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5 janvier 2010 2 05 /01 /janvier /2010 19:31

 

Un jour encore, je lis, je copie, je découpe. J’intériorise. La lecture est mon chemin. Comme des bornes dans ma vie : les livres. Ceux que je préfère : les livres sur les livres, les livres qui disent l’acte de lire, qui disent des livres le don. Le Don paisible d’aimer, de chercher, d’inventer. Créer et recopier à perte de lettres pour ne plus me perdre dans ma solitude. A perte de passé. Ma solitude est immense mais infiniment plus petite que celle de celui qui ne lit pas. Ma solitude est peuplée de toutes les pensées partagées  que j’ai fait miennes, que j’ai assimilées dans le fil du temps. Je ne suis que ces autres qu’un jour j’ai lus.  Ces autres, mes amis qui me disent que vivre est possible parce que pour eux cela l’a été dans le temps de l’écriture et ce qu’ils ont pu écrire, moi, je peux le lire. Histoire d’une dette contractée, d’un testament légué. par mes ancêtres les auteurs. Ma patrie, les livres. Comme Amos Oz, je suis patriote du langage. Mon étendard est le savoir de tous, mon hymne, le bruissement des ailes de La Colombe de Picasso, mon ciel, les pages de ceux qui un jour ont écrit ma vie.

Je suis une femme qui aime lire. Je suis une femme libre.

L’écriture de « Madame, je veux apprendre à lire » est mon temps retrouvé celui que j’avais perdu dans mes 56 dernières années. J’ai tant vécu... Maintenant, mes livres me prennent par la main, je retrouve mon chemin, j’ordonne mon savoir dans la succession des auteurs et j’espère ainsi, de tout mon coeur pouvoir répondre à votre demande douloureuse « je veux apprendre à lire. » Il y a peu de temps, le 9 avril 2003 dans le temps de deuils douloureux, j’avais écris un texte qui s’appelait / L’opticien de Combray. J’en suis là  du temps retrouvé.


L’opticien de Combray

 

(Notes de lectures . Proust. Le temps retrouvé. Texte établi par Pierre Clarac et André Ferré. Editions 1954. La Pléiade)

 

Il y a huit jours  de cela, le 23 mars 2003, j’ai fait une mauvaise chute dans le jardin des plantes de Montauban. Mes lunettes ont hurlé de douleur avant de se tordre et de voler en éclat. Je suis restée K.O sur le bitume. Mon visage saignait, mon genou souffrait. Je n’avais plus de souffle. Etendue, sage et silencieuse, j’attendais les pompiers. « La durée poignardée » était étale, j’étais au bord du temps, au coeur de mon temps. La profondeur n’était plus, j’étais la profondeur immobile. Immobile et chaude. Le temps glissait sur moi, le sang glissait sur ma joue ahurie.  Dans le temps de l’urgence et de quelques points  s’est écrit une cicatrice. Vous allez bien m’a dit l’infirmière ? Oui, mais je suis triste lui ai-je répondu. Et dans le silence de ma joue recousue, muette à moi-même, j’ai pensé, triste parce que Cathy et Béatrice sont mortes à tout jamais. J’ai pensé aussi, le temps immobile qui saignait tout à l’heure c’était le temps du deuil, le temps du chagrin. Le chagrin laissé par mes deux mortes si tendrement aimées. Le printemps, au jardin des plantes étaient impossible ce jour, alors « j’ai tombé » et j’ai retrouvé mon enfance. A genoux. Dans le sang de l’égratignure,  dans le flot de la blessure. Dans l’immobile, dans la douceur et dans l’attente des secours, dans la confiance dans l’autre, mon prochain qui allait venir et qui est venu vers moi, qui pour moi a remis le temps immobile en mouvement, dans le mouvement de ce jour de printemps. Je suis rentrée chez moi. Un jour, une nuit ont passé, puis quelques heures. J’ai aperçu  « Le temps retrouvé » et j’ai su que ce texte, tant lu et relu m’attendait. Je l’ai ouvert, j’ai lu et dans la première phrase mon regard s’est arrêté sur le mot magique « Combray ». Une caresse, une perle d’encre, une pierre délicieusement précieuse, unique.. Un ciel immense et comme un oiseau passionné, j’ai commencé ma lecture. Cette chute n’avait pas d’autre sens que de me faire retrouver le temps de Combray, le Temps de la métaphore de Marcel Proust, son Temps, le mien, le nôtre. Et de surcroît, sa poésie, son style, sa cathédrale.  Sans mes lunettes, définitivement brisées, avec mon coeur brisé, je commençais ma lecture et le souffle coupé je pénétrais dans ma lecture. Plusieurs jours durant au rythme de six heures par jour, je baignais dans la lumière de Proust. Ma lecture achevée, je décidais de « prendre » des notes que j’intitulerais « L’opticien de Combray » mais avant je suis allée voir mon propre opticien, celui de Montauban pour choisir mes nouvelles lunettes. J’ai choisi deux jolies paires. Une avec une monture très fine, couleur lumière et l’autre, « lunettes de soleil » pour protéger la cicatrice. Il faut toujours protéger une cicatrice laissée par le temps. Laisser le temps au temps, contourner le soleil et baisser les yeux. Sur ma lecture.

 

L’opticien de Combray

P.1033 « Mais pour en revenir à moi-même, je pensais plus modestement à mon livre,  et ce serait même inexact de dire en pensant à ceux qui le liraient, à mes lecteurs. Car ils ne seraient pas, selon moi,  mes lecteurs, mais les propres lecteurs d’eux-mêmes, mon livre n’étant qu’une sorte de ces verres grossissants comme ceux que tendaient à un acheteur l’opticien de Combray ; mon livre, grâce auquel je leur fournirais le moyen de lire en eux-même. »

 

P. 691 : « Les promenades que nous faisions ainsi, c’était bien souvent  celles que je faisais jadis enfant : or comment n’eussé je pas éprouvé bien plus vivement encore que jadis du côté de Guermantes le sentiment que jamais je ne serais capable d’écrire, auquel s’ajoutait celui que mon imagination et ma sensibilité s’étaient affaiblies, quand je vis combien peu j’étais curieux de Combray ? J’étais désolé de voir combien peu je revivais mes années d’autrefois. »

 

p. 692 : « la déflagration du souvenir »

 

P.692 : « Tandis que nous marchions, je voyais le pays changer, il fallait gravir des coteaux, puis des pentes s’abaissaient. Nous causions très agréablement pour moi, avec Gilberte. Non sans difficulté pourtant. En tant d’êtres, il y a différentes couches qui ne sont pas pareilles, le caractère de son père, le caractère de sa mère ; on traverse l’une puis l’autre. Mais le lendemain l’ordre de superposition est renversé. Et finalement on ne sait pas qui départagera les parties, à qui on peut se fier pour la sentence. Gilberte était comme ces pays avec qui on n’ose pas faire d’alliance parce qu’ils changent trop souvent de gouvernement. Mais au fond c’est un tort. La mémoire de l’être le plus successif établit chez lui, une sorte d’identité et fait qu’il ne voudrait pas manquer à des promesses qu’il se rappelle, si même il ne les eût pas contresignées »

Cette phrase me fait penser à celle de Freud comparant l’être humain (ou l’inconscient ?) à un oignons en lamelles avec plusieurs couches.

 

P. 693. Gilberte étonna plusieurs fois, ce jour le narrateur ;

« Et la troisième fois fut quand Gilberte me dit : «  Si vous voulez nous pourrons tout de même sortir un après-midi et nous pourrons alors aller à Guermantes, en prenant par Méséglise, c’est la plus jolie façon », phrase qui en bouleversant toutes  les idées de mon enfance m’apprit que les deux côtés n’étaient pas aussi inconciliables que je l’avais cru. Mais ce qui me frappa le plus, ce fut combien peu, pendant ce séjour, je revécus mes années d’autrefois, désirai peu revoir Combray, trouvai mince et laide la Vivonne. Mais quand elle vérifia pour moi des imaginations que j’avais eues du côté de Méséglise, ce fut pendant une de ces promenades en somme nocturnes bien qu’elles eussent lieu avant le dîner –mais elle dînait si tard ! Au moment de descendre dans le mystère d’un vallée  parfaite et profonde que tapissait le clair de lune, nous nous arrêtâmes un instant, comme deux insectes qui vont s’enfoncer au coeur d’un calice bleuâtre. »

 

Cette phrase, par sa magie, dirige mes pas vers ma bibliothèque. Je saisis le tome I de La Recherche et le pose sur ma table de chevet. Le temps de sa relecture est venue. Quelle joie précieuse ! Quelle chance d’aimer lire et d’aimer lire Marcel Proust. Je suis une femme privilégiée. La première fois que j’ai lu Proust, j’avais 19 ans. C’était l’année de mon baccalauréat. Mon professeur de français, une femme très poétique  me l’a fait découvrir.  Elle l’aimait et nous le lisait à voix haute. Nous l’écoutions captivées par sa voix douce. Elle nous le faisait commenter. Elle a lu à voix haute l’un de mes commentaires. J’étais fière. Je dois à Proust des minutes de fierté . A la fin de l’année scolaire, j’emmenais dans ma valise de vacances (en Angleterre) mes trois tomes de la Recherche. J’ai oublié les circonstances de leur achat. Quelque chose d’étonnant  étant donné les revenus modestes de maman.  Sur quel budget l’avait-elle pris ?. C’est mon amie Rosette qui m’avait offert le tome II. J’emmenais les trois tomes chez mes amis anglais et je les ai lus passionnément tous les trois. J’étais saisie par un velours de mots qui se déployait dans ma lumière de jeune fille en fleur. J’étais heureuse. Vint l’automne et la deuxième session du baccalauréat . Vint le jour de l’épreuve de français. Un des trois sujets au choix fut un commentaire de Proust. J’étincelais ! J’eus 17 et mon misérable bacc jalonné de 8, de 6, de 4 fut sauvé grâce à Proust et à la loi des coefficients. Je pus ainsi aller à l’université, changer de ville, rencontrer l’homme de ma vie, ma meilleure amie aussi. A Proust, je dois tout. C’est le pilier principal de ma cathédrale.

