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7 octobre 2011 5 07 /10 /octobre /2011 07:39

Colloque A.p.p.e.a 3,4,5 novembre 2011 à Lyon : Psychopathologie et handicap chez l'enfant et l'adolescent :

J'invite les inventeurs de lectures à se rendre à ce même commentaire, dans la catégorie : Les Inventeurs cherchent et trouvent du 19 mai 2011. Tous les détails de ce colloque qui s'avère aussi passionnant qu'efficace s'y trouvent.

Travailler tous ensemble pour vivre tous ensemble dans la tendresse et la citoyenneté réussie, assumée, victorieuse. MJA

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6 octobre 2011 4 06 /10 /octobre /2011 18:21
La librairie Ombres blanches et les Editions érès

ont le plaisir de vous inviter à une conférence-débat

à l'occasion de la parution de l'ouvrage de Anne-Marie Merle-Béral et

Rémy Puyuelo

 

Enfants uniques

Entre isolement et solitude

 

Le vendredi 7 octobre 2011 à 20h30 à la librairie Ombres blanches

50 rue Gambetta - 31000 Toulouse - 05 34 45 53 33 - info@ombres-blanches.fr

 

Michèle Nouilhan, professeur de lettres classiques à l'université Toulouse II, participera au débat.

 

Et donc, bonne soirée et bonne découverte de ce livre et de ses auteurs. Un livre dur l'enfance comme sait les écrire Rémy Puyuelo. MJA

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22 août 2011 1 22 /08 /août /2011 22:09

MARCIANNE BLÉVIS

Psychanalyste, Paris.

 

 

 

S’écrire… Pour Jacques Hassoun

 

 

 

Je n’aime rien tant que les lettres que Jacques écrivait, celles que Cécile Wajsbrot et lui échangèrent en particulier, lues en leur temps, relues récemment. Non seulement le talent de l’écrivain n’y est jamais aussi manifeste ni aussi heureux que dans ces échanges, mais la façon dont une adresse explicite, vers un ou plutôt une autre, constitue un point d’appel à sa pensée et à ses mots, ne laisse pas d’ouvrir un champ où l’analyste débat avec l’écrivain.

Des lettres s’échangent, nous avons le temps d’apprendre à les lire ; nous percevons la respiration de ces deux êtres qui se parlent sans fard d’emblée, sensibles à ce qu’ils entendent l’un de l’autre et à ce qu’ils ignorent superbement. Ce qui parle à l’un n’est certes pas ce qui résonne chez l’autre, mais ils construisent entre eux une sorte de continuité secrète qui (en est-ce le but ?) accueille leurs vacillements.

C’est cette interlocution que j’interrogerai car elle dit autant de Jacques Hassoun, que de tout écrivain, et peut-être aussi de nos patients qui instituent leurs analystes, en interlocuteurs à la fois internes et externes. En tout cas un analyste peut représenter pour certains un  public « interne» qui heureusement tend à être moins inamical que de celui dont ils sont coutumiers.

Quelques uns en effet vivent un enfer, bien proche de ceux dont témoignent certains écrivains pris entre la terreur de se faire entendre et l’horreur de demeurer non pas inconnus mais méconnus. La faiblesse de ce public « interne », véritable personnage intérieur avec lequel le dialogue est essentiel, ou son manque de conviction  pour accueillir en avant première toute l’œuvre présente et à venir, est à la source des angoisses proprement anéantissantes dont témoignent de ceux qui sont plongés dans ce genre d’enfer, d’autant qu’ils sont demeurés sans autre ressource psychique que de continuer dans la voie dite par Freud de la « sublimation », « bon(s) qu’à çà » comme le disait Samuel Beckett. À eux s’offre, autre impasse, la tentation de l’inhibition mélancolique où un Dieu cruel remplace sans relâche tout autre interlocuteur interne.

Quant à Freud, inventant la psychanalyse dans un échange épistolaire passionné avec Fliess, n’oublions pas que celui-ci fut longtemps son seul et indispensable « public ».  En 1898 il lui écrit : « Sans public, je ne puis rien écrire, mais je suis parfaitement satisfait de n’écrire que pour toi »[1]. L’analyse est le lieu où s’invente une interlocution, un  public interne « autre », moins hostile, sorte de « compagnon secret » comme se nomme en français cette nouvelle de Joseph Conrad, « The secret sharer » ; titre  intraduisible, qui signifie littéralement  « le partageur secret », celui que l’on porte en soi, et avec lequel plus on dialogue mieux on se porte.

L’analyste se prête à être ce « partageur secret », entité qui n’appartient ni à l’analyste ni à son patient mais aux deux, avant que l’analyse n’arrivant à son terme, ce même patient ne s’en aille avec cette conquête devenue intime, débarrassé d’avoir à chercher désespérément à l’extérieur ce qu’il n’était pas parvenu à former en lui-même, soit un dédicataire interne, premier public à même d’accueillir le jeu toujours en équilibre instable entre la norme esthétique et sa transgression.

Ainsi Antonin Arthaud dans ses  Lettres de Rodez , tenta-t-il d’instituer Jacques Rivière à cette place, celle du « dédicataire interne » comme l’écrit cet ami de Jacques Hassoun, Simon Harel, à l’occasion d’un livre sur Arthaud[2] qu’il présenta à Montréal lors d’un colloque sur Antonin Arthaud qu’il organisa en mai 1993 et auquel Jacques Hassoun participa. Ce n’est donc pas par coquetterie que j’invoque ici A.Arthaud rencontré au hasard des flâneries qui irriguèrent ces lignes. Mais, paradoxe impossible de l’épistolier haletant qu’il était, Arthaud voulut à la fois publier sa correspondance avec Jacques Rivière telles que furent écrites spontanément ces lettres et dans le même temps les réécrire à son goût avant publication.

Ceux qui ont l’habitude de correspondre ne pensent pas en général que leurs échanges vont être publiés, et Freud, quant à lui, fut tout à fait récalcitrant à la publication de ses lettres à Fliess quand la princesse Bonaparte les retrouva. La correspondance entre Jacques Hassoun et Cécile Wajsbrot a, elle, la singularité d’affirmer son projet de publication d’emblée. Assiste-t-on à la mise en scène d’une intimité qui dès lors cesserait de l’être ? Ou plutôt, et je penche évidemment pour cette deuxième hypothèse, ne serait-ce pas que leur intimité est d’autant plus palpable qu’elle ne dénie pas sa précarité? En tous cas, énoncer l’imminence  d’une publication c’est vouloir convoquer un public et partant conjurer un dédicataire interne aléatoire, peut-être aussi évanescent que celui avec lequel Antonin Arthaud se débattait.

Jacques Hassoun et Cécile Wajsbot, destinataires autoproclamés de cette correspondance, se rencontrent sur ce point singulier que de vouloir  engendrer une figure du dédicataire interne moins fuyante, en s’aidant aussi de la terre d’accueil du duo psychanalytique transposé dans l’affirmation du cadre offert à leurs échanges.

