l’observation non pas à ras des pâquerettes (ce sont de trop jolies fleurs pour les mêler à cette chienlit de maintenant) mais à ras de la médiocrité, à ras de la banalité, à ras de la non curiosité. On voit, on compte et du reste on s’en fiche. Pour dire tout cela on emploie des termes savants que les enfants ne comprennent pas ainsi ils n’auront pas idée de dire « quand je serai grand, je changerai tout ça. » « Quand je serai grand, je serai humaniste. »


Alors, avec ses termes simples et énergiques, le Professeur Henri Sztulman, transmet l’espoir à ses grands enfants et leur épelle l’alphabet d’un humanisme qu’ils pourront à leur tour choisir et transmettre.


L’humanisme, c’est vivre debout, c’est résister à ce qui ne tourne pas rond. Compter les morceaux et classer les âmes et les monnayer ce n’est pas tourner rond.


Tourner rond c’est reconnaître que chaque être humain unique, resplendit de son unicité même si elle se fait parfois douloureuse.


Tourner rond, c’est peut être reconnaître que « tous nous sommes atteints » mais que ce n’est pas une raison pour se décourager d’être.


Tourner rond c’est donner des repères à l’homme et des possibilité de se construire à partir d’identifications. Et là, le Professeur Henri Sztulman livre à ses enfants l’engagement de sa vie, la psychanalyse dans ce qu’elle a de plus beau :  permettre à l’autre à la dérive de ses symptômes et de son enfance de se reconstruire, voire même de se construire, durablement dans un  possible être ensemble. L’histoire n’est pas de guérir ou de ne pas guérir, l’histoire est  « d’être ou de ne pas être » avec les autres et dans son indivis. C’est ça l’espoir de la psychanalyse tel que nous le transmet le Professeur Henri Sztulman et  cela suppose des psychanalystes, bien plus que des mots du savoir, mais une posture humaniste. C’est ce que j’ai aimé le plus dans ce livre : la posture.


La posture c’est à dire savoir du lieu de sa pratique adopter du lieu de son fauteuil ou non,  telle  ou telle référence théorique, tel ou telle thérapie médicamenteuse, tel ou tel souvenir de cadre professionnel allant du service fermé à un centre de jour pour adolescents ou laboratoire universitaire et cela signifie ce que le Professeur Henri Sztulman n’a de cesse de nous répéter, l’essentiel n’est pas la psychanalyse mais le sujet, l’humain. Voilà ce que cet homme de savoir transmet à ses enfants : certes le savoir de ce monde est important car il dit nos ancêtres, notre histoire, notre symbolique mais le point de départ, le point d’arrivée, le point d’existence, le point d’insistance c’est l’humain, le sujet, celui qu’il écoute, celui qu’il rencontre, l’unique à chaque fois. Le concept de résistance, le NON ne peuvent s’ancrer que dans le respect  de l’indivis, de l’irréductible et avec  l’aide, quand cela se fait nécessaire que le psychanalyste peut lui apporter pour retrouver une énergie disponible qui lui permettra à son tour d’être porteur d’humanisme et d’espoir d’un monde presque meilleur.


Le presque est de moi car il dit l’incertitude de nos luttes en devenir et l’incertitude c’est notre étroite marge de liberté et de modestie. Selon moi, un humaniste est une homme modeste (et le Professeur Henri Sztulman sait l’être) car il sait le fil des générations.


Comme un funambule, entre désespoir et espoir, le Professeur Henri Sztulman transmet une psychanalyse exigeante, définit sans complaisance, sans concessions  mais avec clarté un humanisme qui nous donne à tous envie de lutter , de résister, de vivre debout, nombreux  (et nous le sommes !) et transmet sa sagesse d’homme à ses enfants. Heureux enfants !

 

A demain,



 

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29 mars 2009 7 29 /03 /mars /2009 14:36
Le Livre de Cervantès

DON QUICHOTTE  DE LA MANCHE de CERVANTES.

Classiques Garnier
Traduit par Louis VIARDOT.




Fou Don Quichotte ?


Nous le savons tous, Don Quichotte, passionné de lectures lisait du soir au matin et du matin au soir des récits de chevalerie qui lui embrumaient la tête. Parmi ces récits, on retiendra les célèbres Don Olivante  de Laure, Le Jardin des Fleurs le Chevalier de la Croix, Histoire du Chevalier Tirant le Blanc, les Remèdes à la jalousie, le Berger de Philida, Les Larmes d'Angèlique et bien sûr les quatre fameux volumes d'Amadus de Gaule. Il lut des années durant, vendit des terres pour acheter des livres, lut encore puis partit en quête d'aventures et de chevalerie.


Don Quichotte, je l'aime, parce qu'il y croit, parce qu'il est de toute son âme dans tout ce qu'il entreprend, parce qu’il est généreux. Il ne rêve que de réparer toutes sortes de torts faits aux humbles et pour cela, il s'expose  à une multitude de périls et reçoit en retour mille coups. Je l'aime parce que lui même est humble de coeur, naïf comme un enfant, vivant ses rêves, entraînant par fougue son fidèle écuyer Sancho dans mille désastres. J'aime leurs histoires de muletiers, de moulins, de grottes, d'enchanteurs. J'aime leurs démêlés avec le curé et le barbier, définitivement sages. J'aime les étonnants dialogues de Sancho et de sa femme qui disent l'éternel des couples, j'aime les récits dans le récits, la palpitante nouvelle du Curieux Malavisé, de cet homme qui voulait éprouver la fidélité de sa femme. Nous sommes en 1600 et là encore c'est l'éternel de l'amour et de l'amitié qui s'écrit. J'aime les haltes obligées imposées au récits et les nouveaux départs vers des péripéties et des rencontres foisonnantes, hilarantes. Un art du dialogue unique. Et puis, la gloire de Dulcinée, étrange Dulcinée enchantée qui sent l'ail et a l'apparence d'une vulgaire paysanne. Là, où le rêve ne se réalise pas, il y a enchantement,  mais la vérité du rêve, la vérité de la lecture demeurent intactes. Don Quichotte ne cède jamais sur son désir.


J'aime Don Quichotte, Sancho, le barbier, le curé, Cardénio, Dulcinée mais toute ma reconnaissance s'adresse à Cervantès. Il a écrit un livre si passionnant. Il n'a pas écrit une histoire. IL EST une écriture parfaite, splendide, inégalable. Comme un bon enchanteur il a donné vie, bonté humour, fantaisie, tendresse, immortalité à ses personnages.


DON QUICHOTTE, mille pages de bonheur assurées,  si tel n'est pas le cas, c'est que votre exemplaire est enchanté par un méchant enchanteur. Retournez, sans plus attendre, l'échanger chez votre libraire. Très bonne lecture,

publié dans Empan N°39

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