 

P.694 « Et tout d’un coup, je me dis que la vraie Gilberte, la vraie Albertine, c’étaient peut-être celles qui s’étaient au premier instant livrées dans leur regard, l’une devant la haie d’épines roses, l’autre sur la plage. Et c’était moi qui, n’ayant pas su le comprendre, ne l’ayant repris que plus tard dans ma mémoire, après un intervalle où par mes conversations tout un entre-deux de sentiment leur avait fait craindre d’être aussi franches que dans la première minute, avais tout gâté par ma maladresse. Je les avais « ratées » plus complètement –bien qu’à vrai dire l’échec relatif avec elles fut moins absurde- pour les mêmes raisons que Saint –Loup Rachel. »

 

J’aime cette idée de « rater quelqu’un » dès le premier regard. C’est le contraire du coup de foudre. Le malentendu s’installe dès le premier regard et se perpétue de rencontre en rencontre. On répète « le ratage ». J’ai connu cela plusieurs fois dans ma vie. Sensation de rater l’autre mais aussi d’être méconnue par l’autre. Quand le malentendu se tait et qu’on entend que lui.

 

P.718  Le géomètre :

« Il y avait  en moi un  personnage qui savait plus ou moins regarder, mais c’était un personnage intermittent, ne reprenant vie que quand se manifestait quelque essence générale, commune à plusieurs choses, qui faisait sa nourriture et sa joie. Alors, le personnage regardait et écoutait, mais à une certaine profondeur seulement, de sorte que l’observation n’en profitait pas. Comme un géomètre qui, dépouillant les choses de leurs qualités sensibles, ne voit que leur substratum linéaire, ce que racontaient les gens m’échappait, car ce qui m’intéressait, c’était non ce qu’ils voulaient dire mais, mais la manière dont ils le disaient, en tant qu’elle était révélatrice de leur caractère ou de leurs ridicules ; ou plutôt c’était un objet qui avait toujours été plus particulièrement le but de a recherche parce qu’il me donnait un plaisir spécifique, le point qui était commun à un être et à un autre.  Ce n’était que quand je l’apercevais que mon esprit jusque là sommeillant, m^me devant l’activité apparente de ma conversation, dont l’animation masquait pour les autres un total engourdissement spirituel- se mettait tout à coup joyeusement en chasse, mais ce qu’il poursuivait alors par exemple l’identité du salon Verdurin dans divers lieux et divers temps- était situé à mi-profondeur, au-delà de l’apparence elle-m^me, dans une zone plus en retrait. Aussi le charme apparent, copiable, des êtres m’échappait parce que je n’avais pas la faculté de m’arrêter à lui, comme un chirurgien qui, sous le poli d’un ventre de femme, verrait le mal interne qui le ronge. J’avais beau dîner en ville, je ne voyais pas les convives, parce que, quand je croyais les regarder, je les radiographiais. »

 

P.898 «  ... , tandis que les vrais livres doivent-être les enfants non du grand jour et de la causerie mais de l’obscurité et du silence. Et comme l’art recompose exactement la vie, autour des vérités qu’on a atteintes en soi-même flottera toujours une atmosphère de poésie, la douceur d’un mystère qui n’est que le vestige de la pénombre que nous avons dû traverser, l’indication marquée exactement par un altimètre, de la profondeur d’une oeuvre. »

 

P.898 « Quand aux vérités que l’intelligence –même des plus hauts esprits cueillent à claire-voie, devant elle, en pleine lumière, leur valeur peut-être très grande ; mais elles ont des contours plus secs et sont planes, n’ont pas de profondeur parce qu’il n’y a pas eu de profondeur à franchir pour les atteindre, parce qu’elles n’ont pas été recréées. Souvent des écrivains au fond de qui n’apparaissent plus ces vérités mystérieuses n’écrivent plus à partir d’un certain âge qu’avec leur intelligence, qui a pris de plus en plus de force ; les livres de leur âge mûr ont, à cause de cela, plus de force que ceux de leur jeunesse, mais ils n’ont plus le même velours. »

 

P.898 et 899 « Je sentais pourtant que ces vérités que l’intelligence dégage directement de la réalité ne sont pas à dédaigner entièrement, car elles pourraient enchâsser d’une matière moins pure, mais encore pénétrée d’esprit, ces impressions que nous apporte hors du temps l’essence commune aux sensations du passé et du présent, mais qui plus précieuses, sont aussi trop rares pour que l’oeuvre d’art puisse être composée seulement avec elles. Capables d’être utilisées pour cela, je sentais se presser en moi une foule de vérités relatives aux passions, au caractères, aux moeurs. Leur perception me causait de la joie ; pourtant il semblait me rappeler que plus d’une d’entre elles, je l’avais découverte dans la souffrance, d’autres dans bien médiocres plaisirs. Alors moins éclatantes sans doute que celle qui m’avait fait apercevoir que l’oeuvre d’art était le seul moyen de retrouver le Temps perdu, une nouvelle lumière se fit en moi. Et je compris que tous  ces matériaux de l’oeuvre littéraire, c’était ma vie passée ; je compris qu’ils étaient venus à moi, dans les plaisirs frivoles, dans la paresse, dans la tendresse, dans la douleur, emmagasinés par moi, sans que je devinasse plus leur destination leur survivance même, que la graine mettant en réserve tous les aliments qui nourriront la plante. Comme la graine, je pourrais mourir quand la plante pourrait se développée, et je me trouvais avoir vécu pour elle sans le savoir, sans que ma vie me parût devoir jamais entrer en contact avec ces livres que j’aurait voulu écrire et pour lesquels, quand je me mettais autrefois à ma table, je ne trouvais pas de sujet. Ainsi toute ma vie jusqu à ce jour aurait pu et n’aurait pas pu être résumée sous ce titre : une vocation.  Elle ne l’aurait pas pu en ce sens que la littérature n’avait joué aucun rôle dans ma vie. Elle l’aurait pu en ce que cette vie, les souvenirs de ces tristesses, de ses joies formaient une réserve pareille à cette albumen qui est logé dans l’ovule des plantes et dans lequel celui-ci puise sa nourriture pour se transformer en graine, en ce temps où on ignore encore que l’embryon d’une plante se développe, lequel est pourtant le lieu de phénomènes chimiques et respiratoires secrets mais très actifs. Ainsi ma vie était-elle en rapport avec ce qui m’amènerait  sa maturation.

En cette matière, les mêmes comparaisons, qui sont fausses si on part d’elles, peuvent êtres vrais si on y aboutit. Le littérateur envie le peintre, il aimerait prendre des croquis, des notes, il est perdu s’il le fait. mais quand il écrit, il n’est pas un geste de ses personnages, un tic, un accent, qui n’ait été apporté à son inspiration par sa mémoire ; il n’est pas un nom de personnages vus, dont l’un a posé pour la grimace, l’autre pour le monocle, tel pour la colère, tel pour le mouvement avantageux du bras, etc. Et alors l’écrivain se rend compte que si son rêve d’être un peintre n’était pas réalisable d’une manière consciente et volontaire, il se trouve pourtant avoir été réalisé et que l’écrivain lui aussi, a fait son carnet de croquis sans le savoir. Car,  mû par l’instinct qui était en lui, l’écrivain, bien avant qu’il crût le devenir un jour, omettait régulièrement de regarder tant de choses que les autres remarquent, ce qui le faisait accuser, par les autres de distraction, et par lui-même de ne savoir ni écouter ni voir, mais pendant ce temps là il dictait à ses yeux et à ses oreilles de retenir à jamais ce qui semblait aux autres des riens puérils, l’accent avec lequel avait été dite une phrase, et l’air de figure et le mouvement d’épaules qu’avait fait à un certain moment telle personne dont il ne sait peut-être rien d’autre, il y a de cela bien des années, et cela parce que cet accent, il l’avait déjà entendu, ou sentait qu’il pourrait le réentendre, que c’était quelque chose de renouvelable, de durable ; c’est le sentiment du général qui, dans l’écrivain futur choisit lui-même ce qui est général et pourra entrer dans l’oeuvre d’art »

 

P.902 : « Et quand nous cherchons à extraire la généralité de notre chagrin, à en écrire nous sommes un peu consolés peut-être par une autre raison encore que toutes celles que je donne ici, et qui est que  penser d’une façon générale, qu’écrire, est pour l’écrivain une fonction saine et nécessaire dont l’accomplissement rend heureux, comme pour les hommes physiques l’exercice, la sueur, le bain. »

 

P.903 : « ; un livre est un grand cimetière où sur la plupart des tombes on ne peut plus lire les noms effacés. »

 

P. 909 :  « Les années heureuses sont les années perdues, on attend une souffrance pour travailler. »

Mais quand la souffrance, elle nous enferme comme dans une forteresse entourée de remparts.  Dans un autre passage Proust parle du chagrin qui fait créer. Cette idée lui est chère. Je ne sais pas...

(Maintenant je sais...)

P.946 : « la géologie d’un visage. »

Puis il parle du Temps, de l’âge, de la place que nous occupons dans le temps (P. 1046). C’est beau !   

Quand retrouverai-je le Temps ?  Le Temps d’écrire mon Temps ?

 

Et si mon blog était la longue histoire de mon temps ? Le temps de mes livres ?