« S’écrire… » alors vraiment s’impose. La correspondance revient à donner un corps de lettres à un corps indistinct d’être entre eux deux, dans l’entre deux de d’une écriture à deux voix. Sans oublier un corps érotique sans assignation définie  d’appartenir à l’un ou à l’autre, mais aussi présent que celui qui se tisse entre patient et analyste et dont témoigne le plaisir de raconter qui surgit à tous moments et en toutes occasions dans cette correspondance. Et nous lecteurs,  autre public, situés en tiers, un peu en dehors, nous nous sentons un peu exclus, un peu atténués. Nous sommes renvoyés à notre regard, obligés de composer avec un public interne d’autant plus redoutable qu’il se constitue sous nos yeux. Prouesse ! D’évanescent, d’incertain, ce personnage interne commun à ces deux là qui s’écrivent nous tient en joue. Tout se retourne ! Et nous, public lecteur, sommes amenés étrangement à goûter une forme de paix, dont à la fin du livre nous restons encore affamés, dérangés.

La cause de cette faim ? S’être pris au jeu. Le « s’écrire »  donne à voir et à entendre un criant « s’écrire à soi-même ». Dans la locution « soi-même » on ne manque pas d’entendre le mot aimer que les jeux de l’écriture peuvent facilement et ironiquement transcrire en un « soi m’aime » qui en souligne le sens narcissique. S’agit-il de cela ? Là où la séparation intérieure d’avec une langue maternelle se fait pressante et angoissante, évoquant cet exil de la langue qui a occupé Jacques Hassoun longtemps, les destinataires des lettres, parce qu’ils se distinguent du reste du public, l’anticipant en quelque sorte, aménagent une forme d’impénétrabilité. C’est un tout autre enjeu qu’une recherche de quelques reflets narcissiques en miroir. Tout au contraire, une certaine inaccessibilité parce qu’elle est d’emblée distribuée entre deux protagonistes se montre et s’offre ainsi à d’autres ; lien avec des semblables peut-être,  dissolution en eux, non.  

   Invisible, inattendue, une nécessaire inaccessibilité rend possible ce rapport de soi à soi qui est une forme d’indépendance fondamentale vis à vis de l’Autre et des ses demandes. « S’écrire » évoque  alors la constitution d’une identité flottante étendue entre soi* et l’Autre, celle qui convient le mieux à l’analyste mais aussi à l’écrivain, jamais aussi sujet de son écriture que lorsqu’il s’éprouve dans une relative indépendance à son public externe, moins aliéné au désir de lui plaire à toutes forces.

S’écrire …. au sens de se séparer de soi, Jacques l’évoquait sous le terme de « l’enfant mort » «  en partant de l’hypothèse qu’au début de l’existence, pour accéder à la subjectivité ( à la position de sujet), l’infans devait  passer par un deuil, se séparer de la jouissance, de la merveille, de la toute-puissance » qui peut être aussi la toute impuissance ou l’horreur. Nous avons un deuil à faire pour occuper une position subjective, un deuil jamais terminé, interminable, un deuil de l’enfant merveilleux écrivait Serge Leclaire dans « On tue un enfant » proche de Jacques Hassoun sur ce point, un deuil du soi-même encore pris dans les rets de l’informe maternel.

Ce deuil d’un « soi même » jamais totalement accompli, mais dont l’adolescence est un moment rencontre inaugural que trahit la préoccupation de la mort à cet âge, éclaire un aspect de la personnalité de Jacques Hassoun, toujours prompt à s’étonner, s’enthousiasmer ou se cabrer comme un toujours jeune homme qu’il sût demeurer; ce n’est pas lui faire injure que de voir en lui, manifeste dans le désir d’écrire et de s’écrire, à un ou une ami(e) intime et publique, une sorte d’adolescence chez lui fort heureusement jamais éteinte.

Hantée par la quête d’un autre soi-même, sorte de jumeau incarné par l’ami(e) intime, l’adolescence exprime avec une plus grande acuité , ce qui se poursuivra toute la vie durant et ce chez les deux sexes indistinctement, soit la recherche d’une figure du double de soi, figure à rechercher, à accepter et à aimer et qui a pour tâche de contenir l’inquiétante étrangeté du familier et du séparé de soi. 

L’arrachement premier de soi à soi n’est jamais facile, et cette mort à soi-même qui s’inaugure peut croire être conjurée par la mort elle-même comme en témoigne la tentation du suicide si fréquente à l’adolescence. L’espace que protège l’ami intime construit la capacité d’accueillir l’étranger, le non humain, le périssable, le transitoire, sans que s’y dissolve une singularité qui commence à s’énoncer.

La psychanalyse est née au cours  d’une correspondance passionnée entre Freud et Fliess où pas grand chose ne correspondait vraiment entre ces deux hommes sinon que Fliess est de tous côtés associé à la mort : comptabilité funèbre par laquelle Freud détermine la date de sa mort, ami dépositaire des moments de dépression etc.. Bien après la rupture entre eux, Freud en restera hanté. S’approchant de sa mort, en 1938, répondant à une correspondante inconnue, Rachel Berdach,  un lien entre la mort et la jeunesse s’impose encore à Freud qui lui écrit « À en juger par la priorité que vous accordez au problème de la mort, on devrait deviner que vous êtes très jeune »[3] (en fait R.Berdach avait 60 ans). L’adolescence est hantée par la mort et  l’ami intime, si nécessaire à cet âge, met à l’abri en lui ce dédicataire interne à peine ébauché , un soi même en cours de séparation d’avec soi et pour lequel la mort est encore une trop grande  injure.

L’ami intime, place intense pour Jacques où certains organisateurs de ce colloque se reconnaîtront, et reconnaîtront combien cette quête de l’ami intime ne s’est jamais démentie, jusqu’à la fin .

Revenant à ce colloque sur Arthaud et ayant l’occasion de lire la communication que Jacques Hassoun y avait faite, quelle n’a pas été ma surprise de découvrir qu’il avait commencé son propos par dire qu’il avait déchiré le texte préparé pour l’occasion du « Suicidé de la société » en apprenant ce 1er mai 1993, au moment de participer au colloque qu’un de ses meilleurs amis venait de se suicider. Ce geste, déchirer un texte en guise de deuil ou de protestation contre la mort, me fait penser à celui d’Henri Michaux accouru auprès d’un de ses amis mourant, devant retenir son chagrin pour ne pas alarmer celui qui trépassait, rentrant chez lui, dessinant à la plume sur une feuille de papier, et grattant le papier de la plume jusqu’à le déchirer pour que « du papier vienne une plaie »[4]. Il fallait à Henri Michaux voir sur la feuille de papier toute sa douleur d’ami déchiré et tenu de tout cacher sans rien en partager avec le mourant. Feuille de papier, tenant lieu d’un Autre mort ou vif dont le fantasme qu’il soit déchiré lui aussi par la souffrance de la séparation quelle qu’en soit la cause, chagrin d’amour ou arrachement de la mort, fait partie du temps du deuil et de sa cruauté nécessaire.

