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3 janvier 2011 1 03 /01 /janvier /2011 18:30

Un livre de Charles Gardou

Et des chercheurs des 5 continents

Le handicap au risque des cultures

Variations anthropologiques

érès. Nov 2010

                    (20)

 

Pierre A.Vidal-Naquet et Benoît Eyraud

 

Nos guides Pierre A.Vidal-Naquet et Benoît Eyraud sont

 

Pour le premier Pierre A Vidal-Naquet, sociologue et chercheur au CERPE et associé au MODYS-CNRS à Saint –Etienne. Ces travaux récents concernent l’insertion professionnelle des personnes atteintes de maladies chroniques ou/et de handicap. Il a publié Faire avec le cancer dans le monde du travail  (L’Harmattan). Actuellement, il poursuit ses recherches, d’une part sur les activités des Maisons départementales des personnes handicapées et la place que celles-ci accordent aux projets de vie dans les processus d’allocations des droits ; d’autres part sur les conditions de maintien à domicile des personnes handicapées par des troubles psychiques

 

Pour le second, Benoît Eyraud, docteur en sociologie, est chercheur à Lyon au CERPE et au LAHRA, associé au IMM/EHESS. (J’invite les Inventeurs à se reporter à la page 430 du livre qui éclaire le contenu de ces sigles.) ses travaux portent sur les dispositifs juridiques de l’ « incapacité »  et de ses conséquences (les mesures de protection), sur les politiques de santé mentale et celles de l’habitat. Ils s’inscrivent ponctuellement dans une dimension comparative avec la situation britannique.

 

Quelques bas de page parmi les 34 franco-anglais.

 

N.Dodier, V.Rabeharisoa , « Les transformations croisées du monde « psy » et du discours social » , Politix, N°73, vol 19, 2006

 

D. Fassin, Des maux indicibles. Sociologie des lieux d’écoute, Paris, la découverte, 2004

 

P.A Vidal-Naquet, S.Tievant, Les lieux d’écoute de la souffrance sans nom, Rapport DIV, 1996

 

B.Eyraud, « Quelle autonomie pour les « incapables majeurs ? Déshospitalisation psychiatrique et mise sous tutelle »,  Politix, N°73.  Vol 19, 2006

I Berlin, Eloge de la liberté, Paris, Calmann-Lévy, 1988.

 

R. Castel, La gestion des risques, Paris, Editions de Minuit, 1981.

 

Nous pouvons lire de nombreux autres bas de pages très riches mais je m’arrêterais sur celui nommé « La gestion des risques ». En effet c’est de cela me semble-t-il qui est question dans ce chapitre : la gestion des risques :

De quels risques ?  Doter le pays de lois qui aideraient chacun à acquérir et à vivre une autonomie avec son handicap et malgré son handicap..

 

Ce chapitre, bien construit,  très intéressant par son exigence de rigueur  a été, par ses qualités, difficile pour moi à lire. Il fait référence à des lois diverses que je ne connais pas et il pose l’objet « handicap psychique » avec une certaine certitude qui diffère des autres chapitres. Mais, c’est justement cela, qui est notre réalité quotidienne anglaise ou française ; la définition du handicapé psychique et sa gestion. Nous sommes alors, dans une réalité dure, il faut le dire, ne pas faire la politique de l’autruche, et j’ai remarqué qu’à plusieurs reprises les auteurs mettent des guillemets comme pour adoucir leur propos, des guillemets qui peut-être sont une forme de résistance à des concepts et des lois qui, d’une certaine façon, définit l’autre par sa vulnérabilité dans une sorte de point barre qui peut-être douloureux mais c’est aussi la force des lois de définir avec clarté des contextes et des situations, extirpant l’affectif pour mieux le retrouver dans une efficacité quotidienne. C’est sur tout cela que j’ai réfléchi en lisant ce chapitre qui compare le handicap psychique géré par le Royaume-Uni et par la France, dont les contextes sociaux et culturels sont différents impliquant que la politique française exprime « le statutaire » et travaille la stabilisation du statut tandis que le Royaume-Uni travaille à l’amélioration situationnelle des malades. Ce se sont de logique différentes qui imprègnent donc différemment , la scène médicale, la scène juridique, la scène du statut de la personne. Je ne peux vous résumer cela, ce serait trop long ou trop incomplet mais je vous invite vivement à lire la page 357 de l’ouvrage.

 

EN FRANCE :

 

Avançons dans le chapitre nous lisons comme dans les chapitres précédents une approche historique du handicap qui a subi de nombreux remaniements entre 1950 et 1980, avec un lent glissement, lent mais sûr, de l’hospitalisation  à une déshospitalisation dans un processus marqué par l’émergence d’une pluralisation des statuts ; mais fin du XXe, on assiste à nouveau à un redéploiement du principe de l’hospitalisation et de l’intervention psychiatrique. Ce qui est intéressant, me semble-t-il à noter, c’est cette interrogation face aux malades mentaux, de toujours les situer « en dehors » ou « en dedans » de la communauté, dans un va et vient qui me semble-t-il est métaphore de l’impossible gestion du différent, parfois si douloureux pour tous., une vulnérabilité des uns qui interpelle la force des autres, qui encombre comme dirait Charles Gardou et dont on ne sait où la placer.. Oui, j’ai eu du mal à lire ce chapitre, parce que l’interrogation qu’il emporte est douloureuse et me semble-t-il de l’ordre de l’insoluble. Mais les lois sont là pour se battre avec l’insoluble et nous aider à nous situer et en élaborer d’autres (de lois).