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1 janvier 2010 5 01 /01 /janvier /2010 15:53


Centre Georges Pompidou

Exposition Soulages

14 octobre 2009-8 mars 2010


« Le Centre Pompidou célèbre l’œuvre de Pierre Soulages, « Peintre du noir et de la lumière », l’artiste le plus connu de la scène française actuelle et l’une des  figures majeures de l’abstraction depuis la Seconde Guerre mondiale » (extrait du catalogue)


Le premier jour je me suis laissée éclaboussée par la splendeur des tableaux

Le second jour, j’ai recopié pour vous les textes muraux écrits par Pierre Soulages tant je les ai trouvés beaux

Puis j’ai plongé dans le noir et j’ai écrit ma lumière.


Je vous propose le plan suivant :


I. La vie de Pierre de Pierre Soulages
II. Les textes muraux : les textes théoriques


III. Son noir dans ma lumière



I. La vie de Pierre Soulages


J’ai recopié les tableaux muraux qui encadrent l’exposition dans son début et dans sa fin


1919- 1940


Pierre Soulages naît le 24 décembre 1919 à Rodez (Aveyron). A  partir de 1934, il peint régulièrement. Après avoir obtenu son baccalauréat il quitte Rodez et s’installe à Paris en septembre 1938. Il s’inscrit à l’atelier de René Jaudon. Il visite le musée du Louvre, l’Orangerie, le Petit Palais et les « Expositions Picasso » et « Cézanne » Bien qu’admis à l’Ecole nationale des Beaux-arts (Paris), il regagne Rodez. Mobilisé en juin 1940, il est envoyé à Bordeaux puis à Nyons (Drôme) après l’armistice.


1941-1945


Démobilisé début 1941, il s’inscrit à l’école des beaux-arts de Montpellier où il rencontre Colette Llaurens, qu’il épouse en octobre 1942. Ensemble, ils visitent le Musée Fabre. Réfractaire au STO, il se procure de faux-papiers et devient régisseur dans un vignoble près de  Montpellier, où il rencontre l’écrivain Joseph Deltheil, son voisin auquel il montre ses peintures. A nouveau mobilisé en juin 1944, il est démobilisé fin 1944.


1946-1953.


Le couple s’installe à Courbevoie en 1946. En 1947, Soulage expose au salon des sur indépendants et se lie d’amitiés avec Hans Hartung et Francis Picabia. Il emménage à Paris dans la rue Schoelcher. En 1949, première exposition personnelle à la galerie  Lydia Conti. Parallèlement, il conçoit les décors d’Héloïse et Abélard pour Roger Vailland.


A partir de 1950, il systématise les titres de ses toiles :

« Peintures dimensions, date complète ». En 1951, il réalise ses premières eaux fortes à l’atelier de Roger Lacourière. En 1952, il présente quatre toiles à la Biennale de Venise et crée des décors pour la « Puissance et la Gloire » de Graham Green (jamais présentés en raison du décès de Louis Jouvet).


1954-1966


Le marchand Samuel Kootz, qui organise avec succès sa première exposition personnelle à New-York en 1954, devient son représentant américain (Il lui consacre Huit expositions en 1966). En 1956, Soulages s’ouvre à une exposition personnelle à la Galerie de France (qui sera suivie de nombreuses autres jusqu’en 1992) et, en 1957, il installe son atelier rue Galande.


La même année, il se rend à New-York et rencontre de nombreux artistes américains (notamment Mark Rothko, Willem de Kooning, Robert Mother Well et Franz Kline). Il reçoit le prix de la Biennale de Tokyo en 1957. Les rétrospectives se multiplient : à Hanovre en 1960 (itinérance en Allemagne, aux Pays-Bas et en Suisse), Copenhague en 1963 et à Houston en 1966.ne peinture


1967-1978


En 1967, le Musée national d’Art Moderne (Mnam) est le premier musée français à organiser une exposition « Soulages ». En 1968, le peintre se rend à

New-York, puis à Washington pour ses expositions. Il écrit un texte  théorique important pour la rétrospective de Matisse en 1970 à Copenhague. En 1974, il s’installe dans un nouvel atelier dans le quartier Maubert (Paris 5è).

Fin 1974, une grande exposition lui est consacrée à Dakar (itinérance à Lisbonne, Madrid, Montpellier, puis en Amérique Latine. A partir de cuivre de gravures, il réalise trois bronzes (1975-1977) qui sont exposées en 1977 à la galerie de France.


1979-1993


Début d’« une peinture autre » qu’il appellera « Outre noir ».

Au centre Pompidou, il reprend le principe d’accrochage des toiles dans l’espace (inauguré à Houston en 1966), lors de l’exposition de ses peintures récentes en 1979.


L’état danois en 1987, il reçoit la commande publique des vitraux pour l’abbatiale Santes-Foy de Conques.


1994-2009

 


En 1994, après l’inauguration des vitraux de Conques, une exposition de maquettes est organisée à Münster.


Rétrospective en Asie (Séoul, Pékin et Taipei, 1993-1994), au Musée d’Art Moderne de la ville de Paris (1996, itinérance à Montréal et Sao Paulo, à Hambourg (1997) etc.


En 2001, Pierre Soulages est le premier peintre vivant auquel le musée de l’Ermitage à Saint Petersburg consacre une exposition (itinérance à Moscou).

En 2005, Pierre et Colette Soulages font une donation à l’intention du futur musée Soulages à Rodez et une autre au Musée Fabre à Montpellier. Inauguration en 2007 des salles permanentes consacrées au Musée Fabre.

 

II.Textes muraux : textes théoriques :

 

Les citation ci-dessous sont toutes de Pierres Soulages. Je les ai recopiées avec fidélité.


C’est ce que je fais qui m’apprend ce que je cherche (1953)


Ce qui importe au 1er chef, c’est la réalité de la toile peinte : la couleur, la forme, la matière, d’où naissent la lumière et le rêve qu’elle porte.


Un jour je peignais, le noir avait envahi toute la surface de la toile. Dans cet extrême, j’ai vu en quelque sorte la négation du noir, les différences, les textures, réfléchissant plus ou moins faiblement la lumière, du sombre émanait la clarté, une lumière picturale dont le pouvoir émotionnel particulier animait mon désir de peindre – j’aime que cette couleur violente incite à  l’intériorisation - Mon instrument n’était plus le noir, d‘autant plus intense dans ses effets qu’elle émane de la plus grande absence de lumière. Je me suis engagé dans cette voie. J’y trouve toujours des ouvertures nouvelles (2005)


Ces peintures ont parfois été appelées noir-lumière. Pour ne pas les limiter à un phénomène optique, j’ai inventé le mot « Outre noir », au-delà du noir une lumière transmutée par le noir et comme outre Rhin, outre Manche, un autre champ mental que celui du simple noir (2005)


J’aime l’autorité du noir, sa gravité, son évidence, sa radicalité, son puissant pouvoir de contraste, dans une présence intense à toutes les couleurs et lorsqu’il illumine les plus obscures, il leur confère une grandeur sombre. Le noir a des possibilités insoupçonnées et attentives à ce que j’ignore, je vais à sa rencontre.(2005)


La réalité d’une œuvre, c’est le triple rapport qui s’établit entre la chose, qu’elle est, le peintre qui la produite, et celui qui la regarde. (1976)


La lumière venant de la toile vers le regardeur crée un espace devant la toile et le regardeur se trouve dans cet espace : il y a instantanéité de la vision pour chaque point de vue, si on change il y a dissolution de la première vision, effacement, apparition d’une autre ; la toile est présente dans l’instant où elle est vue, elle n’est pas à distance dans le temps. (1996)


Le polyptique a été moyen pour moi d’introduire une rupture dans la continuité d’une surface – comme,  dès 1947, grouper des traces interrompues en une forme se livrant d’un coup, c’était rompre avec tout ce qu’impliquait la continuité d’une ligne, trace et vestige d’un mouvement. C’était le choix d’une simultanéité à l’opposé d’une continuité.

Décisions qui induisent un rapport au temps et au sens fondamentalement différents. (1992


La lumière venant de la toile vers le regardeur se trouve dans cet espace : il y a instantanéité de la vision pour chaque point de vue, si on change il y a dissolution de la première vision, effacement. (1996)


Pourquoi le noir ? La seule réponse incluant les raisons ignorées, tapies au plus obscur de nous-mêmes et des pouvoirs de la peinture c’est PARCE QUE.


Une phrase volée au film projeté révélant l’homme et l’artiste Pierre Soulages, humain et génial, tendre et plein d’humour. J’ai aimé cette projection de presque une heure. Un cadeau. J’ai donc volé cette phrase :


« La présence de la toile est liée à l’instant même. C’est un rapport au temps. »

Je l’ai volé parce qu’il me semble qu’il est possible de remplacer cette phrase  « La toile » par « Le livre » ( A méditer au seuil de 2010)


III. Son noir dans ma lumière


« Je crois que je fais de la peinture pour que celui qui la regarde – moi comme n’importe quel autre- puisse se trouver, face à elle, seul avec lui-même » (Pierre Soulages.2007)


J’arpente les salles, solitaire et muette, mon regard inventant les toiles par ses courbes ouvertes à mon âme, par ses traits zébrés qui de mes jours font jaillir le marron et le beige, poutre superposées et tout ce qui s’empile là de secret et d’intime. Une pointe de bleu, une pointe de rage dans un monde qui ne veut plus les couleurs. Les siennes ou les miennes, je ne sais. Mais je vous les confie. Prenez en soin. Elles sont de valeur. La valeur de mes peurs.


Silence. Noir et lumière. Mes pas s’en vont, reviennent. Mon regard éreinté de noir admire ce toujours dans les espaces reliés, brisés, continus ou discontinus. De la pure brisure. Je me consume. Je suis seule. Je me reflète dans son noir qui vient se jeter dans  ma lumière.


J’accepte.

J’accepte le contraste.

J’accepte ma fatigue.

J’accepte ma détresse.

J’accepte ma solitude.

J’accepte mon Waterloo.

J’accepte ma cassure.

J’accepte mes brisures.

J’accepte le temps qui passe.

J’accepte son noir.