Pour Freud la rupture avec Fliess fut d’autant plus dramatique et traumatique qu’un tel fantasme fut impossible, et que seulement parvenu au seuil de la vieillesse,  tentant de résoudre une fois de plus sa relation avec Fliess , il osera ce « transfert » enfin réussi, cette translocation de l’auditeur réel en auditeur fictif purement intérieur qui lui souffle alors toute sa propre méditation sur la mort et la répétition.

Pour ce qu’il en est de la correspondance de Jacques Hassoun et de Cécile Hajsbot, son projet même, ses silences, ses appels me semblent en fin de compte tourner autour d’une question de jeune homme (ou de jeune femme) hanté(e) par la mort. Comment l’apprivoiser ? Elle, sans doute, la mort, cette toute Autre et si familière pourtant,  et surtout sa véritable horreur qu’est l’oubli. Marcianne Blévis

 

 Mini-commentaire :

Cet article fait référence à un très beau livre de Jacques Hassoun et Cécile Wajsbrot « L’histoire à la lettre » (Editons Mentha 1991). En Novembre 89, le mur de Berlin s’effondre.  Une page d’histoire se tourne et les deux auteurs de ce livre étonnant progressent de lettre en lettre, dans une correspondance amicale, qui dans leur mouvement épistolaire se saisit et se dessaisit tour à tour, d’une symbolisation si difficile pour l’Allemagne et pour nous tous de la Shoah. Un livre à fois tendre et quotidien, porteur d’histoire et d’humanité anéantie puis réhabilitée. Comme Marcianne, j’ai beaucoup aimé ce livre d’amitié et de littérature, de souvenir et de symbolisation surtout aussi, que je vous invite à lire.

Et donc, je remercie profondément Marcianne Blévis, psychanalyste à Paris de nous avoir fait « don » de cet article qui m’a beaucoup intéressée, que j’ai lu plusieurs fois, cherchant à inventer ma lecture d’elle du côté d’une réflexion qu’elle introduit avec efficacité : qu’est se joue dans l’interlocution construite par l’écrivain ou emportée par le patient ?

Pour vaguement répondre à cette question, pour la caresser de ma double expérience d’écrivaine et de parfois patiente, j’aurais envie, justement de partir du « don ». Il me semble que ce qui différencie fondamentalement l’écrivain du patient c’est qu’ils ne se situent pas du même côté de la dette. L’écrivain par son « don » (dans les deux sens du terme) DONNE à ses lecteurs du « quelque chose «  qu’il a élaboré patiemment, souvent du lieu de sa douleur, mais aussi parfois du lieu de sa joie, en tout cas du lieu de son identité . Le patient lui, DEMANDE à son analyste « quelque chose »  que l’analyste entend du lieu de ce qu’il a élaboré patiemment, souvent du lieu de sa douleur, mais aussi parfois de sa joie, en tout cas du lieu de son identité d’analyste. « La continuité secrète » dont parle Marcianne, traverse le Don ou la Demande, mais comme DON et DEMANDE sont inscrites dans une même dialectique de l’humain, on peut alors comprendre mieux comment la fin d’une cure débouche sur une activité d’écriture. En tout cas, cela a été le cas pour moi : rembourser ma dette à mes thérapeutes en faisant DON de mon écriture à d’autres. Il y a une sorte de glissement de la dette, qui n’est pas dans un mouvement univoque. On rembourse à d’autres ce que l’un(e) nous a donné. Peut-être, peut-on trouver alors sens au fait que tant d’analystes et d’analysants deviennent écrivains ou même artistes. On le dit bien, qu’une « analyse réussie » ouvre à la création : création comme remboursement d’une dette : passer de la DEMANDE au DON et c’est ce passage qui, me semble-t-il est le véritable point d’appel dont parle Marcianne Blévis jusqu’à La Faim de l’histoire. La mienne comme celle des autres. Cette faim qui me dévore et dont je ne me rassasie jamais, celle des mots ! MJA

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 



[1]  E. Jones. La vie et l’œuvre de Freud, PUF, tome 1, p.332 .

[2] S.Harel.       

*le moi ou  le petit autre

[3] S.Freud. Correspondance, Gallimard, p 496, lettre à Rachel Berdach.

[4] H.Michaux. Émergences, résurgences.Champs Flammarion

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20 août 2011 6 20 /08 /août /2011 19:51
L’orthographe française

Traité théorique et pratique

avec des travaux d’application

et leurs corrigés

 

Université Nathan information

                             Formation

Linguistique française

1980

 

         Les livres ont parfois une histoire. Celui dont je vais vous parler, «  le livre de Nina » en a une, très jolie. Je vous la raconte.

 

         Ma famille maternelle, pour cause de vie remuante,  est un peu dispersée et certaines branches sont inconnues à d’autres. Nina, elle, je la connaissais bien, et je l’aimais. C’était la cousine germaine de ma mère et aussi sa meilleure amie. Elles se ressemblaient. Elles étaient amies d’enfance avant que d’être cousines. Elles avaient partagé la guerre, de nombreux engagement, des rires et des livres puis peu à peu, elles s’étaient éloignées. Vous savez la vie, comme c’est. Après la mort de ma mère, je l’avais revue. Comme je l’avais trouvé belle, bien coiffée, vêtue d’un chemisier jaune qui lui allait si bien ! La soirée avait été délicieuse. J’aimais tant son sourire ! Nous avions parlé de ses enfants, des miens, de celui de ma sœur Cathy, qui partageait le dîner avec nous. Comme nous étions bien d’être ensemble ! J’avais eu le temps d’admirer son grand bureau, jonché de feuilles et de livres. Dans le temps d’une phrase, elle me fit passer sa passion tumultueuse pour les mots. La même passion que la mienne, mais la sienne était beaucoup plus érudite ! Puis 15 jours après, un virus absurde  l’emportait à son tour, et deux mois après ma mère, elle nous quittait. J’en eus beaucoup de peine. En 1997, juste avant l’hiver.

 

         Les mois et les années passèrent. Acharnée, je travaillais les mots, j’avançai d’ateliers de lectures en atelier de lectures, j’écrivis deux modestes livres dont la gloire ne voulut pas s’ emparer, je commençai mon blog et un jour, je reçus un mail d’un cousin de la branche maternelle qui avait été ému de lire le nom de notre lignée dans un de mes commentaires, « mes ancêtres, ces inconnus ». Nous échangeâmes quelques mails. Un autre jour encore, j’eus la délicieuse surprise de trouver dans ma boîte aux lettres ce beau livre de Nina, je devrais dire Nina Catach, qui était de son vivant, Maître de Recherche au C.N.R.S, Chargée de cours à L’Université de Paris III.  Son œuvre reste accessible à tous. L’ensemble de ses travaux est largement répandu dans toute les pays francophones ; elle reste une référence dans l'enseignement du français.

