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11 novembre 2010 4 11 /11 /novembre /2010 21:47


 Marcel Proust parle de « l’oblique discours intérieur (qui va s’éloignant  de plus en plus de l’impression première  et centrale). Il en parle à propos des sentiments que nous éprouvons pour nos prochains.

 

Ce soir, après avoir lu intensément un livre, toute la journée, livre dont je viens de parler dans une note de lecture, livre intitulé « Au nom de la fragilité », j’ai le désir d’appliquer cette expression proustienne « l’oblique du discour intérieur » à l’activité de lire.

 

Inventer une lecture, c’est jouer d’une musique de l’oblique. Un sens premier fulgurant. Une émotion esthétique d’une grande pureté et puis un travail qui soudain crée l’oblique du sens à s’appropprier. Savoir lire, c’est pouvoir se situer dans cette oblique du sens. Être au plus près, au coeur de ce que signifie l’écrivain, puis s’éloigner, « s’y retrouver soi », puis revenir à l’auteur. Créer du sens « oblique » dans un aller retour incessant.

 

Après avoir fini un livre, je suis souvent en proie à un sentiment de grande solitude. Ecrire sur sun livre, comme je le fais à chacun de mes commentaires, c’est reculer le moment de cette solitude, quand je "quitte" la ligne oblique qui me reliait au livre. Mettre un point final à une lecture, c’est accepter de se séparer du livre, de le refermer, de le ranger.

 

Dans mon dernier commentaire de « Au nom de la fragilité », j’émettais le désir de rencontrer tous les auteurs, leur intelligence, leur coeur, leur talent. Ce que je disais là signifiait mon impossibilité à me « séparer du livre » et de leurs auteurs.

 

Je pense aux enfants et au sentiment de perte que peut-être, ils ont comme moi, quand il ferme un livre et comme ça, je me dis, que peut-être « ils n’aiment pas lire » par ce qu’ils ne veulentt pas rejouer une séparation première que leur fait revivre l’acte de fermer le livre. Alors, ils ne l’ouvrent pas, s'économisant ainsi l'acte de le fermer..

 

Je crois que si nous voulons être attentifs au refus de lire des grands comme des petits il nous faut peut-être être attentif à ce que nous faisons après avoir fermé un livre.

 

Après avoir fermé, Au nom de la fragilité » que j’ai lu et travaillé toute la journée, j’ai écouté de la musique, notamment Vivaldi puis j’ai mangé. J’ai « rempli » ma maison de musique et je me suis « remplie » de nourritures liquide, de la soupe et sucrée, de la compote. Par ces deux actions de « remplissage », je luttais contre le vide instauré par la séparation consécutive à la fermeture du livre. Mais cela n’a pas suffi et à nouveau j’écris  « mon livre intérieur » celui que je ne cesse d’écrire et dont je ne me séparerai qu’à la mort.

 

Fermer un livre, c’est repartir dans sa vie. C’est abandonner une oblique ébauchée.  C’est un peu mourir.

 

J’oubliais, peut-être l’essentiel. Après avoir refermé « Au nom de la fragilité », j’ai ouvert et lu longuement des passages du Temps retrouvé », cherchant, mais ne trouvant pas, cette fois-ci la phrase et son contexte, relative à la littérature et à la vraie vie.

 

Ce que j’ai fait toute ma vie : fermer un livre et en ouvrir un autre en proie à l’impossibilité de surmonter la séparation.

 

La séparation, mot-clé de mon histoire de vie. Passée et présente.

 

Et vous, chers inventeurs, que faîtes-vous quand vous refermez un livre ? MJA

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