J’accepte mes soirs

Ceux qui disent mon silence

Et au monde mon absence

J’accepte la vieillesse qui me surprend

J’accepte tout ce qui m’attend

J’accepte l’impossible


Parce que du noir je sais le possible recommencement, la strie, le nid de lumière qui soudain, comme ça, peut advenir.


Je suis une plaque de lumière qui tourne qui tourne  sur laquelle le noir peut se refléter, se perdre, se jeter. Close au monde, je m’imprègne. Ouverte, je m’envole, je m’échappe. Dans ses lignes, je me replie, me plie et me déplie. Dans son mur noir, je me creuse et m’enfonce, me niche et m’abrite, me cache, me terre. Seule, je me trouve et me retrouve dans un monde de volupté, un monde superposé, étincelant de ses rayons de lumière. Les miens ou les siens. Qu’importe ! L’essentiel est de créer, de creuser, d’inventer, d’exister, de donner, de recevoir, d’aimer, de perdre, de gagner, de marcher, de continuer, dans le noir et le blanc, dans le contraste impossible pour cause d’absurde discontinu. Ici peinture. Ici silence. Là, près de moi les regardeurs marchent, glissent, commentent. Etrange étrangeté des autres qui d’un même noir perçoivent des lumières si différentes que les miennes. Noirs multiples, lumières multiples. Le monde  de Soulages s’avance silencieux et créatif, si plein d’espoir. Son noir rime avec mon espoir. Quand l’impossible recueilli par le génie s’accroche sur les murs, quand mon cœur l’accroche dans mon corps. Talent du peintre. Talent du regardeur. Et le temps qui avance rythmant la cadence du silence qui balance. J’avance, je décline cette profondeur obscure, cette profondeur qui dit mes années, marque mes intervalles, barre le machinal de l’impitoyable carnaval du monde qui tourne, celui qui me détourne de mes détours, de mes tours. Argile impossible, maladresse de mes mains qui dans l’obscurité se perdent. Exister. Je regarde le noir. J’en reste émue, étonnée ; ça jaillit de partout, ça m’éclabousse. Je suis hypnotisée. Je reviens sur mes pas. Je regarde encore. Noir. Brou de noir et fusain. Qui suis-je ? Fatigue d’une fin d’année. Espoir d’un peut-être dans ce trait blanc qui vient rayer le noir. Noir du matin chagrin. Noir du soir espoir. Araignée de l’âme. Je suis là. Femme. Mon évidence se bouscule dans mes pauvres opuscules. Ceux du savoir. Ai-je jamais su ce que signifiait le mot noir ?

Celui du devoir, celui qui chaque jour dit non à la gloire. Jour glorieux. Pieux à la main ils avancent, les regardeurs, déchirant le blanc, déchirant le noir, inventant l’espoir. Les stries changent le tout et les parcelles de son noir me morcellent. Je ne suis que minuscule fourmi en  miettes mais par ses verticales je me retrouve intacte et à mon destin je me cale, impétueuse, heureuse. Par son noir, je me laisse ensevelir. Par ces trouées blanches inattendues je me laisse embellir. Par l’inaccessible de son talent je triomphe dans l’arc de mes jours et dans le puits de ma nuit je puise à son génie. Jamais ce n’est fini ; à l’infini devant ces toiles, je soliloque, j’agite mes breloques et je ris, je ris à n’en plus finir devant l’humour du noir, devant la timidité du blanc, je ris, je ris de tant de lumière, de tant de savoir qui épèle ma lumière. L’éclairage pour tout bagage, j’avance femme, frêle, émerveillée. Par la magie du noir, je sais qu’il fait jour, que le temps peut enfin advenir, loin du pire et des tristes sires, ceux du conventionnel qui du bien pensant, du bien sachant nous inondent de mort, sûrs qu’ils sont de n’avoir jamais tort. J’avance, je me retrouve à la toile suivante, béante de moi-même et de mon triste désir mortifère de ne savoir de moi-même que faire, croyant dur comme fer que' être est impossible. J’avance,  du noir jaillit l’espoir du bleu ou du marron, voire même du blanc et ma vie recommence à zéro. Le noir ouvre sur l’incandescence de chaque jour malgré l’indécence des nuits obscures et silencieuses. Je fais miennes ses peintures dans mon dépouillement de « regardeuse ». Combien j’aime ce mot, regardeuse de vie, regardeuse de lui, regardeuse de toi. En silence, je me déploie et je tournoie sur la toile noire. Je médite, sa peinture m’enveloppe, me tient chaud, me captive, m’hypnotise par sa magnificence. Mon regard piégé, enivré, circule, d’une toile à l’autre, sans médiation aucune. Ivre de son noir, je traverse la beauté d’une lumière sans concession. Absolue. Le noir m’enroule comme la vague quand elle se fait légende des siècles. Je reçois l’écume du temps et j’attends. Le noir n’en finit pas de se dérober à mon regard, le noir jaillit, me caresse, jamais ne me blesse. Il n’est que fougue, éclat de rire, complexité aussi. Je sais sa complexité à fleur du temps, à fleur de moi dans un collier d’instants dont les perles sont souveraines, souterraines. Pluie de lumière qui dure, perdure, épure. C’est sûr! J’invente les titres absents, je retrouve les dates, étonnée, je mesure les toiles. Mon regard s’écrase sur ce noir qui capte ma lumière quand elle interrompt contre toute attente l’espace. Dans la prouesse de mon regard j’accouche de son noir et de ses cassures, de ses cascades de filaments d’argent, j’accouche de mon savoir d’ivoire, j’accouche de mon impossible, j’accouche de mon désir de lumière et d’étoiles, j’accouche de mes couleurs, de mes formes et de mon rire. J’ai retrouvé mon élan et ma fermeté. J’ai retrouvé ma permanence, mon dynamisme, ma puissance. Je me suis régénérée. Je suis présente au monde dans un Chant du cygne noir, dans la caresse du UN. Femme du noir, libellule de la nuit, j'existe, regardeuse  triomphante. Je suis absoute.


Devant moi, en moi, dans le talent de Pierre Soulages le Magnifique, l’an 2010 ouvre ses pétales de lumière. J’applaudis.


Bravo ! Bravo ! Bravo !


Bonne année à vous tous mes lecteurs !!!


MJC




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23 novembre 2009 1 23 /11 /novembre /2009 19:41

Les souvenirs, ce sont les chambres sans serrures,
Des chambres vides où l'on n'ose plus entrer,
Parce que de vieux parents jadis y moururent.
On vit dans la maison où sont ces chambres closes.
On sait qu'elles sont là comme à leur habitude,
Et c'est la chambre bleue, et c'est la chambre rose...
La maison se remplit ainsi de solitude,
Et l'on y continue à vivre en souriant...

J’acccueille quand il veut le souvenir qui passe

Je lui dis « Mets-toi là, je reviendrais te voir... »

Ils sont ainsi beaucoup dans la vieille demeure.

Ils se sont résignés à ce qu’on les oublie

Et si je ne vois pas ce soir ni tout à l’heure,

Ne demandez pas à mon coeur plus qu’à la vie...

Je sais qu’ils dorment là derrière les cloisons,

Je n’ai plus besoin d’aller les reconnaître ;

De la route, je vois leurs petites fenêtres,

Et ce sera jusqu’à ce que nous en mourions.

Pourtant je sens parfois, aux ombres quotidiennes

Je ne sais quelle angoisse froide, quel frisson,

Et ne comprenant pas d’où ces douleurs proviennent, je passe...

                  Or chaque fois, c’est un deuil qui se fait

Un trouble est en secret venu nous avertir

Qu’un souvenir est mort ou qu’il s’en est déjà allé...

On ne distingue pas très bien quel souvenir

Parce qu’on est si vieux, on ne se souvient guère...


Pourtant, je sens en moi se fermer des paupières

                                               (La Chambre blanche)

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21 novembre 2009 6 21 /11 /novembre /2009 21:27

Cet article fait suite aux articles : Bibliothèque identitaire (1,2,3)


Je retrouve avec joie mes poètes. Enfin !!!


Anthologie des poètes français contemporains en 5 tomes (trouvés chez un bouquiniste, Georges Séféris, Léopold Sédar Sengor, Aragon ; Stéphane Mallarmé, Paul Verlaine Omar Khayam, Andrée Chédid, EmiLY Jane Brontë, François Villon, Victor Hugo, André Breton, Jacques Prévert

Joachim Du Bellay, Rainer Maria Rilke, Emily Dickinson

 

 


Dis moi, dis, souriante enfant

 

Dis-moi, dis, souriante enfant,

Qu’est-ce, pour toi que le passé ?

« Un soir d’automne, doux et clément,

où le vent soupire, endeuillé. »

 

Qu’est-ce, pour toi, que le présent ?

« un rameau vert chargé de fleurs

Où l’oiselet bande ses forces

pour s’envoler dans les hauteurs »

 

Et l’avenir, enfant bénie ?