 

Nous avions le même combat toutes les deux, contre l’échec scolaire. Elle par son enseignement si érudit et ses recherches passionnées et moi ; beaucoup plus modestement avec mes obstinés ateliers : nous ne voulions pas que l’orthographe soit cause de discrimination pour les plus fragiles. Et ce cousin inconnu, retrouvé par le hasard de mon blog, qui m’envoyait le livre  dans une gentille dédicace me faisait savoir avec gentillesse qu’il avait reconnu en moi, la même passion que Nina sa tante (Je crois...Tant est embrouillée pour moi l’histoire de ma famille maternelle ! D’ailleurs, la famille paternelle c’est encore pire !). Un mot encore, il y avait sur la première page du livre une dédicace et l’écriture de Nina. J’en fus réellement émue.

 

         Mais l’histoire n’est pas finie ! Je fus tellement émue de recevoir ce livre, que je décidai de le poser comme livre fétiche sur mon bureau qu’il ne quitterait jamais (avec deux autres livres fétiches et ma colombe trône sur ces trois livres).

Je veux dire par là que Le livre de Nina, m’accompagnera dans mon écriture, toujours. Comme un modèle, une identification précieuse, comme un souvenir, comme une transmission qui caresse aussi ma mère, qui aimait également tant les mots. Ainsi le temps a fait une boucle, comme j’aime, une boucle de hasard et de désir. Une boucle de persévérance dans l’espoir d’un monde où les mots s’enracinent dans la lutte contre l’injustice et l’inégalité sociale dont souffrent tant ceux qui ont « des troubles d’orthographe. »

 

         Dans son avant-propos, Nina Catach écrit que son livre s’adresse aux enseignants de Français Langue Etrangère (Fle) et que ce livre peut les aider à organiser leurs cours. Selon elle, l’orthographe est importante mais elle reste secondaire, « elle est un complément de la langue mais non son fondement » et c’est pour cela dit-elle, qu’elle est avant tout une technique, une affaire d’usage, un maniement à acquérir. Elle pose la question du passage à l’écrit et du choix pédagogique qui lui est associé avec un équilibre à respecter entre loisir, découverte et acquisitions obligées.

 

         Elle définit la pédagogie comme un choix, (objectifs limités et pondérés), comme un raccourci (éviter les tâtonnements), comme une imitation (je préfère son autre mot d’osmose et d’imprégnation de l’enfant par l’adulte), comme une improvisation calculée et enfin comme une réussite. J’aime sa façon d’écrire son souhait, qu’un jour disparaisse la notion de « faute » et le « zéro en orthographe ». La notation selon elle doit être positive.

 

         Elle présente son livre comme un cours, non encore achevé, non encore définitif. On la sent chercheuse en mouvement à l’écoute de ceux qui la liront et se laisseront imprégnée par elle, à l’écoute de leurs critiques et de leurs suggestions. Plus que didactique sa pensée est dialectique et c’est probablement ce qui en fait sa grand richesse.

 

         Je vous invite à découvrir ces 300 pages d’études sur la syllabe, le mot, ses timbres, sur les phonèmes, sur les systèmes vocaliques et graphiques, sur bien d’autres choses encore au pays si féerique mais si réel de l’orthographe. Et puis, je vous laisse aussi découvrir sa bibliographie sur les langues et leur histoire, sur la pédagogie et des articles divers. Un livre érudit, scientifique, mais sans aucun doute d’une grande clarté pour les passionnés de l’orthographe et de son enseignement.

 

         La rentrée approche ; laissez vous tenter par Le livre de Nina et que du lieu de son éternité, elle vous encourage dans vos travaux et dans votre enseignement. C’est cela pour moi, la vraie transmission : celle qui passe par le long et dur labeur de ceux qui nous ont précédés et qui pour reprendre une expression que j’aime bien de Lacan « n’ont pas cédé sur leur désir » d’être et d’exister dans le temps de leurs engagements : pour Nina : l’orthographe et l’égalité entre tous dans un monde fraternel.

 

Merci Nina pour tes livres, pour ton oeuvre toute entière, pour tes engagements et pour ton sourire si lumineux d’intelligence.  Marie-José

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13 juin 2011 1 13 /06 /juin /2011 09:39

« Ces histoires qui nous façonnent : L’éveil du sens entre mémoire et oubli »

Nous avons besoin de donner un sens à notre vie et du sens à ce que nous avons vécu, choisi, subi, traversé. Notre mémoire va puiser parmi la multitude d'événements qu'elle rencontre des petits cailloux et parfois des petites perles qui vont constituer la trame singulière et personnelle de ce que nous appelons notre vie. Si nous ne nous racontons pas d'histoire, nous n'avons pas d'identité, nous ne sommes personne. Mais certaines de nos histoires ont aussi le pouvoir de nous détruire alors que d'autres vont nous permettre de devenir quelqu'un, héros, survivant ou simplement vivant.

Comment aider les personnes fracassées par l'existence à revisiter leur histoire (avec ses zones d'ombre, ses douleurs, ses inconnues) pour se raconter un récit « intelligible et acceptable » à propos de ce qu'elles ont vécu ? Comment aider des enfants sans racines à glaner des éléments de leur histoire dont ils pourront faire un roman ? Comment, en tant que thérapeute, aider nos clients à élaborer des récits au pouvoir libérateur ? Quelles sont les articulations entre histoire personnelle, familiale et sociale ? Quelle liberté pour l'individu ? Autobiographie, travail de mémoire, récit de vie, journal intime, mémoires ... En quoi le fait de raconter son histoire peut-il être salvateur ? N'est-ce vraiment qu'un phénomène de mode ou cela répond-il à un besoin profond de l'être humain ?

Quelles sont les limites à ce que nous pouvons nous raconter à propos de nous-mêmes : quelle différence entre raconter son histoire et se raconter des histoires ? Que pouvons-nous apprendre de l'historien et du philosophe sur la recherche de la Vérité et la sélection inévitable parmi les faits ?

Ce congrès s'adresse aux professionnels de la relation d'aide (éducateurs, assistants sociaux, psychologues, médecins, infirmiers, juristes, etc.) qui ont pour mission d'accompagner des enfants, des adultes, des familles aux prises avec une histoire difficile.

Il poursuit un triple objectif :

  • Permettre aux participants de découvrir des approches diversifiées (issues de la systémique, de l'hypnose, de l'art-thérapie, de la sociologie clinique, etc.) qui prennent en compte l'histoire des personnes sans les y enfermer ;
  • Mettre à disposition des participants un lieu d'échange de pratiques sur ces questions via le « congrès off »;
  • Proposer de se décaler de l'urgence du travail quotidien pour prendre du recul et réfléchir à nos pratiques sous l'angle de l'histoire, de la science politique, de la philosophie ou encore de la démarche artistique.