Les auteurs abordent, ensuite,  le problème du processus de déhospitalisation amorcée dans les années 50  qui s’accompagne d’une politique d’intégration sociale. La notion « d’interné » recule, tente à s’effacer avec la mise en place de soin en aval de l’hospitalisation, avec la mise en place de tutelles qui permet une prise en charge des malades en dehors de l’hôpital. A l’époque des internements, nous rappellent à propos les auteurs, il y avait fusion entre médical et juridique (lors des internements d’office), maintenant pouvoirs médicaux et juridiques tendent à être disjoints : loi de 1968. Ainsi le statut-médico-social est différent du statut médico-juridique
Nouvelle lois en 1975. On note une recherche d’amélioration et de protection juridique des malades mentaux , même si le corps médical à juste titre, reste très prudent quand à l’instauration de ces lois, qui à vouloir protéger « créent » aussi l’objet « malade psychique ».

Puis nous entrons dans l’aire du décloisonnement des statuts qui sont renforcés par les nouvelles orientations de la psychiatrie qui lutte contre les malades au profit du développement de la santé mentale qui permettrait à chacun de mobiliser toutes ses capacités psychiques malgré la maladie.

Puis c’est la loi, du 11 février 2005, celle nommée la loi « de L’égalité des  droits et des chances » qui introduit la notion de handicap psychique et de handicapés mentaux à côté des autres handicaps et la loi du 5 mars 2007 dont l’objet est la protection juridique des majeurs.

Toutes ces lois vont dans le sens, nous disent les auteurs de la protections des personnes en situation de handicap psychique, non pas de la protection de leur personne comme supposé dans l’internement mais comme protection de leur statut citoyen, ce qui semble être dans la tradition de la France républicaine.

Toutefois, on peut regretter que les auteurs, tout à leur développement sur la tradition française républicaine, n’aient pas dénoncé dans leur historique, la maltraitance des malades mentaux subit pendant la seconde guerre mondiale .

Ce qui d’une certaine façon, nous amènerait à l’approche situationnelle du Royaume-Uni, puisque l’objet de ce chapitre est la comparaison des deux systèmes.

 

AU ROYAUME-UNI

 

L’ approche est comme nous l’avons vu au début du chapitre, situationnelle.et s’inscrit dans une longue tradition juridique britannique qui privilégie la protection de l’individu

.La réorganisation profonde de la prise en charge des malades mentaux, s’est faîte, comme en France, après la seconde guerre mondiale.

Le Mental Health Act 1959 essaie de placer au quotidien le soin de la personne en développant des soins volontaires pour tous les membres de la communauté avec toujours au centre des actes, les psychiatres qui ont le pouvoir de choisir le mode de soin ; médicaments, électrochocs... Il n’ont pas besoin de fournir des justificatifs de leur choix de soins appliqués aux malades.

Le Mental Health Act 1983 remet en question celui de 1959, avec l’appui des mouvements sociaux qui exigent des contrôles sur les soins dispensés par les psychiatres.et qui met en place une démarche légaliste de protection des malades. : chaque situation doit être traitée cas par cas, et la compétence à priori des psychiatres anglais est remise en question. ;ils peuvent subir des contrôles faisant apparaître un phénomène nouveau : « ‘L’emprise de la démarche procédurale ».

Le Community Care Act 1990 organise les relations entre les services sanitaires et sociaux : sont mis en avant les droits de la personne bénéficiaire de s soins et les principes qui guident les soins.

Le Community Care Act 1995 organise une protection légale des personnes et favorise leur intégration dans le milieu ordinaire ; est également menée une large réflexion sur la discrimination faîtes aux malades mentaux, et toute législation européenne est reprise et approfondie et devient le principe conducteur de la prise en compte du handicap. La mise en œuvre de cette loi est largement suivie par une commission « La Disability Right Commission, qui peut soutenir les personnes qui se jugeraient malmenée.

Le Mental Capacity Act 2005 approfondit et articule une législation sociale sur la capacité mentale mais soulignent les auteurs ce travail demeure malgré tout avec une portée réduite car elles sont temporelles.

Les auteurs semblent privilégier le mode de protection française qui protège les statuts plutôt que le mode de protection anglais qui privilégie les personnes. En fait, c’est l’éternelle discussion sur le « à long terme » ou « à court terme ». Faut-il gérer une crise avec les moyens du bord ou réfléchir à supprimer les causes de la crise ? La réponse est, je pense, politique. Bien sûr, nous sommes responsables dans le choix de notre réponse et c’est, je le pense aussi , le grand mérite de chapitre, d’interpeler notre responsabilité citoyenne et de proximité à ceux qui souffrent de trop de vulnérabilité.

Notre responsabilité doit s’étayer nous disent les auteurs sur la connaissance de ces deux cultures, de ces deux approches, de ces deux prise en compte de la souffrance de nos prochains, de ces façons de « gérer les risques » de  perdre notre humanité.

 

Merci donc, à Pierre A.Vidal-Naquet et Benoît Eyraud, pour avoir poser les lois comme autant de supports et d’expression de la pensée collective afin de poser notre responsabilité individuelle, ne craignant pas de mettre la barre très haut dans nos esprits et dans nos cœurs ; la problématique était difficile et donc... Bravo à tous les deux ! MJA

 

 

 

 

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