« La mer sous un soleil sans voiles,

La mer éblouissante

Qui, là-bas, rejoint l’infini »

Juillet 1836

 

Emily Jane Brontë

 Poèmes Poésie / Gallimard

P.25

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9 novembre 2009 1 09 /11 /novembre /2009 17:25

 


Cet article est la suite de ceux du 10 et 11 octobre 2009 : bibliothèque identitaire.(1) et (2) (catégorie Mon noyau de nuit et de lumière)


Et donc dans le temps de deux nouveaux cartons, j’ai posé sur d’autres étagères, dans le désordre :


Freud, L’Interprétation des rêves, Camus, La Peste, Les Justes, Claude Lévi-Strauss, Tristes tropiques, Paul Auster, Trilogie new-Yorkaise, Le voyage d’Anna Blume, L’Invention de la solitude La Musique du Hasard, Moon Palace, Yvette Roudy, à cause d’elles, Anaïs Nin, Les Cités intérieures, Un Hiver d’artifice, Georges Perec, l’Infra ordinaire, Freud et l’inconscient (Marie-Jean Sauret), Christine Orban, Petites phrases pour traverser la vie en cas de tempêtes et par beau temps aussi, Eva Thomas, Le Sang des mots, Elisabeth Gilles, Un paysage de cendres, Elie Wiesel, La Nuit, Myriam Anissimov, Primo Lévi ou la tragédie d’un optimiste, George Semprun, Quel beau dimanche !, Melville, Moby Dick (I et II), Georges Perros, Papiers collés, Samuel Beckett, Molloy,

Les cahiers de L’Herne, Samuel Becket, Italo Calvino, Les Villes invisibles, Le Baron Perché, Canetti, Journal (1,2,3), Balzac, La peau de chagrin, le père Goriot, Eugénie Grandet, Maupassant (collection Bouquins 1,2), Michel Del Castillo, La Guitare, La Nuit du Décret, Henry Bauchau, L’enfant Bleu, Victor Hugo, L’homme qui rit, Henry Miller, Plexus, Sexus, Nexus, Paul Muzard, En finir avec la guerre contre les pauvres, Baudelaire, Les fleurs du Mal, Clément Harari, Max Biro, La Jeunesse de Calmoun, Léon Cladel, Emotions Autobiographiques,  Jean-Paul Damaggio,L’abbé Marcellin, Une vie de courage, 20 ans de lutte contre Front national, Où est le crime, Vasquez Montalban, Derniers instants, Flora Tristan, derniers instants, J’ai eu 15 ans en Tarn-et-Garonne (2008-1808), Marie-France Durand et Jean-Paul Damaggio, Laïcité sans œillères,Léon Dunara, Voyage Montalbanien, Blabla Perroquet, Antonella Bolliger-Savelli, Jean-Christophe Attias, Petite Histoire du Judaïsme,

Marcel Jacob, Les clefs du Jardin, Les cahiers d’Accès, Yvonne Knibiehler et

Catherine Fouquet, L’histoire des mères du Moyen-âge à nos jours, deux jolis livres de bouquinistes au charme désuet, Paul Cervière, Un cœur vaillant, André Talmont présente (et expurge !) Les Milles et une nuit, Un beau livre d’art sur Brassaï


Mince ! J’ai oublié mon Don Quichotte !


Laisser mes livres derrière moi constitue un déchirement… Je ferai un don de tous ceux là que j’ai dû abandonner sur les étagères de ma bibliothèque en chêne clair. Cela me consolera.


J’avance maintenant dans la douceur de l’automne, qui déjà annonce par sa froidure l’hiver, vers une vie nouvelle où d’autres livres m’attendent. Basta ! MJC





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30 octobre 2009 5 30 /10 /octobre /2009 21:01
La gentillesse

 

La gentillesse me paraît être une qualité essentielle de l’humain. Depuis, toute petite, affectueuse, j’ai toujours eu le désir « d’être gentille », « sincèrement gentille. ». Ainsi, tout naturellement un jour d’oisiveté, j’ai choisi ce joli petit livre cadeau dont la couverture est ornée d’un délicat petit bouquet fleuri et dont la bordure est dorée ; ça fait très anglais et j’aime ce qui fait anglais. Ce petit livre, trône maintenant bien en évidence sur une jolie cheminée boisée entre les deux livres de Laure Adler et Stefan Bollmann « Les femmes qui écrivent vivent dangereusement »  et « Les femmes qui lisent sont dangereuses au pied  d’un immense livre d’art sur Vermeer (Gilles Allud, Albert Blankert, John Michael Montias).

 

Mon adorable petit livre qui tient dans la paume de la main, un petit livre, comme une  miniature ensoleillée est

 

La gentillesse.

Un livre-cadeau Helen Exley

Editions Exley 1977, 2000.

 

Il est constitué de gentilles citations sur la gentillesse et de jolis tableaux fleuris comme si les gentillesses étaient des bouquets de fleurs pour l’âme, parfois en chagrin.

Pour, vous, je vais recopier quelques citations d’auteurs tombés dans le domaine public mais je vous invite vivement à vous procurer ce petit livre de nacre et d’or et de découvrir toutes les citations ; elles sont si aimantes !

 

Jean-Jacques Rousseau (1712-1778)

« Je sens que faire le bien, est le plus vrai bonheur que cœur humain puisse goûter. »

 

Esope :

« Aucun acte de gentillesse, même petit n’est jamais perdu »

 

Ménandre (V.342-292 av.JC)

« Secours les pauvres, fais le plus d’heureux que tu pourras ; car cela seul est impérissable, et si jamais tu subis des revers, c’est de là que viendra le salut ; mieux vaut un bon ami qu’un trésor que tu laisseras moisir dans quelque trou. »

 

Diderot, (1713-1784)

« L’homme le plus heureux est celui qui fait le bonheur d’un plus grand nombre d’autres. »

(Oui, mais comme c’est difficile ! Il y a parfois incompatibilité du bonheur des uns et des autres..)

 

Mohammed (V570-632)

« La véritable richesse d’une personne c’est le bien qu’elle fait dans le monde »

 

George Sand (Aurore Dupin, Baronne Dudevant. 1804-1876)

« Gardez bien en vous ce trésor de gentillesse. Sachez donner sans retenue, perdre sans regret, acquérir sans mesquinerie. »

 

Sénèque (4 avJ-C-65)

Nous devrions donner comme nous recevons, avec enthousiasme et promptitude sans hésiter ; car il n’y a aucune grâce dans un don qui vous colle aux doigts »

 

Le Talmud

« Quand une personne fait une bonne action, alors que rien ne l’y obligeait, Dieu s’épanche sourit et dit : Rien que pour ce moment-là, cela valait la peine de créer le monde. »

( c'est un peu ambitieux comme programme mais j’aime bien !)

 

Proverbe suédois

« Lorsqu’un aveugle soutient un éclopé, les deux vont de l’avant »

 

Ralph Waldo Emerson (1803-1882)

« Un des plus beaux cadeaux de la vie, c’est que personne ne puisse sincèrement tenter d’en aider un autre sans s’aider soi-même. »

 

Bouddha (v 56-v, 48av.J.C)

« L’océan, roi des montagnes et les vastes continents ne sont pas des fardeaux bien lourds à porter comparés à celui de ne point rendre au monde sa bonté »

 

Emily Dickinson (1830-1886)

« Si je peux empêcher un cœur

de se briser,

  Je ne vivrai pas en vain.

  Si je peux soulager une vie

de sa souffrance,

  Apaiser la peine

  Ou aider un rouge-gorge affaibli

         à rejoindre son nid,

  Je ne vivrai pas en vain. »

 

 

Proverbe chinois

« Un mot gentil peut réchauffer trois mois d’hiver. »

 

Caton (4ème siècle)

« De plus grand réconfort de ma vieillesse, et qui m’apporte la plus grande satisfaction, c’est le souvenir agréable de tous les bienfaits et services amicaux que j’ai donnés aux autres. »

 

Théodore Issac Rubin :

« La gentillesse est plus importante que la sagesse, et le reconnaître est le début de la sagesse. »

 

Lao-Tzu (6éme siècle avant Jésus-Christ)

« La gentillesse dans les mots suscite la confiance.

La gentillesse dans la pensée crée la profondeur

La gentillesse dans les actes engendre l’amour. »

 

Le livre si gentil se laisse feuilleter dans un doux bonheur. Nous avançons entre citations et jolies peintures heureuses ; Sa lecture nous laisse une empreinte précieuse au cœur, et quand ma vie se fait immobile j’aime le lire.

Avec gentillesse, je l’ai parcouru à grands regards devant vous et j’espère que vous avez passé en me suivant un moment confiant, profond et plein d’amour c’est à dire un gentil moment. MJC

 

 

 

 

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25 octobre 2009 7 25 /10 /octobre /2009 18:50
Valises sous les yeux


érès 20 ans de sciences humaines aux éditions érès. 2001


Dans l’agitation d’un déménagement précipité, je croyais avoir perdu mon petit livre bleu « érès, 20 ans de sciences humaines » ; je le regrettais bien car dans ma mémoire depuis des mois ce livre attendait sa place sur mon blog, comme un beau cadeau de littérature et d’engagement dans un monde humaniste, comme je l’aime, car ce monde existe, il suffit de le débusquer dans le talent de certains, dans la lumière ou dans l’ombre de grands auteurs ou d’auteurs encore inconnus. Donc, je croyais avoir perdu ce livre et en cherchant un autre, glissé dans l’imprévu de deux ouvrages, le voilà retrouvé ! J’en suis si heureuse, car j’en aime les écrits de tous ces amis d’érès. Chacun par son style et par sa plume rend un hommage affectueux à cette maison d’édition qui est la leur, maison d’édition  intègre,   cherchant davantage par ses livres à dévoiler un monde de recherches humaines sérieuses, « un monde d’être » qu’un monde de commerce et "d’avoir" et ces courts essais de chacun font comme un bouquet d’amitiés. Moi, j’aime quand l’amitié se mêle à l’écriture ; ça me fait penser à Perec et à l’association Perec, qu’il y a plus de vingt ans, je fréquentais. Moi aussi, j’écris dans l’amitié de mes amis d’Empan dont j’aime tant leur intelligence certes, mais leur générosité. Ils offrent comme ça, bénévolement leur savoir en sciences humaines et leurs connaissances toujours humanistes à la recherche d’un monde presque meilleur du côté des sciences humaines : chacun son style, son espace de connaissances, son métier mais tous se rejoignent dans la rigueur du travail bien fait. Et Empan, c’est aussi érès ! avec qui mon blog est en lien (cliquez sur la revue Empan, à droite de l’écran.) 