Ce congrès sera émaillé de contes, de métaphores et d'extraits littéraires choisis par l'équipe de Parole d'Enfants.

Des projections vidéos pourront également être proposées en parallèle avec les conférences annoncées.

Association fondée en 1996, Parole d'Enfants développe différents pôles d'activités en faveur de l'enfance en danger : recherches-actions, formations des professionnels de la relation d'aide, sensibilisation du grand public et publications d'ouvrages spécialisés sont autant de moyens de contribuer à améliorer les systèmes d'aide et de soin au bénéfi ce des enfants en difficulté, et particulièrement des enfants victimes d'abus sexuels.

Chaque année, un grand congrès international est organisé à l'Unesco. Il réunit des orateurs et des participants venus de France, de Belgique, de Suisse, du Luxembourg et du Québec.

Les bénéfices générés par ce congrès international sont intégralement dédicacés à l'asbl Kaléidos qui développe une activité de prise en charge spécialisée des situations d'abus sexuels intrafamiliaux en Province de Liège.

 

JEUDI 24 Novembre

9h30 Ouverture

10h00

Eric FIAT
Des contes de fées aux tristes nouvelles, et retour : ces histoires qui nous font et défont

11h00 Pause-cafe

11h30 Conférences au choix

Jean-Paul MUGNIER
"Une vie, c'est l'histoire d'une vie"


Nayla CHIDIAC
Écrire le silence : les ateliers d'écriture thérapeutique

12h30 Pause-déjeuner

14h00

Mireille CIFALI
Au moment opportun, entre oubli et mémoire

15h00

Bernard FOUREZ
Cette Hypermodernité qui nous façonne

16h00 Pause

16h30

Martine LANI-BAYLE
Raconter pour apprendre

17h30

Vincent de GAULEJAC
Le sujet en quête de sens

18h30 Fin

VENDREDI 25 Novembre

9h00

Francine ROSENBAUM
L'enfant tigre : les histoires meurtries des migrants pansées/pensées par la thérapie narrative en langue maternelle

10h00 Conférences au choix

Evelyne JOSSE
Redevenir auteur de sa vie



Valérie ROSOUX
Après la guerre, le travail de mémoire comme deus ex machina ?

11h00 Pause-cafe

11h30 Conférences au choix

André GREGOIRE
Des histoires à vivre debout ... plutôt que des histoires à dormir debout



Bernard DECONINCK
Comment diminuer l'impact des mémoires traumatiques par l'ostéopathie

12h30 Pause-déjeuner

14h00

Samira BOURHABA et Yves STEVENS
Se souvenir d'oublier? Ou se souvenir de se souvenir?

15h00 Conférences au choix

Marie-Thérèse FERHAN et Gisèle ROSSET
Le conte en thérapie familiale, une histoire qui ouvre à d'autres constructions



Jacques CASTERMANE
Guérir "le" moi ou guérir "du" moi ?

16h00 Pause

16h30

Patrick CORILLON
Les paysages de la mémoire

17h30 Fin

 

J’y serai. Je vous rencontrerai. Je vous raconterai. MJA 

Infos

Parole d’Enfants
En Belgique > 7c, Boulevard d’Avroy B-4000 Liège
En France > 57, rue d’Amsterdam F-75008 Paris
Tél. vert (depuis la France) : 0800 90 18 97
Tél. : 00 32 (0)4 223 10 99
Fax : 00 32 (0)4 223 15 56

N° d'agrément comme organisme de formation continue : 11.75.34598.75
(sous la Préfecture de la région d'Ile-de-France)

Conditions d'inscription

Avec paiement avant le 10 juillet 2011

  • Individuelle : 135 EUR ou 175 CHF
  • Par convention : 225 EUR

Avec paiement à partir du 10 juillet 2011

  • Individuelle : 170 EUR ou 220 CHF
  • Par convention : 270 EUR
  • Inscription groupée de 5 personnes et plus > 20%
  • Étudiants sans emploi et demandeurs d'emploi > 50% sur présentation d'une attestation (pas de tarif de groupe).
  • Pour les participants français : nous avons introduit une demande auprès de UNIFAF pour que le congrès bénéficie d'un accord pour une prise en charge dérogatoire au bénéfice des professionnels concernés, sous réserve des conditions habituelles requises pour les remboursements des actions de formation des adhérents.
  • Pour les médecins belges : nous avons introduit une demande de reconnaissance de cette activité auprès du Comité d'Accréditation de Médecine.

Lieu et dates

  • Jeudi 24 novembre 2011 > de 9h30 à 18h30
  • Vendredi 25 novembre 2011 > de 9h00 à 17h30

UNESCO:
125, avenue de Suffren 75007 Paris
Métro :
Ségur ou Cambronne
Avec le soutien de la Commission
Nationale Française pour l'UNESCO
Hébergement - transport
A Paris : www.parisinfo.com


Fichets SNCF sur demande (20% de réduction)

 

L'inscription est ferme dès réception du bulletin d'inscription et du paiement (ou d'une attestation de prise en charge fournie par l'employeur).
Les annulations de votre part ne font pas l'objet de remboursement, sauf motif exceptionnel sur présentation de certificat.
Dans ce cas, nous retiendrons une somme de 25 EUR de frais administratifs.

 

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11 juin 2011 6 11 /06 /juin /2011 11:49
La Jalousie

Délices et tourments

Marcianne Blévis

Seuil, mars 2006

(206 pages)

(4)

 

Chapitre II

La fêlure du narcissisme

 

La fêlure du narcissisme ou j’écrirai aussi : la grammaire de la douleur

Une grammaire qui s’écrit par des propositions principale et des propositions subordonnées circonstancielles.

Mais venons-en au vif du sujet : la douleur de Fabien.

 

Propositions principales :

 

Fabien souffre.

Fabien refuse le départ de la femme qu’il délaissait.

Fabien ne se reconnaît radicalement pas dans son rival qui est trop laid.

Fabien apparaît comme vivant son ancienne amante comme étrangère.

Fabien se répète sans cesse : « je suis beau »

Fabien ne comprend pas pourquoi son amante l’a quitté.

Fabien dénie le lien entre son amour ressuscité et le départ de son amante

 

Proposition subordonnée circonstancielle de but :

 

Fabien veut reconquérir son amante.

 

            Propositions subordonnées circonstancielles de conséquence :

 

         Fabien est hagard, son regard a changé, il flotte entre deux mondes.

            Fabien ne tient pas en place pendant les séances.

         Fabien contemple sa vie comme si elle était celle d’un autre.

