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5 janvier 2010 2 05 /01 /janvier /2010 17:10

J’écrirai


J’écrirai la mémoire de mon engagement, celles de mes livres comme autant de petits cailloux blancs. Petit Poucet, je suis allée loin, j’ai marché des jours et des nuits dans ma forêt d’enfant et de femme, dans une forêt de solitude, de lumières et d’incertitudes. J’ai semé des notes de lectures, certaines ont été publiées et j’en ai été fière, j’ai tracé mes points de repère, j’ai crée des ateliers, des temps et des lieux où il est possible de se rencontrer, de parler de nous et de nos livres, de nos textes écrits, de nos récits de vie, de nos lettres chuchotées ou clamées, en toute liberté, égalité, fraternité.

Voici mes cailloux blancs et qu’à ces minuscules cailloux s’ajoutent les vôtres, lecteurs des ateliers de lectures et que cela deviennent enfin le gravier d’une longue route de solidarité. Inventons nos lectures et nos paroles, inventons nos souffles de vie, inventons le chemin qui mène de nous à nous, quelques soient nos âges et nos cultures dans le déploiement de nos livres de paix.

Ma sœur Anne, ne vois-tu rien venir ?

Je ne vois rien que la route qui poudroie et…

Cette phrase en suspens de mon enfance, gravée à tout jamais en moi, symbolise le possible espoir de vaincre Barbe-Bleue, le terrifiant Barbe-Bleue, celui qui sanctionne la légitime curiosité de la femme. Les livres ne sont-ils pas autant de placards que parfois il s’avère dangereux d’ouvrir parce qu’ils disent la liberté d’être malgré le pouvoir noir jusqu’au bleu, rouge jusqu’au sang, gris jusqu’à l’intolérance grise.

Ma sœur Anne, ne vois-tu rien venir ?

Si, ma sœur, je vois des livres et des pages tournées par ceux qui cherchent et qui parlent, par ceux qui écrivent et qui créent le présent de leur mémoire, je vois la vie qui continue dans la régularité des saisons, dans les luttes humbles et entêtées du quotidien..

J’écrirai sur mes pages le partage de nos âges, de nos récits, de nos recherches. J’écrirai ce que c’est que d’être ensemble dans le temps des livres et des autres. Ces autres, aux prises, parfois, souvent, trop souvent avec la douloureuse demande : « Madame, je veux apprendre à lire. »

J’écrirai une mémoire possible de mes livres lus, comme un itinéraire balbutié certes mais crée dans mon refuge, dans mon abri, dans ma nuit, dans mon ailleurs, dans mon ciel, dans mon univers, dans mon toujours, dans mes jamais, dans mon secret, dans mon jardin, dans ma maison de papier, dans mon imaginaire, dans ma réalité. J’écrirai envers et contre tout, avec tous, avec ceux-là mes amis, j’écrirai mes engagements de femme, de professionnelle et de citoyenne. Je parlerai de mes livres. Je parlerai de ceux des autres. Je parlerai de vous,  je parlerai de moi..

(Passage de Madame, je veux apprendre à lire ! Erès 2008)

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