Je continue. J’ouvre mon petit livre bleu et puisque l’heure est à l’amitié, je relis l’article de mon ami Charles Gardou dont j’ai souvent parlé (voir catégorie, Force et vulnérabilité).


Son essai s’appelle


Valises d’écrits

Valises sous les yeux…


J’ai aimé cet article à la fois poétique et érudit, intime et citant le fondateur d’ érès comme un retour aux sources. J’aime quand l’écriture se fait retour aux origines, au père, en l’occurrence Georges Hahn. (j’invite mes lecteurs à surfer pour découvrir cet homme que j’aurai tant aimé connaître.) Mais, il en est ainsi avec mon destin : jamais je n’ai eu la chance de rencontrer mon père ! Mais qu’importe par la littérature, j’en ai rencontré tant d’autres que j’ai pu aimer…

Charles Gardou commence son essai en parlant des valises qu’il a sous les yeux : des valises qui inscrivent son écriture et ses déplacements de gare en gare. Vous l’aurez compris c’est un homme de voyages et de rencontres, c’est un homme tourné vers les autres entre deux plongées en lui-même pour chercher le mot qui lui manque pour faire de la page blanche un récit ou une conférence, cette page blanche, champ de bataille contre son langage qu’il dit trop approximatif. Valise sous les yeux de trop chercher,  de trop travailler, travail d’écriture, aération des paragraphes, modulation  du noir des pages. Trouver le mot exact et s’échapper dans la poésie car pour l’avoir lu souvent, je sais sa poésie et ses métaphores.

Mais aussi travail de la relation avec ceux qu’il incite à écrire. Ses nombreux ouvrages « sous la direction de Charles Gardou » est une façon de dire comment il a dirigé ses musiciens comme un chef d’orchestre. Ainsi, m’a t-il aidé à accoucher d’un texte que j’avais en moi « L’identité au risque d’être » que, amitié oblige j’ai envoyé à érès pour publication et dans le déploiement de l’automne, j’attends de savoir l’avenir de mon bébé… Mais quelque soit son avenir éditorial, grâce à Charles Gardou, sous sa direction, et avec l’aide aussi d’un autre ami, Jacques Fijalkow, mon étrange bébé, un bébé pas comme les autres, fort et vulnérable est né.

Valises sous les yeux d’avoir lu des ouvrages que en quelques mots il nous livre.

J’aime quand il parle de Michel Serres et Bachelard, j’aime quand il parle simplement de ses origines. Les hommes et les savants devraient parler plus souvent de leurs origines, ça rend plus humain. Moi, j’ai été élevée à un Empan de Gennevilliers et toute mon écriture est née du BUS 139 où la collégienne que j’étais côtoyais les Algériens de 1960 avec leurs valises sous les yeux de l’immigration difficile en but à la misère et au racisme. Là, j’ai écrit sur un cahier d’écolier mon premier texte libre qui interrogeait ces yeux là et ces valises là.

Moi aussi, j’ai des grands cernes noirs d’avoir trop lu, trop écrit, trop vécu et souvent trop pleuré. Mais je suis fière de mes valises sous les yeux, je ne les dissimule pas par un fard quelconque car ils témoignent de la femme que je suis dans ses passions et dans ses chagrins, dans ses amours et dans ses toujours.

Lorsque je travaillais rien ne me mettait plus colère que lorsqu’on apprenait aux chômeuses à bien se maquiller avant d’aller passer un entretien d’embauche ! Au passage on laissait en paix les chômeurs, eux ils n’avaient pas besoin de s’inscrire dans la séduction pour trouver du travail…Quand j’étais l’accompagnatrice de ces êtres en attente d’être, je leur disais «  Soyez « Vous » de toutes vos forces ! » et revenez me voir, nous parlerons de ce qui a été difficile. Pour moi, accompagner c’était cela, créer de l’estime de soi mais de l’intérieur, pas en maquillant les valises sous les yeux, les valises de la misère. Je renvoie aux articles de mon blog sur Précarité et Vulnérabilité (catégorie  Les inventeurs cherchent et trouvent) ; il est intéressant de noter que ceux qui portent les valises de la misère sont aussi plein de ressources en eux qui ne passent pas spécialement par le maquillage, du jour ponctuel de l’embauche…

Ceci dit j’aime bien me maquiller mais pour le plaisir d’être belle pas pour  cacher  mes nobles valises sous les yeux !

Revenons aux valises de Charles Gardou / Valises sous les yeux, valises d’écrits, valises de lectures, valises de rencontres du Nord au Sud et de pays en pays.

Sympa ces valises ! Et sympa ce petit livre bleu des 20 ans d’érès ! MJC

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11 octobre 2009 7 11 /10 /octobre /2009 22:26

Cet article est la suite de celui du 10 octobre : bibliothèque identitaire.(1)

Et donc dans le temps de deux nouveaux cartons, j’ai posé sur mes étagères blanches dans le désordre (le temps du classement viendra très prochainement, j’aime tant classer mes livres) :

L’étoile d’Erika, un livre de Buber (Judaïsme), tous les livres de Imre Kertez, les livres de Charlotte Delbo, deux romans d’Alice Ferney Dans la guerre et Grâce et dénuement (j’ai lu tous ces livres mais j’ai choisi ces deux là, mes préférés), Un livre d’art, les aquarelles de Carl Nelson, j’aime tant ce peintre du bonheur,Blandine Ponet, L'ordinaire de la folie,tout Françoise Dolto, tout Jane Austen que j’ai déjà posé à côté de Katherine Mansfield avec un livre de Pierre Citati, Portaits de femmes, un livre d’André Néher sur Moïse et la vocation juive, un livre de Rabbi Nacman de Breslau, la chaise vide, Le journal d’Henry David Thoreau, Eloge du livre de Kenneth White, deux livre d’Alberto Manguel, Histoire de la lecture et la bibliothèque de la nuit,Léo Ferré testament bibliographique, j’avais beaucoup aimé aussi la biographie de Belleret sur Léo Ferré, mais j’ai laissé, je suis obligé de choisir,

Comment lisent les enfants du Chaperon rouge ? de Dominique Piveteaud, la belle revue La pensée du Midi, une mère étrangère, de très beaux textes et poèmes sur le thème de la mère, deux livres Erès sous la direction de Rémy Puyuelo, Penser les pratiques sociales et Les centres d’éducation renforcés, des textes du Clap, Mémoire à L’encrier, un livre des Editions La brochure, Olympes de Gouges, Lettre au peuple, et remarques patriotiques avec une introduction de René Merle et en couverture un beau dessin de Rosendo Li, j’aime tant ses dessins, Le discours aux Animaux de Valère Novarina, Les biographies sur Winnicott,  de Robert Rodmann et celle d’Adam Philipps, Jean-Louis Baudry Freud, Proust et l’autre, les trois tomes de Julia Kristeva Le génie féminin, le livre de Sollers Eloge de l’infini, La place des femmes, Editions la découverte, Tout Simone de Beauvoir et des écrits, des biographies sur elle, un livre de Paul Ricoeur , De l’interprétation, un livre de la CGT sur les luttes des femmes,  quelques livres de Colette, David Grossmann, voir ci-dessous Amour, un tout  petit livre cadeau de jJoseph Rouzel A bâtons rompus, un autre petit livre cadeau , 20 ans d'érès de sciences humaines,  du livre sur le thé, Le livre du thé de OKakura Kakuzou et celui des frères Mariage, l'Art français du thé, autre un beau livre presque d’art, sur les soupes salées et sucrées et puis quelques livres de recettes tâchés de farine et de chocolat. Les recettes de ma vie. Ce qui d’ailleurs constitue ma transition.

 

Je ne choisirai  certainement plus de livres. Je dois laisser des planches pour l’avenir même si je sais que maintenant je lirai essentiellement des ouvrages empruntés à la Médiathèque de Toulouse, un peu ma mère.

 

Demain, je mettrais en cartons de la vaisselle, car plus que les livres j’aime mes amis et avec mes livres de recettes, mes assiettes et mes verres, mes mugs et ma théière, mes saladiers et mes couverts, mon joli plateau à fromage trouvé ce matin à un vide-grenier du Pont des savoirs (une pensée à Claire Hébert-Suffrin), grâce à une ou deux nappes et à mes jolies chaises à un euro chacune, trouvées à Emmaüs la semaine dernière, et dans ma chaleureuse salle à manger, avec mes CD Kleizmer, Opéra, classiques et variétés avec sur un mur une belle affiche déployée

 

Hommes Femmes

Egalité


Continuons d’avancer
WWW.femmes-egalite.gouv.fr


malgré mes chagrins et ma solitude, malgré vos chagrins et votre solitude, l’amitié et la camaraderie associative, ouvriront sur nos vies des grands pans de ciel bleu.

Et donc, je continue d'avancer dans ma nuit et ma lumière, avec mes livres et avec vous. MJC

 

 

 

 

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30 juillet 2009 4 30 /07 /juillet /2009 18:39

Héros de l'enfance,

figures de la survie

De Bécassine à Pinochio

de Robinson Crusoé à Poil- de -Carotte.

auteur : Rémy Puyuelo

Editeur : ESF 1998

Collection : La vie de l'enfant.

 

Le livre de la dormition.

 

 

LE BORD

Le livre dit l'énigme

elle dit l'abîme

 

Le livre dit c'est possible

elle dit le fleuve

 

Le livre dit âme ressuscitée

elle dit la dormition.

 

Enigme, abîme, possible, fleuve, âme ressuscitée, dormition.

A l'origine, le désordre, le chaos, l'incertain, le trébuchement, l'indicible, l'hésitation, le balbutiement, le frémissement, le vacillement, le manque, le trop plein mais surtout le trop.

A l'origine le temps,  le temps incertain, le temps à mille temps, celui qui fait emprise, celui qui colle, celui qui engloutit, anéantit, qui pulvérise, qui brise, le temps de la feuille blanche, " niche narcissique ".