         Fabien sent son corps  comme « aspiré » sous les roues d’une voiture

         Fabien se sent expulsé de  son corps et de son âme, de lui-même

         Fabien est blessé dans son narcissisme

         Fabien a des sensations de chute et d’effondrement

         Fabien s’accroche à son ancienne maîtresse

 

  Proposition subordonnée circonstancielle de temps

 

         Fabien, passe des heures à surveiller son amante,

 

Cela pour les propositions de douleur. Marcianne Blévis psychanalyste nous introduit maintenant au traitement de la douleur ainsi « proposée » par Fabien.

Le traitement est difficile, aux limites « des impasses du transfert » parce que Fabien est tyrannique, épluchant chaque mot, chaque interprétation. Sa douleur remet en cause sa toute-puissance et la thérapie s’avère difficile. Marianne Blévis souligne comment la solitude de Fabien a « été vécue mais reste en suspens », en suspens de sens, ce que toutefois, une fois encore  elle tente de retrouver la langue d’enfance de son patient. La retrouver avec lui, dans l’accompagnement de ses mots à elle et de ce fait « lui rendre les mots de sa douleur égarée. », l’aider à s’inscrire dans du symbolique dont la douleur l’a exclu. A nouveau dans ce chapitre, Marianne Blévis nous raconte la douloureuse réappropriation de l’histoire d’un homme en suspens de lui-même, dont l’histoire a été confisqué par une douleur qu’il n’a pu s’approprier.

 

         Enfin, nous trouvons aussi dans ce chapitre des repères théoriques sur le narcissisme qui aident les professionnels à rencontrer, à écouter, à entendre la douleur des jaloux qui vivent encore et encore, dans un toujours de douleur, un visage de l’impossible, visage qui reste à reconnaître au cours de la cure. De la reconnaissance de la grammaire par laquelle cet impossible se découvre, « se dévoile » dépend  une issue à la douleur des jaloux, douleur si destructrice pour eux et pour les autres.

J’ai admiré l’élaboration clinique et théorique de ce chapitre qui dit la difficulté d’être et le gouffre d’un homme jaloux aux prises avec son silence d’enfance et sa toute-puissance infantile resurgissante par le départ de son amante qui épèlent  sa douloureuse « Fêlure narcissique ».

Être humain est une aventure difficile, voilà la grande leçon des cliniciens, toutes écoles confondues. A eux tous, bravo et merci pour tant de travail qu'ils mènent du lieu de leur âme. MJA

 

        

          

        

 

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6 juin 2011 1 06 /06 /juin /2011 14:54
La Jalousie

Délices et tourments

Marcianne Blévis

Seuil, mars 2006

(206 pages)

(3)

 

Chapitre I.

L’étrange appel de la jalousie

(P.25-41)

 

Nous la nommerons avec Marcianne, Cléa.

Cléa c’est l’histoire d’un point de grammaire : « Tu ne sauras combien je t’aurai aimée ».. Un point de grammaire soulevé par son amant, dans un espace-temps si douloureux Cléa se laisse emporter dans déferlement d’une soudaine jalousie « immotivée » confie-t-elle à Marcianne Blévis, son analyste qui va l’écouter sans relâche jusqu’au temps advenu d’une grammaire moins impitoyable pour Cléa. C’est déjà le premier point que j’ai souligné dans ce chapitre qui nous apprends, que nous pauvres humains, nous sommes avant tout une grammaire douloureuse ou heureuse. Nous vivons saisie par notre grammaire, espace intermédiaire, dirait Winnicott avec les autres. Qui est l’auteur de cette grammaire de notre vie ? Nous-mêmes ou les autres ? Difficile de répondre. J’ai souvenir d’une citation de Lacan : Dans la situation d’analyse, il n’y a pas deux personnes qui parlent mais trois personnes : l’analysant, l’analyste, le sujet de l’inconscient. Le souvenir de cette citation est lointain et peut me trahir. Je m’en excuse alors auprès des purs lacaniens. Mais ce que je veux dire c’est que lorsqu’on est deux à parler, on est peut-être trois, voire même quatre !!! Moi, l’autre, et nos deux langues d’enfance ! Ce que j’ai aimé dans ce chapitre toujours écrit avec clarté mais avec une grande exigence théorique c’est la façon dont l’appel de la jalousie est doublée de l’appel à la langue d’enfance de Cléa et ces deux appels mutuels font sens et donc guérison. C’est très beau.

Pour Cléa, comme les autres, la jalousie est un rythme, est un gouffre, est un espace temps cruel , sauvage, qui les dépossède d’eux-mêmes, qui sur leur vie inscrit le fatidique « ne plus être aimé » inscrit la solitude soudaine liée à l’amour rendu impossible par la tragique duplicité des mots : duplicité parceque le langage symbolique de tous, celui partagé par la langue commune se double de la langue d’enfance provoquant la perte au présent du sentiment de soi, dévalorisant ainsi les jaloux, en l’occurrence Cléa et survalorisant du même mouvement son amant et «  sa potentielle rivale ».

Je ne vous raconterai pas l’histoire de Cléa ; ce serait faire injure à l’auteure, si sublimement praticienne, qui la raconte si bien. Il était une fois Cléa, son enfance, ses drames, ses pertes, son enfer, son père, sa mère, ses facades, il était une fois son enfance, son secret, il était une fois son enfance ses souvenirs. Il était une fois la projection violente de tout ça dans sa grammaire actuelle, soudain diffractée par son chagrin passé qu’elle livre à sa psychanalyste dans le fil des séances, dans sa langue d’enfance. Marcianne Blévis, psychanalyste, attentive à ses mots comme à ses rêves, à ses rêves comme à ses cauchemars, à ses cauchemars comme à ses affects, à ses affects comme à ses silences, l’écoute l’aidant ainsi à réintégrer une grammaire amoureuse plus douce rendant l’amour pour un autre, son amant, possible, une fois la confusion des sentiments passée par la réappropriation de la langue d’enfance mais surtout par la réappropriation d’elle-même et de sa vie de femme. Cléa, femme hors d’atteinte de son amant, prisonnière de son enfance, va redevenir femme adulte, à proximité de l’amour. Elle aura vaincu ses peurs et ses douleurs d’enfance grâce à sa psychanalyse mais surtout grâce à Marcianne Blévis, porteuse de psychanalyse qui de séance en séance, faisant comme Freud, un patient travail d’archéologue, habitant les ruines psychiques de Cléa l’aidera à coup de pioche, à coup de mots, à coup d’interprétations signifiantes et transférentielles à reconstruire ses ruines et telle une historienne à utiliser ses archives existentielles pour donner sens à sa vie présente grâce à sa vérité retrouvée. La jalousie sera vaincue, la grammaire pathologique sera « reconnue » dans sa langue d’enfance, et la femme adulte parlera une langue adulte, grammaticalement possible à vivre qui lui permettra nous l’espérons avec elle deux d’épeler dans un doux paysage, dans la la langue du tendre, le mot « Amour ».