Puis, ça s'organise, ça s'invente, ça se range, ça se classe, ça se date. C'est gagné ! C'est écrit ! C'est crée ! C'est un livre de Rémy Puyuelo. Là, commencent nos lectures, là commence la survie d'un livre. A nous lecteurs de réécrire le livre immobile, de tourner les pages, de noter, de souligner, d'encadrer, d'interroger, à nous de le représenter, de le démontrer. A nous de le lire, à nous d'inventer son âme... J'aime lire parce que lire c'est jouer et bouger. Du sens, un ordre me sont proposés. L'ordre du livre n'est  pas une chronologie. Les articles s'organisent autrement. C'est de la mémoire de R.P dont il s'agit et la mémoire et le temps chronologique ça n'a rien à voir. La mémoire c'est du désir, la mémoire c'est déjà l'avenir et toujours du présent. Avant le livre, avant l'écriture, avant la lecture, il y a le big bang de l'expérience, l'instant violent entre tous où on ne comprend rien ; enfant, nouvellement née, me voici le livre à la main, comme Bécassine, me voilà  "bête comme une oie, un chou, un pied, un pot, une cruche " Et ce livre qui insiste, qui résiste, qui m'implique et me duplique, qui me calque et me décalque, ce livre qui me traque. Stop! Je craque ! Je m'y lance ! Je m'y jette ! Voici ma version de l'histoire et puisque la mémoire est vivante que vivent ma lecture et le livre de R.P dans " le temps de la latence et du retardement ". Il est temps de quitter le livre des mains, de le saisir de mon désir et dans l'ailleurs des lignes, survivre. Il est temps de lire et de délire, de suivre sagement les sentiers de la table des matières. Il est temps de travailler de survivre et d'aimer

Survivre à quoi  ? A l'énigme que de vivre et d'exister sans jamais rien y comprendre. Pas un mot, pas une seconde. Survivre à la maladie, à la mort, à la prison, Chacun sa chacune, sa souffrance, sa blessure, son exil, son deuil. Vivre son énigme au dessus de l'abîme, lire les énigmes en abîmes. Tourner les pages et les lire.

Il s'appelait Roland Barthes. A la mort de sa mère, il ne pouvait plus qualifier sa vie tant la chambre claire était obscure. Une voiture passa et le renversa. Il en mourut. C'était tout juste quelques mois après la mort de cette mère .

Il s'appelait Hervé Guibert, il inventa la machine à photographier les fantômes et à arrêter le temps et mourut dans le mouvement d'une une ultime photographie. Texte et images du désespoir. Une énigme qui ne se laissât ni dire ni photographier. Un blanc.

Elle s'appelle Annie Duperey. Elle regarde un portrait intemporel qui la représente. Histoire d'un avant et d'un après. Maman, je te ressemble tant. C'est écrit sur une page d'Annie Duperey.

Elle est morte et vivante. Elle a un fils, il est mort. Elle le porte, le ressuscite. " Elle est enfant de la Dormition vivante et morte, elle et lui, sa mère et elle mais au prix de ne pas grandir, " d'être suspendue ", " enfant de colère ", enfant errant des limbes, douleur exquise, trompe souffrance. "

Je regarde l'image La Dormition de la mère de Dieu : Zograf Dmitar.Elle est belle ! C'est une mère, encore, celle qu'on appelle la Vierge. R.P écrit qu'elle est couchée dans le sens de la lecture (et si la lecture était une dormition ? le lecteur  révélerait l'auteur et le ressusciterait ,  l'auteur révélerait le lecteur et le ressusciterait.) Elle est morte  et son fils qu'on appelle le Christ porte on âme On aperçoit une petite tâche lumineuse sur le tableau. La dormition, c'est la tâche de lumière quand le fils porte l'âme de la mère morte et la ressuscite. La dormition, c'est une histoire d'ascension, de rémission, de résurrection, de  passion et de lumière quand la solitude et la mort se transfigurent, se symbolisent, s'immortalisent, s'éternisent. Dans le livre de R.P, il n'est question que de cela, de la dormition. Ma version de l'histoire, c'est que l'auteur a cherché dans son expérience de pédopsychiatre et de psychanalyste comment cela était possible de survivre à la blessure originelle, voire même à la mort psychique. Cette tâche lumineuse du tableau, elle court dans le livre dans la quête toujours renouvelée de saisir dans l'histoire des composantes psychiques ce qui arrête le désespoir et permet la résurrection, la sublimation et l'amour parce qu'on a rien trouver mieux pour vivre et se survivre. " Mourir et ressusciter intérieurement est la voie qui amène tout sujet à exister, à être reconnu et à se reconnaître, avant que de s'aimer, aimer et être aimer "

Me voici maintenant avec Martin F. Sa blessure : être le fils de Freud, le fils d'un génie. Sa trouvaille pour ne pas en mourir, pour survivre malgré la douleur : l'écriture de son livre " Freud, mon père " (1958) Editions Denoël, 1975. Un puzzle généalogique qu'il reconstitue. Du lieu de  ce roman familial de Martin Freud, R.P énonce sa propre question  : Mon intérêt, ma tentative d'aujourd'hui, ne sont-ils pas quelque part dans le même, dans le travail sur le roman de l'autre, de mon propre roman familial (Voir A de Mijola, 1985), moi, enfant, fils, père... et psychanalyste. "

Ce dont il est question dans l'ouvrage  Héros de l'enfance, figures de la survie, c'est de l'immense capacité de chacun à survivre. L'auteur raconte ces prouesses existentielles à travers divers témoignages de psychothérapies, à travers des paroles et des dessins d'enfants,  à travers des histoires d'enfance, mais aussi avec des contes à vivre debout. R.P raconte à travers tout cela la possible appartenance à l'humanité.. Le possible, le fleuve. Ouvrons le livre à sa 2ème partie " Héros de l'enfance ". Lisons et cherchons.

Il s'appelle Robinson Crusoé. Il est seul. Sa blessure ? ça ne va pas avec son père. Son possible : une île et une rencontre couleur du jour " Vendredi ".

" Notre vie est ponctuée de rencontres : rencontres d'hommes, d'enfants, de livres, de paysages. Nous avons chacun un Robinson Crusoé qui sommeille, pré-scénario familial ignoré dans un arrière pays généalogique, matrice de notre créativité. "

Je pense aussi au Baron Perché qui, sur son arbre, ponctuait le temps de rencontres

Les rencontres sont des possibilités de résurrections, " je revis quand je te vois ". Une  possible dormition. Simple comme un regard, comme une caresse, comme un mot...

Lisons maintenant l'histoire de Bécassine. Bécassine, c'est ma cousine. Elle est sans âge. L'âge du désir peut-être. Sa blessure  ? Une histoire de nez, de mère dépressive et de parrain. Son énigme ? " Un vertige existentiel ", qui "  la confronte à une réalité psychique effrayante qui menace de la dissoudre, de l'absorber "...Son énigme c'est aussi " cette incapacité au deuil narcissique et à la bonne relation à autrui "... Son énigme encore, celle qui la fait " orpheline des 2 mondes, celui de l'enfance et celui de l'adulte. "

Son possible à Bécassine ce sont ses idées impossibles, sa gentillesse et son bon coeur et puis aussi son écriture. Pour mémoire, elle écrit  ses  mémoires. Ce qui fait dire à R.P :

" Le stylo est cette navette, " cette bobine qui ouvre l'espace à l'écriture, aux fautes d'orthographe, aux pâtés, aux ratés, qui nécessite la présence continue de l'autre. ". Mais son fleuve à Bécassine c'est sa dénomination qui survit depuis 90 ans. Drôle de Bécassine !

Chapitre suivant ! Pinocchio.

C'est l'histoire d'un livre réparateur. Moi, je connais un fleuve nommé lecture, un autre nommé écriture. Création antérieure au corps.

" Survivre est l'itinéraire de Pinocchio "

Le fleuve et le possible. " Le petit Pinocchio qui est en chacun de nous ".  Epeler avec lui et ses doubles, la mémoire des possibles. Références aux écrits de Paul Auster sur la solitude et la mémoire. Paul Auster, des livres qui eux aussi disent la dormition quand elle rime avec création.

Empruntons maintenant, le chemin qui mène à la maison des Lepic. Ecoutons Poil de Carotte celui- là qui n'a pas la chance d'être orphelin. Son énigme à lui c'est l'abîme de Jules Renard. Tant de désespoir et de solitude ! tant d'impossible amour ! mais aussi encore une fois le fleuve, la création, la dormition. Créer Poil-de Carotte, qui portera son âme douloureuse ." Un enfant à créer pour se sauver " La dormition suppose le double, celui qui porte et ressuscite. Vendredi, Pinocchio, Poil de Carotte, Bécassine,  etc...Se sauver de l'abîme .

R.P écrit : " Mon hypothèse est que lorsque apparaît chez un humain le désir d'anéantissement ou lorsque les événements de la vie le confrontent par leur violence au risque d'anéantissement un dédoublement salvateur peut s'opérer. IL devient deux ".. " garant d'immortalité, le double est aussi l'étrange avant-coureur de la mort ". Attention ! que le fleuve ne devienne Styx.. " L'Ocèan à vider  à la petite cuillère ". A la manière de, j'écrirai "Vider son enfance à la petite cuillère ", la maintenir en vie, l'éclairer de lectures de contes et de comptines. Poser son énigme, la dire, la reconnaître et elle aussi la vider à la petite cuillère. Inventer ses doubles, vivre en bonne intelligence avec eux. La lecture est un long fleuve tranquille, je vous emmène tous, Bécassine, Pinocchio, Poil-Carotte-, Robinson. Prendre aussi Alice celle du Pays des merveilles,  et Le Petit Prince et puis le Petit Poucet pour le chemin du retour, prendre Aladin et sa lampe, Marcel Proust et Georges Perec et marcher aux côté de Katherine Mansfield. Génial !