J’ai aimé ce chapitre si plein d’espoir sur l’humain, qui est le récit d’une « victoire » écrirait Boris Cyrulnik (voir mon article d’hier, catégorie Les tout-petits), une victoire sur l’enfance qui parfois fait si mal mais qui porte aussi en elle tous les chemins du verbe aimer au risque d’une conjugaison difficile mais toujours possible.

Merci à Cléa et à Marcianne d’avoir tracé à nouveau les balises de ce verbe aimer garant de la promesse du recommencement, garant du possible espoir, pour Cléa et pour tant d’autres. La psychanalyse c’est ça aussi ; une grammaire de l’amour à reconquérir et donc, pour cette reconquête, splendidement menée, malgré la douleur et racontée à nous,

 

A toutes les deux,  bravo !!! MJA

 

 

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29 mai 2011 7 29 /05 /mai /2011 18:28
La Jalousie

Délices et tourments

Marcianne Blévis

Seuil, mars 2006

(206 pages)

(2)

 

Jaloux, jalouses

(Page 13-24)

 

Ces quelques pages se situent avant le chapitre 1 et les suivants. Je les pressens comme une hypothèse du livre, une hypothèse qui va se déployer dans les strates des chapitres, dans les pages d’un savoir psychanalytique qui nous attend, alors lentement progressons,  avec l’auteure cherchons, dans l’espoir de trouver du meilleur pour permettre aux jaloux, jalouses de « s'y retrouver » au seuil de leur fenêtre ouverte sur leur désarroi, aux formes de l’attente et de la possession, pour permettre à leurs victimes de souffler et de « s’y retrouver » objet d’amour et de respect.

Il était une fois une fenêtre, une toute petite fenêtre en Andalousie, celle qui cache ou introduit au regard de l’autre et qu’on appelle « jalousie ». Quand le regard se fait sujet du verbe dominer. c’est ce que nous questionnons au cœur du chapitre. Et si la jalousie était une histoire de regard sur soi ou sur l’autre, « de blessure du partir » ou de « blessure du mépris » ? Quand ça fait mal de ne pas comprendre ce qui rive à l’autre dans un suspens incontournable et  insupportable, dans un désarroi pour le jaloux comme pour le jalousé. Jusqu’à la rupture.

Il était une fois une attente. Un regard rivé sur l’autre par peur de le perdre et je ne sais pas pourquoi, j’associe durant toute la lecture de ces pages avec ma lecture en cours sur la théorie de l’attachement et notamment sur le chapitre présenté ce jour intitulé « l’attachement un lien vital (4) ; j’associe particulièrement sur le passage lu, relatif au modèle d’attachement « insécure Ambivalent /Résistant quand la terreur de perdre la figure d’attachement rive désespérément le sujet à cet objet  si insécure. Je dis bien j’associe, je ne dis pas c’est cela. Mais je suis toujours intéressée par le cheminement de mes lectures, mes intuitions de lectrice. Et si j’avais pressenti un lien clinique entre ce livre de Marcianne et le livre Nicole Guedeney ? Allez ! une piste pour inventer votre lecture ou la mienne !

L’auteure, quand à elle, insiste et attire notre attention sur le lien d’enfance, « la langue d’enfance », comme elle l’écrit si joliment,  et le vécu des jaloux, ne disons pas le jaloux, car des jaloux, jalouses, il y en existe de toutes sortes, avec des souffrances et des symptômes différents, avec des problématiques infantiles différentes, au père, à la mère, à la fratrie, mais dès ce prélude Marcianne, psychanalyste, attire notre attention sur la nécessité de retrouver le sens de cette « langue d’enfance » qui vient du fond de leur préhistoire ou de leur histoire traverser le vécu des jaloux pour réparer ce qui est  encore réparable après souffrance et destruction de ce sujet « à la fenêtre » de son être, faisant le guet de cet autre qui à tout moment pense-t-il le trahira parce que lui, n’est pas digne d’être aimé, parce que l’autre est plus fort et le réduit à l’enfant malheureux qu’il a peut-être été. J’écris bien peut-être. Se garder de simplifier un écheveau difficile qui fait de la jalousie une drogue, une addiction du « vouloir » localiser l’autre et le posséder. Le ou la posséder ; la jalousie n’est pas l’apanage d’un sexe, il frappe les hommes et les femmes mais les hommes frappés de jalousie plus souvent frappent la femme. Ne l’oublions pas. Jalousie et violences conjugales ont souvent un lien ; mais ce n’est pas le sujet de ce chapitre qui parle surtout de ce que fait voler en éclat la jalousie, voler en éclat jusqu’à la pulvérisation de l’essentiel : la rencontre de l’autre comme objet précieux d’amour.

La place du psychanalyste dans ce tourment qu’est la jalousie est, bien plus que la description du désastre, en retrouver causes et sens par l’essence de la parole.

Ainsi, cette femme qui reconnaît qu’elle aime l’autre à partir du moment ou elle éprouve de la jalousie ? Pourquoi cet étonnant détour pour reconnaître l’amour ? Que revit-elle là de son premier objet d’amour, de sa première séparation ?

Retrouver la langue de l’enfance, entendre les trous du vécu laissés par la jalousie, s’y repérer dans les stratégies du sujet à exercer sa jalousie mais aussi à vivre le chagrin d’être abandonné, quitté, objet de silence et de mépris, s’y repérer dans l’espace fusionnel crée par les jaloux, dans cette fusion dont ils ne peuvent se déprendre, perdus dans leurs incertitudes et leurs angoisses, doutant d’eux-mêmes et surtout de leur valeur jusqu’au bout de l’autre : le semblable est meilleur qu’eux et ça les fait basculer dans l’enfer de la jalousie, quand elle se fait extrême. De l’enfance, rien que de l’enfance. Qu’en est-il de cet (te) adulte non advenue (e)  Qu’en est-il de ces êtres au bord de l’effondrement de leur être, interdisant à leur partenaire et à eux-mêmes la plénitude de l’amour ? Peur de l’ennui ou peur de l’harmonie ? De toute les façons sans doute une impossible rencontre avec l’autre, rencontre alors qui devient confrontation violente, frontale.

Ce sont toutes ces questions issues de sa pratiques auxquelles nous introduit dans un style vivant et simple Marcianne Blévis. Ces pages pressentent du savoir de l’humain et nous donne l’envie de tourner les pages à venir pour  savoir encore et encore ce qu’il en est de ce sentiment vieux comme le monde : la jalousie. Othello, ne date pas d’hier ! Et avant Othello... cherchons...les textes religieux, toutes religions confondues...cherchons ! Lisons ! Approfondissons l’humain qu’est la jalousie, la nôtre ot celle de l’autre. La jalousie,  l’hôte de ce livre, avec ses délices et ses tourments.

A suivre ! MJA

 

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28 mai 2011 6 28 /05 /mai /2011 21:54
La Jalousie

Délices et tourments

Marcianne Blévis

Seuil, mars 2006

(206 pages)

 

Chers Inventeurs, pour vous, pour moi, je vais ouvrir un nouveau livre, et chapitre par chapitre, ensemble, nous le découvrirons, voulez-vous ?

Ce livre a une histoire. Notre curieux monde moderne, via Internet, nous offre parfois des surprises heureuses. Ainsi, un jour, au hasard d’un mail, j’ai eu la chance de retrouver, par mon blog interposé, une cousine, du côté de l’errance de ma famille. Je l’ai toute de suite nommée, je ne sais pourquoi, « ma cousine surgit de l’errance. » Nous avons échangé après quelques mails, comme ça, en toute confiance nos livres, ceux que nous avions écrits, l’une et l’autre. Moi, La Femme en retard, elle, La Jalousie. Délices et tourments.

         J’en ai immédiatement aimé le thème : la jalousie, sentiment si humain, si permanent, si latent, à la fois silencieux et bruyant, un sentiment venu de l’enfance et qui roule comme une boule dans nos vies, pas toujours sages et si souvent tourmentées, un sentiment qui trop souvent colle à la semelle de l’amour et le brise mais aussi parfois le pimente, un sentiment couleur d’aiguille, couleur brindille, un sentiment qui se fiche dans le cœur, comme une écharde, un sentiment sombre, un sentiment violent, un sentiment qui se cache, un sentiment qui éclate, qui se déclare comme une passion, qui tue comme une possession. Le verbe « posséder » broie l’amour et son toujours. L’amour doit être fleur et non peur, l’amour doit être duvet et non lourde prison, l’amour doit être soleil et non glaciale déraison. L’amour c’est le souffle de la vie et non haleine de la mort.

J’en ai immédiatement aimé la couverture, toute douce, voire même soyeuse.

J’en ai immédiatement aimé, l’illustration de couverture signé Christian Roux : du rouge et du noir, des lignes brisées, un homme noir, légèrement déstabilisé , regardant de loin, un couple gris, entre deux barres rouges. Une couverture qui dit par son rouge et son noir, la violence et le chagrin de la jalousie. Sa peur aussi.

J’en ai immédiatement aimé, le curieux prénom de l’auteure, celui de ma cousine surgit de l’errance, Marcianne.

J’ai ouvert le livre, j’en ai lu la gentille dédicace à moi adressée. Les dédicaces, c’est quelques chose de gentil que les auteures écrivent à un lecteur en particulier. C’est un souffle amical et j’ai recueilli ce souffle.

L’adresse du livre, c’est important aussi. C’est le manque dans lequel s’engouffre le livre, c’est le manque à partir duquel il a été écrit. Mon autofiction, La femme en retard, je l’ai adressée à Cathy et à Béatrice,  celles qui étaient ma soeur et ma meilleure amie, Cathy et Béatrice qui m’ont été volées dans un même été 2002, qui se sont envolées dans le ciel immense de mon chagrin. Cathy et Béatrice, celles qui viennent habiter mes nuits si souvent, celles qui étaient mes rires et mes longues conversations, celles dont je n’ai jamais fait le deuil ni par l’écriture ni par les mouvements de mes projets, celles qui à tout jamais seront du pur manque dans mon temps troué par leur mort. L’adresse du livre de Marcianne est à Claire, sa mère. Quand la mère fait destin d’écriture. Et puis sous l’adresse « A Claire ma mère », une phrase que je lis et relis et que j’espère, l’auteure me pardonnera de citer. Mais elle si belle cette phrase, que je ne peux y résister :

« Elle avait longtemps cru que les enfants naissaient lorsqu’un rabbin oubliait  un mot dans une prière. Ma vive passion pour les mots et les oublis en est-elle l’écho ? ».

Je lis et relis cette phrase qui m’échappe, m’attire puis s’enfuit,  ne voulant pas me dire son sens que je pressens si important. Oui, les mots venus de la prière du Rabbin, quand elle se fait ferveur, ne sont-ils pas par la brisure de l’oubli ce qui génère la vie, l’enfance ? Je ne sais pas, je chercherai encore, cette phrase qui se ferme à moi et toutefois me tend les bras, cette phrase venue de l’enfance de l’auteure, qui vient là ouvrir son propos de psychanalyste.

Marcianne Blévis est psychanalyste, membre de la Société de psychanalyse freudienne. C’est écrit sur la quatrième de couverture. J’aime les quatrièmes de couverture, fenêtre ouverte sur le livre qui nous attend. En l’occurrence, la jalousie, celle qui nous met dans tous nos états, cette folie qui nous plonge en désarroi, obstacle à l’amour. La quatrième de couverture s’ouvre sur le livre écrit par une psychanalyste qui va « nous proposer d’audacieuses analyses de ces inévitables jalousies qui jalonnent l’existence et celles qui se révèlent les plus cruellement vénéneuse ».

Puis, je me dirige vers l’Avertissement. J’aime quand l’auteur avertit le lecteur du balbutiement dont l’écriture émerge. Marcianne Blévis nous avertit qu’à défaut de nous parler des aventures « d’ une psychanalyse » elle va nous entraîner dans « des psychanalyses » et surtout dans les strates de la jalousie, strates structurée par les chapitres. Oui, le livre ne sera pas une séries de confidences disloquées mais des confidences structurées par le savoir de l’analyse. J’ai toujours aimé ce savoir là, qui habite ma vie depuis des années, qui a structuré ma vie et lui a donné sens. Alors, oui, j’ai envie de lire avec vous ce livre où déjà au hasard des pages tournées, je sais que je vais lire de bien étranges passions d’hommes et de femmes habités par la peur d’être trahis.

Mais assez pour aujourd’hui.

Très prochainement, peut-être demain, nous lirons ensemble, les premières pages intitulées « Jaloux, jalouses ».

A suivre ! MJA

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19 mai 2011 4 19 /05 /mai /2011 13:49

Les éditions érès s'associent à l' a.p.p.e.a Association francophone de Psychologie et Psychopathologie de l'Enfant et de l'Adolescent pour vous inviter à participer aux Journées de Lyon les 3, 4, et 5 novembre 2011.

 

Psychopathologie et handicap chez l'enfant et l'adolescent :

Questions, Tensions, Enjeux

 

Psychologues, pédopsychiatres et professionnels associés se réunissent pour conduire une réflexion, partager des expériences, enrichir des points de vue, explorer la clinique de l’enfant et de l’adolescent et analyser les conditions d’application de la loi handicap de 2005, notamment pour les enfants avec troubles mentaux, psychiques et cognitifs.

 

Toutes les informations pratiques, le programme en préparation, le déroulement des 3 journées d’études et les modalités de participation sur le site

 

www.psy-colloque-2011.org

 

Avec le soutien et la participation des auteurs, des revues et de l’ensemble des éditions Erès.

 

Lyon

3, 4 & 5 novembre 2011

Cité centre de congrès

 

Programme :

35 Conférences

12 Symposiums

2 Tables rondes

3 Ateliers cliniques

50 Présentations numériques

Salon exposants

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