A mon insu, me voici cheminant sur le sentier de la dénomination. Survivre par son prénom. R.P a écrit un bien beau chapitre sur le prénom, sur ce " sentiment continu de l'existence. Il S'appelle R comme... Y comme.... Moi, c'est Marie-José sans E. Dans ce chapitre là il parle d'identité et d'identification, il parle de l'école maternelle. Il dit que " le prénom est la scansion, le  Bip Bip, la fréquence du bain sonore dans lequel se trouve l'enfant. " Il se souvient quand le n° tatoué identifiait à la place du prénom, meurtre symbolique qui précédait le meurtre réel, c'est bien de l'avoir écrit, on ne le répétera jamais assez, l'horreur existe. Il faut la dire sinon elle redouble. Redouble aussi le bonheur de cette phrase :  " Tant que l'on peut dans le secret de soi se répéter son prénom et se raconter les noms et les prénoms de ceux que l'on aime, on reste libre et vivant. "

Dans ce même chapitre, une petite Bérénice met de l'ordre dans sa tragédie en travaillant son prénom. Etonnante analyse !

Notre lecture progresse. La question s'articule ainsi : ne pas être ou renaître ? Ne pas être parce que ça fait trop mal ou renaître grâce à la partition : sublimation, symbolisation, création, déplacement, expérience poétique, élaboration du roman familial, figuration, nomination.

A ce point de l'ancrage théorique de l'ouvrage, je ne résume pas, je souligne, je recopie, je m'arrête, je mémorise, je reviens à la ligne précédente, je m'essouffle, je repars, j'apprends, je rame, je persévère, je m'accroche et enfin, avec humilité je progresse.

Ces repères théoriques sont indispensables pour habiter ces rencontres avec ces hommes et ces femmes qui ont mal de ne pouvoir s'y reconnaître tant ils sont engloutis par leur catastrophe narcissique.

A ce point de la souffrance de l'autre, je me tais.

Je lis et recopie les mots de Mélanie qui savait qu'elle allait mourir.

" La vie sonne faux à l'oreille

  et juste pour les aveugles "

Cette phrase me hante. Je ne sais pas pourquoi.. Elle m'échappe et me tient.

 

J'avais un maître, lors de mes études à Montpellier. On l'appelait le Docteur Ribstein. Il disait qu'à chaque époque de notre vie, nous recommencions notre légo. J'aimais ce maître et cette image qui nous faisait don de notre enfance. En lisant ce livre, je pensais à mon légo en perpétuel travail. Pour mon légo, j'avais une nouvelle pièce, bleue comme la couverture ... Une pièce bleue à poser entre énigme  et abîme, entre possible et fleuve, entre survie et dormition. C'était difficile !

 Alors, j'ai placé toutes mes pièces sur ma feuille blanche quadrillée, je les ai posées, disposées, agencées, j'ai cherché puis j'ai écrit : " Le livre de la dormition ".

J'espère que mon légo donnera à d'autres le désir de lire cet ouvrage passionnant et souvent émouvant qui célèbre la Dormition du Mozart assassiné qui meurt en chacun de nous mais dont l'âme s'élève jusqu'à la création.


  MJC  Montauban. Printemps 1999

 

P.S La petite pièce R.P renvoie au nom de l'auteur / Rémy PUYUELO

Article publié dans La Journee.Psychiatrie Privée N°7

 

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5 juillet 2009 7 05 /07 /juillet /2009 15:42

 

François VILLON                     François Villon       

 Poésies                                  Jean CASTELNAU

 Editions Tallandier 1942 251 p.         NRF Gallimard 255p   



Marie-José Colet à la manière de François Villon

 

                                     


La ballade du Mal-Renommé.



         Frères humains, qui après toi vivons

         N'avons les coeurs contre toi endurcis

         François des Loges ou François Moncorbier

         Ton nom incertain fut la première énigme

         Tu es né emprés Pontoise, à Paris

         Dans ton premier poème  tu l'écris.

         De signe de richesse, jamais tu ne possédas

         De bon pain souvent tu manquas.


         En ces temps, la guerre de cent ans

         Ravage les campagnes et les champs

         Moult maux écrasent les miséreux

         Pillages et destructions,

         Brasiers et bûchers

         Empourprent les ténèbres

         Le pauvre François, de toit n'a plus

         Il s'en va seul, par le sort lâché.


         Or, crimes et jouissances frénétiques

         Dans un même ciel apocalyptique

         d'un mortel partage

         Tous dépérissent, c'est la guerre !.

Arrière, anglais... Arrière

         La belle Jeanne sur son bûcher trépasse

         Du combat centenaire, les âmes sont lasses.


        

         François Moncorbier, tes plus jeunes années

         Furent le théâtre d'atroces misères

         Qui écrasèrent ces pauvres hères.

         Tes compagnons de jeux, de pauvres gueux.

         Tandis que le peuple démuni s'enfuit

         Toi, tu assistes à l'exode des hordes

         Une misérable vie du bonheur ferme l'huis

         Et dans le ciel aucun espoir ne luit.

 

La pauvreté écrit sur ton âme étonnée

De ta pauvre vie, la tragédie.

Les heures de ton enfance malmenée

Tressent à jamais ta détresse

Qui de vain répit ne te laisse.

Du monde cherchant l'oubli

Pour éclairer ta longue nuit

Du vin, tes vers tu remplis.

 

Toutefois, un havre tu connus,

Par un bon père tu fus aimé et reconnu.

Il s'appelait Maître Guillaume de Villon.

Près de lui, à Paris tu grandis

Rue Coupe-gorge  et Coupe-gueule

Rue Saint-Jacques et petit pont

Rue Quinquampoix et Saint-Jean-le Rond

D'une rive à l'autre, écolier tu devins.

 

Tu découvris les comment, on te dévoila les pourquoi

De l'univers tu connois toutes les lois.

En 1449, on te décerna le titre de bachelier des arts

En 1452, tu portas le bonnet de maître es-arts.

C'est alors, qu'on te nomma François Villon

A l'histoire et à la légende obscure tu naquis.

De longues épopées en vers tu racontas.

Villon, tu devins un mauvais garçon et même pis

 

Cabarets et auberges abritèrent tes nouveaux manuels

Mendiants, volant, pilant

D'une bataille des rues, tu sortis le plus fort.

Franc buveur tu devins et joyeuse vie tu menas.

Chopines et bon manger, jours et nuitées

Tes mauvais coups et tes vaines querelles

Des prisons te firent découvrir l'ennui mortel.

 

 

Mais, dans ta poésie tu vivais.

.De tes folles équipées tu te reposais

Tes chagrins, tes souffrances tu confiais

Ton oeuvre était de ton âme le refuge

Tes ballades, un abri pour ta muse.

Tu souffris mille douleurs

Mais tu les chassas avec ardeur.

Au rendez-vous de la vie, tu fus toujours à l'heure;

 

 

Ainsi, de longues années passèrent.

Du vin pour oublier, de l'encre pour raturer.

Tu te trouvas seul et ivre

Mais tu voulais vivre.

Alors, ta place tu trouvas chez les coquillards

Malfrats et paillards

Voyous et pillards

Et leurs vies tu décrivis.

 

Tu fus banni et rejeté,

Maintes fois au Châtelet enfermé

Puis libéré pour encore mendier

En compagnie de pèlerins endiablés.

Bons vins, bonnes chères

Belles dames et beaux vers

Feux de joie, le peuple danse

François Villon tu t'élances.

 

Te voici, en marge de la morale et du droit

En marge de toi-même et de la loi.

Ton génie puise ses racines dans la débauche

Ecrivant toujours, de quelques vers l'ébauche

Désespéré puis mécréant, tu devins

Dans les cabarets tu bois ton vin

Tu mendies ton pain, rue de Huchette

A la fameuse Pomme de Pin ou rue Saint-Séverin.

 

Dans les tavernes, dans les auberges

Tu connais des amours sans lendemain

Tu ris, joues et mignonnes.

Près des servantes, de Cupidon, du bon temps tu te donnes

La belle Gantière, Blanche La Savetière

Guillemette La Tapissière

L'hypocras coule à flot sur tes livres

De cannelle et gingembre, ta poésie s'enivre.

 

Dans de mauvais coups, tu te laisses saisir

Et de l'âme humaine, tu connais le pire

Riment alors avec tes rimes, tes légendaires crimes

Ta mémoire se charge d'effroyables souvenirs

François Villon, la potence te guette

De la mort tu deviens le poète

De la vie tu descends la pente

Du caveau, l'ombre te hante..

Le néant te fait frémir et pâlir

Tout passe, tout s'évanouit

Tout s 'effondre et décrépit

Le pis comme le meilleur

Les souffrances comme le bonheur.

Tes rimes tissent la vie et la mort

L'an et la chute

De tes vices tu n'es pas vainqueur.

 

Prisonnier du prévôt

La question tu connus

Et faillis être pendu.

A temps tu écrivis une ballade

A temps tu fus entendu

Et la Rédemption tu connus

Encore quelques années de poésie

Avant que ne s'achève ta jeune vie.

 

Du pauvre Villon, le testament tu écrivis.

A l'envoi, tu informes chacun

Qu'il boira "un trait" de bon gros vin rouge

Quand la mort de Villon

Sonnera le carillon.

Frères humains, qui après toi vivons

N'avons les coeurs contre toi endurcis

François des Loges ou François Moncorbier.

 

De la vie autant en emporte ly vent

Mais grâce à Dieu, de ta poésie

Le vent n'a point voulu

Et des outrages du temps

Tes vers furent épargnés

Dans nos âmes à l'abri, toujours on les lit

François Villon, ton éternelle poésie

A jamais chantera la vie.

 

 

  J'ai écrit ce poème en décembre 92 , il a été publié dans SCRIBANNE N°6/ JUIN 93

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